Marie Leszczynska
extrêmement vive et gaie. Avant-hier, elle dura près de trois quarts d’heure ; de sorte même que dans le salon tout le monde attendait avec impatience l’arrivée de la reine ; mais Madame Adélaïde
la retint tant qu’elle put. »
L’attitude du roi et de la reine à l’égard de leur progéniture s’éclaire par le récit édifiant de l’extraction d’une dent dont Madame Victoire
fut la victime. Le duc de Luynes raconte : « Madame Victoire
remettait de demi-heure en demi-heure, et enfin la journée se passa sans qu’on pût la déterminer. Le lendemain, même incertitude, mêmes délais. [...] Le roi ne pouvait se résoudre à donner ordre qu’on arrachât la dent ; il différait toujours, et Madame Victoire
lui faisait pendant ce temps-là mille amitiés. Elle proposa au roi de la lui arracher lui-même. On pourrait dire que c’était une espèce de scène tragi-comique. La reine avait été chez Madame Victoire
au sortir de la chapelle, et voyant que le roi ne pouvait se résoudre à prendre son ton d’autorité, elle lui représenta la nécessité indispensable de s’en servir ; et Madame Victoire
, voyant enfin qu’elle n’avait plus qu’un quart d’heure à se résoudre, après quoi on la tiendrait par force, se laissa enfin arracher sa dent, mais elle voulut que le roi la tînt d’un côté, la reine de l’autre, et que Madame Adélaïde
lui tînt les jambes. La reine ne tint pas longtemps la main, et ce fut Madame qui la remplaça. Et Madame Victoire
reconnut : “Le roi est bien bon, car je sens que si j’avais une fille aussi déraisonnable que je l’ai été, je ne l’aurais pas souffert avec tant de patience.” »
1 -
Lettre n o 589. Lettres et manuscrits autographes. Étude Piasa, vente à Drouot du 7 mars 2007. Écrite le 22 août 1745, cette lettre s’adresse au frère de la dauphine.
2 -
La Petite Madame, unique enfant de la dauphine Marie-Thérèse-Raphaëlle
, survivra à sa mère vingt et un mois, avant de mourir le 27 avril 1748. Le dauphin avait ordonné qu’on l’appelle Marie-Thérèse
.
3 -
Rocoux, situé près de Liège, en Belgique, s’appelle aujourd’hui Rocourt.
4 -
Louis XV a reçu des pressions de la cour d’Espagne ainsi que de sa fille aînée Madame Infante pour imposer l’infante Maria-Antonia, soeur de la défunte dauphine.
5 -
Évelyne Lever, Madame de Pompadour , pp. 103-104.
6 -
Catherine Opalinska est alors très malade et Louis XV sait qu’elle n’a jamais accepté la perte du trône de Pologne.
7 -
Pierre Boyé, Le roi Stanislas grand-père, p. 315.
8 -
Document n o 85, Catalogue de Lettres, Manuscrits et Autographes , Étude Piasa, vente à Drouot du 16 juin 2008.
9 -
Symbole d’une amitié royale, les grandes entrées ne sont accordées qu’à un petit nombre de personnes, hors les officiers de la chambre. Elles donnent le privilège d’assister au petit lever et au coucher du roi.
10 -
Oncle de Marie-Josèphe
, le maréchal de Saxe veille attentivement sur la dauphine. Il est fait maréchal général, comme Turenne, le 12 janvier 1747. Louis XV lui offre aussi le château de Chambord où il vivra jusqu’à sa mort, le 30 novembre 1750.
11 -
Il s’agit de la première dauphine, Marie-Thérèse-Raphaëlle
.
XIV
ENTRE AMIS, LOIN DE L’ÉTIQUETTE
P
our supporter le quotidien de la cour, il faut recourir à des « vies parallèles » à l’image de Louis XV… Ou prendre son mal en patience, car le déroulement des journées n’a rien de folichon, comme l’écrit le comte de Tessin
, ambassadeur de Suède, à son épouse : « À moins de me chatouiller moi-même pour rire, je ne puis rien vous mander de fort amusant d’ici. C’est toujours le même train : le matin en visites, puis au lever du roi, puis au grand dîner, puis le cavagnole qui dure jusqu’à ce qu’on s’endort. » Ou encore : « Que vous écrire ? chasse, table, jeu ; jeu, table, chasse ; table, chasse, jeu : voilà tout [1] . »
Même les sacro-saintes parties de cavagnole, véritable drogue de la souveraine, ne sont pas épargnées. Dans ses Mémoires , Kaunitz, ambassadeur d’Autriche, les juge pitoyables : « On y voit dix siècles rangés autour d’une table qui jouent, sinon avec toute la mauvaise foi, au moins avec toute l’avidité imaginable. Il y règne un silence morne, qui n’est interrompu que par les gémissements et les plaintes des perdants. » Il est vrai que
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