Marie Leszczynska
Leszczyńska. La comtesse est toujours bien informée, car elle est la maîtresse du contrôleur général des Finances, Machault d’Arnouville
.
Le cercle de la reine n’est pas un club impénétrable. Il s’ouvre souvent pour accueillir des relations amicales du groupe, ne serait-ce que pour glaner les nouvelles du royaume qui manquent tant à la souveraine. Mais, pendant la quinzaine d’années où il se réunira, il sera toujours animé par ce petit noyau d’amis intimes qui vont jusqu’à s’affubler de surnoms cocasses : « Papette » pour Madame de Villars, « la Poule » pour Madame de Luynes
, « Cadet » pour d’Argenson, « le Confident » pour Hénault
, ou encore « le Mouton » pour Tressan.
Dans ce petit groupe, deux femmes occupent une place privilégiée : les duchesses de Villars et de Luynes
qui appartiennent à la Maison de la reine. La première est une ancienne maîtresse du comte d’Argenson. Fille du maréchal de Noailles, liée dans sa jeunesse au milieu des lettres et du spectacle, Madame de Villars a fréquenté Voltaire, Tressan et le président Hénault
. Dame du palais, puis dame d’atour de la reine, elle a de l’esprit, une grande beauté et la réputation d’être une femme de vertu, ce qui lui vaut le surnom de « sainte duchesse ». « Grande dévote », selon le duc de Croÿ, sa conversion ne date pourtant que de la fin douloureuse d’une folle histoire d’amour avec le comte d’Argenson dont la duchesse ne s’est jamais vraiment remise. Depuis, elle tient un cercle chrétien, fréquenté notamment par l’écrivain Moncrif. C’est elle qui l’a d’ailleurs introduit auprès de la reine en lui obtenant la charge de lecteur.
Au début, le cercle d’amis se réunissait chez elle, après quelques tentatives dans les cabinets trop exigus de la reine. Puis le groupe s’est installé chez la duchesse de Luynes, où Marie a ses habitudes.
La reine veut oublier le protocole
La duchesse de Luynes est la confidente de tous les instants, l’amie fidèle, douce et généreuse, chez qui Marie se réfugie quand rien ne va plus. Dès qu’elles se séparent, elles échangent une correspondance régulière. Et quand la duchesse a contracté la petite vérole, la reine s’est enquise de sa santé plusieurs fois par jour. Lorsque la duchesse reparaît à la cour, le 17 janvier 1751, Marie insiste pour que son beau-frère, Monseigneur de Luynes, vienne partager leurs retrouvailles… bien qu’elle soit à sa toilette en robe de chambre, instant réservé aux grandes entrées ! C’est la preuve de la grande affection de Marie pour la famille de Luynes.
Le duc et la duchesse de Luynes
occupent à Versailles un appartement de six pièces au premier étage de l’aile du Midi, accessible par l’escalier des Princes. Le duc n’a aucune charge à remplir, mais il est aux premières loges pour rapporter les événements de Versailles à la reine. Toutefois, lorsque la cour prend ses quartiers d’été à Compiègne, puis à Fontainebleau, il se retire dans son château de Dampierre, où sa femme et la reine lui écrivent régulièrement. Et, chaque fois que la duchesse de Luynes
séjourne à Dampierre, la reine transporte son cercle chez la comtesse de Saint-Florentin.
La reine a pris l’habitude de passer ses soirées chez les Luynes [2] . La souveraine s’annonce généralement chez son amie de façon impromptue, un quart d’heure avant le souper, peu soucieuse des problèmes qu’elle suscite. En effet, les dames qui n’ont pas été présentées officiellement à la cour ne peuvent souper avec la reine sans la permission du roi. Et il arrive que la duchesse soit contrainte de demander aux dames invitées, mais non présentées, de se retirer. À l’exception, souligne Luynes, des nièces de son épouse : « Mesdames du Deffand et de Brienne, qui ne viennent jamais à la cour et qui n’ont point été présentées, ont eu l’honneur de manger quelquefois avec la reine, parce que Sa Majesté l’a voulu absolument. La reine sachant qu’elles étaient ici pour voir Madame de Luynes
et venant, si l’on ose le dire ainsi, familièrement dans cette maison, leur a accordé dans cette occasion une grâce qui ne tire point à conséquence. » Par sa parenté avec la duchesse de Luynes
et ses liens affectifs avec le président Hénault
, Madame du Deffand aurait pu être présentée à la cour et fréquenter le cercle de la reine ; mais
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