Marie Leszczynska
très vite à la conquête des cours d’Europe. L’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche
, par exemple, se fera peindre à plusieurs reprises en simple dame de qualité par Jean-Étienne Liotard. Mais aucun artiste ne rappellera à ses glorieux modèles le nom de l’initiatrice de cette innovation…
Une famille entière de musiciens
Comme le roi Stanislas, Marie Leszczyńska adore la musique depuis sa plus tendre enfance. Elle joue du clavecin, un peu de guitare et de la vièle. Médiocrement, mais avec obstination… Elle chante aussi, à l’occasion. Le duc de Luynes précise qu’elle a « la voix fort petite mais fort douce ». Pendant un séjour à Dampierre, chez les Luynes, le célèbre castrat Farinelli
lui a donné des leçons de chant avant de venir chanter chez elle dans un concert à demi privé. Quant à François Couperin qui dédie à Marie L’air dans le goût polonais , il participe régulièrement à ses concerts intimistes jusqu’à sa mort, en 1733.
Beaucoup plus doués que la reine, ses enfants vivent pour la musique. Mesdames ont d’ailleurs choisi de se faire peindre en musiciennes par Nattier. Ils ont tous été initiés par le maître de chant de leur père, Jean-Baptiste Matho, avant d’apprendre toutes les bases de la musique et de la composition avec Pancrace Royer. Sans oublier Marguerite-Antoinette Couperin [9] qui leur enseigne le clavecin ; et Beaumarchais la harpe.
Le dauphin excelle au violon, au clavecin et à l’orgue. Il pratique aussi le violoncelle et la contrebasse, joue de la guitare, de la musette et même du cromorne [10] . De plus, il bénéficie d’une belle voix de basse. Madame Henriette
est parfaite à la basse de viole et Madame Victoire
joue de la guitare. Madame Adélaïde
préfère le violon, le violoncelle et chante avec une forte voix de bas-dessus [11] .
À chacun de ses séjours, Stanislas se délecte des concerts improvisés de ses petits-enfants. Il se joint souvent à eux avec sa flûte, car il partage leur goût pour les concertos d’Albinoni, les sonates de Sammartini et les cantates de Gianotti.
À part Luynes, les mémorialistes n’ont pas été diserts sur la musique de la reine. Outre les récitals privés de la famille royale, la souveraine organise pourtant, deux fois par semaine, de grands concerts dans le salon de la Paix. Lorsqu’il y a foule, ils se déplacent dans l’antichambre du grand couvert. Ces séances musicales se poursuivent aussi durant les séjours de la cour à Compiègne et à Fontainebleau. Elles se déroulent alors dans l’antichambre de la reine. Marie peut ainsi écouter la musique depuis sa chambre, ce qui lui évite de revêtir le grand habit, de rigueur lorsqu’elle est en représentation.
À l’esprit novateur des récitals privés s’oppose la programmation conventionnelle des concerts de la reine qui reste fidèle aux compositeurs du Roi-Soleil, où Lully se taille la part du lion avec Destouches, Campra et Colasse. Les seuls musiciens modernes joués sont ceux qui appartiennent à la Maison du roi : Collin de Blamont, Bury, Rebel, Francoeur, Dauvergne, ou Mondonville que Marie préfère à Rameau.
Son alliée musicale : la dauphine
L’arrivée à Versailles de la nouvelle dauphine, Marie-Josèphe
de Saxe, bouleverse un peu la vie musicale de la reine. La passion de la musique et l’angoisse des premières grossesses les rapprochent ; de plus, elles viennent toutes deux de pays où la musique rythme la vie quotidienne. Lorsque les médecins consignent « Pépa » dans ses appartements, les concerts de la reine s’invitent chez elle. On oublie la musique du Grand Siècle pour choisir selon la mode du moment, en invitant les meilleurs interprètes : le grand chanteur Jelyotte
ou encore Jean-Baptiste Forqueray, violiste renommé et professeur de Madame Henriette
. Sachant que la dauphine a été l’élève douée de Wilhelm Friedemann Bach, fils aîné du Cantor, il écrit pour elle les Pièces de viole mises en pièces de clavecin . Rameau, nommé compositeur de la Chambre, improvise pour Marie-Josèphe
une pièce de clavecin qui deviendra La Dauphine . Zoroastre , Les Indes galantes et Dardanus sont également joués.
La dauphine introduit à Versailles la musique de Hasse, compositeur fêté à Dresde, qui avait autrefois dédié sa Didone abandonata à Marie-Josèphe
, petite princesse de dix ans. En 1750, Hasse et son épouse, la célèbre chanteuse Faustina, sont même
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