Marie Leszczynska
Philippe V et d’Élisabeth
Farnèse et arrière-petit-fils de Louis XIV. Une manière de renouer les liens avec l’Espagne, tout en faisant oublier l’affront du renvoi de la petite infante Marie-Anne-Victoire et les désillusions occasionnées par le traité de Vienne. Et, pour sceller cette réconciliation, on murmure aussi que le dauphin pourrait épouser à son tour une infante.
Tenue à l’écart des pourparlers, Marie a versé quelques larmes en apprenant la nouvelle par le cardinal de Fleury. Madame Première n’est guère plus enthousiaste, d’après Luynes, en raison « de l’attachement qu’elle a pour tout ce qu’elle quittera et qu’elle doit aimer dans ce pays-ci ». Et lorsque Marie descend rendre visite à ses trois filles, Adélaïde
se précipite vers elle en maugréant : « Maman, je suis bien fâchée du mariage de ma soeur ! » Barbier écrit ce que toute la famille royale pense : « Il paraît étonnant que la fille aînée de France n’épouse pas une tête couronnée. » Faute de prétendants du même rang dans toute l’Europe catholique, elle doit épouser un prince qui n’a aucune chance de régner. Marie Leszczyńska ne peut cacher sa désillusion en songeant à l’avenir médiocre qui attend sa fille. Elle ne sait pas encore que cette pénurie de candidats condamnera ses autres filles au célibat !
Louise Élisabeth
n’est pas la plus jolie des filles du roi. Elle a les traits lourds mais les yeux de son père. Louis XV adore celle qu’il surnomme « Babet » et dont il apprécie l’intelligence et le caractère bien trempé. Le 15 mars 1739, « Babet » reçoit la confirmation avec Henriette
, sa soeur jumelle, dans la chapelle du château. Quinze jours plus tard, le cardinal de Fleury lui remet le portrait de don Philippe, apporté par l’ambassadeur d’Espagne. Mais le mariage de Madame ne doit avoir lieu, selon le souhait du roi, qu’une fois ses douze ans révolus ; ce qui repousse les cérémonies de six mois. L’union par procuration est fixée au 26 août. Louis XV, qui veut renouer avec l’éclat grandiose des fêtes de son illustre aïeul, contraint Fleury à desserrer les cordons de la bourse [8] . Durant plusieurs semaines, une armée d’ouvriers, de valets et de jardiniers va donc s’affairer pour transformer Versailles en palais des mille et une nuits.
Cérémonie grandiose
Le 25 août, le dauphin donne la main à Louise Élisabeth
pour pénétrer dans le salon de l’OEil-de-Boeuf. Au cours du cérémonial de la signature du contrat, la reine essuie discrètement ses larmes et Louis XV cache difficilement son émotion. Selon l’usage, la fiancée porte une robe or et noir, et une longue mante incrustée de fils d’or soutenue par sa soeur jumelle. À son poignet brille le portrait de don Philippe, serti de diamants. Le lendemain, pour le mariage, une foule de curieux venus de Versailles et de Paris campent dans le parc depuis l’aurore. Dans la chapelle parée comme une châsse, le dauphin conduit Madame Infante – tel est désormais son nom – jusqu’à l’autel où l’attend le duc d’Orléans. C’est lui qui représente l’infant, comme jadis il avait représenté le roi à Strasbourg pour le mariage de Marie Leszczyńska. Et c’est aussi le cardinal de Rohan qui bénit cette union franco-espagnole. Que de souvenirs pour Marie qui ne parvient pas à dissimuler ses larmes !
Dans l’après-midi, Madame Infante reçoit les compliments de toute la cour durant deux heures. À neuf heures du soir, Louis XV apparaît au balcon central pour donner le signal du feu d’artifice devant une foule bruyante et joyeuse. Au-delà du Parterre d’eau, sur un fond de palais éphémère rococo, les Slodtz [9] font jaillir des colonnades féeriques et des îles enchantées. Le lendemain soir, nouveau feu d’artifice en l’honneur de Madame Infante, mais cette fois quai Malaquais à Paris, devant les fenêtres de l’ambassadeur d’Espagne, Monsieur de La Mina
. La famille royale assiste au feu d’artifice agrémenté d’une fête nautique, depuis le balcon du Louvre qui surplombe le « Jardin de l’Infante » [10] . Le roi et la reine sont assis côte à côte dans des fauteuils, tandis que le dauphin et Mesdames utilisent des pliants. Les dames du palais de la reine occupent les extrémités du balcon. Ainsi, sur son pliant, Madame de Mailly
côtoie le dauphin, tout en étant proche de Louis XV… Vision
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