Marie Leszczynska
détestable pour Marie qui doit supporter le voisinage des deux amants tout en assistant au manège des badauds, curieux d’apercevoir la fameuse maîtresse du roi.
Ce soir-là, le visage de Marie porte un double masque de tristesse : celui de l’épouse trompée et celui de la mère qui se sépare de sa fille.
« Babet » sur la route de l’Espagne
Après les plaisirs de la fête vient l’heure de la séparation et des pleurs. Le matin du 31 août, Madame Infante s’enferme une demi-heure avec Marie. Leurs adieux sont déchirants ; elles sanglotent et s’embrassent à la fois, sans pouvoir prononcer une phrase cohérente. Même émotion chez le roi qui reçoit tendrement sa « Babet », entouré d’Henriette
et d’Adélaïde
. Devant leur père blême, les jumelles s’étreignent en répétant sans cesse : « C’est pour toujours ! Mon Dieu, c’est pour toujours ! » Les pleurs reprennent lorsque le dauphin s’approche pour l’embrasser. Puis la jeune infante monte en carrosse, suivie par Louis XV qui s’installe à ses côtés, désireux de parcourir quelques lieues avec elle pour lui prodiguer ses derniers conseils. Le carrosse stoppe près de Sceaux. Le père et la fille descendent pour un ultime adieu. De retour à Versailles, plutôt que d’affronter le chagrin de Marie et de s’attendrir en lui contant la scène de la séparation, il embrasse Madame Henriette
qui devient « Madame » et s’enfuit cacher son chagrin à Rambouillet… en compagnie de Madame de Mailly !
Quand elle rejoint la cour d’Espagne après un long voyage triomphal, Madame Infante ignore encore que son époux de dix-neuf ans est un prince terne et médiocre. Le 31 décembre 1741, à quatorze ans, elle met au monde son premier enfant, l’infante Isabelle, faisant de Louis XV un jeune grand-père de trente et un ans et du roi Stanislas un heureux arrière-grand-père. Ambitieuse pour deux, la jeune femme rêve d’un royaume pour don Philippe ; elle y mettra toute son énergie et sa force de persuasion, n’hésitant pas à revenir à Versailles pour plaider sa cause auprès de son père.
Six princesses sans princes
Peu de temps après le départ de Madame Infante, de nouvelles rumeurs de mariage circulent à la cour concernant Anne Henriette
, la nouvelle Madame. Il est d’abord question du fils du roi de Sardaigne, puis de celui de l’électeur de Bavière. Sans oublier un troisième projet : unir Madame à son cousin le duc de Chartres, petit-fils du Régent. Les deux jeunes gens éprouvent une nette attirance l’un pour l’autre et Louis XV, comme Marie Leszczyńska, y semblent favorables. Mais le roi doit à nouveau s’incliner devant la raison d’État quand Fleury lui fait remarquer qu’un tel mariage renforcera excessivement la position des Orléans au détriment des Bourbon-Condé. Exit le duc de Chartres, malgré le chagrin causé à la pauvre Madame qui restera célibataire.
Mêmes échecs pour la fantasque Madame Adélaïde
qui s’amourache d’un jeune garde du roi au point de lui offrir une tabatière, présent de son père. Furieux, Louis XV exile le malheureux et tance sa fille. On pense alors à l’unir au séduisant Louis-François de Bourbon, prince de Conti, qui ne cache pas ses sentiments pour elle, au point de rester à son chevet lorsqu’elle contracte une forme bénigne de la petite vérole. Mais l’affaire en reste là… Il est aussi question de la marier au prince Xavier ou au prince Albert de Saxe, les deux fils du roi Auguste III de Pologne. Le roi Stanislas aurait probablement trouvé cocasse que sa petite-fille devienne reine de Pologne, mais Louis XV ne donnera pas suite au projet.
Les quatre autres princesses n’auront pas plus de chances. En marge de Thérèse Félicité, disparue à l’âge de huit ans, les trois autres, Victoire
, Sophie
et Louise, ne seront jamais demandées en mariage. L’absence de prétendants les condamnera toutes au célibat. Et Marie Leszczyńska en gardera toujours une pointe de regret.
1 -
Lieutenant général des armées, créé duc et pair le 8 février 1736, le comte de Châtillon (1690-1774) appartient à la maison de Montmorency-Luxembourg. Dévot, d’un esprit étroit et de moeurs sévères, il a une haute idée de ses devoirs de gouverneur.
2 -
Jean François Boyer (1675-1755) n’est pas issu de la noblesse. En 1730, Fleury fait nommer ce prédicateur réputé à l’évêché de Mirepoix. À la mort
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