Marie Leszczynska
elle a préféré être reine dans son salon où se pressent toutes les gloires littéraires et scientifiques de l’époque. Ce qui ne l’empêche pas, en décembre 1748, d’écrire un portrait de la souveraine qu’elle offre à Marie, par l’intermédiaire de sa tante [3] .
À l’inverse de Louis XV qui rappelle toujours à ses convives que le roi est là, lors des soupers dans ses petits appartements, Marie Leszczyńska souhaite oublier sa couronne en passant le seuil de l’appartement des Luynes : « Elle a la bonté de nous dire souvent que dans ce moment elle n’est point reine. » C’est effectivement la duchesse qui reçoit… Et pourtant, l’étiquette n’est pas totalement bannie puisque le duc de Croÿ a vu la reine et les dames assises à table, tandis que les hommes font leur cour debout ; un souper leur est d’ailleurs servi dans une pièce voisine.
Ses informateurs et conseillers personnels
Parmi les hommes qui comptent dans la vie amicale de Marie Leszczyńska, le comte d’Argenson est le personnage le plus important du groupe depuis la disgrâce de Maurepas, renvoyé le 24 avril 1749 pour avoir écrit quelques impertinences sur Madame de Pompadour. Il connaît la reine depuis 1723, année de son voyage à Bade pour préparer le mariage du duc d’Orléans. Au retour, il s’était arrêté à Wissembourg, chez le roi Stanislas. La petite Polonaise avait alors tout juste vingt ans. Secrétaire d’État à la Guerre de 1743 à 1757, le comte, passionné de physique et de géométrie, est membre de l’Académie des sciences depuis 1726. C’est un ami très proche de Marie qui ne se soucie jamais de diplomatie avec lui. Elle l’appelle « Cadet » et lui confie des secrets intimes : « À propos, j’ai quarante-deux ans ; cela est imposant… » C’est à lui qu’elle avoua aimer le roi à la folie, après la victoire deFontenoy. Ils s’écrivent presque quotidiennement et se griffonnent souvent des billets.
En dépit de cette profonde amitié, d’Argenson se garde de toute familiarité. À plusieurs reprises, la reine l’a gentiment tancé : « Retranchez dans votre lettre, je vous prie, Madame et Majesté. » Mais d’Argenson continue de rédiger ses missives avec le respect qu’il doit à la reine. Pendant la maladie du roi à Metz, en août 1744, il l’a régulièrement informée et l’a beaucoup aidée.
Ami du comte d’Argenson et confident de la duchesse de Villars, Charles-Jean-François Hénault
, dit « le Président » parce qu’il occupe une charge de président au Parlement, a fréquenté le salon de Madame de Tencin
avant de lui préférer celui de Madame du Deffand, dont il devint l’amant. En 1763, apitoyé par le sort de son ancienne égérie, il sollicitera en sa faveur une pension de deux mille écus auprès de la reine [4] . Ami des philosophes, opposé à d’Alembert mais proche de Fontenelle
, il appartient à l’Académie française depuis 1723, où il a succédé au cardinal Dubois. Mondain, causeur, poète, cet épicurien, dont la table est l’une des meilleures de Paris, est devenu célèbre en 1744 avec la publication de son très sérieux Abrégé chronologique de l’Histoire de France . La reine apprécie ses conseils, son jugement, son rire franc et ses propos spirituels. À chaque voyage de la cour, à chaque cure du président à Plombières, ils entretiennent une correspondance familière. Marie prend des nouvelles de sa santé, lui conseille une nouvelle médecine : « Donnez un peu plus de repos à votre esprit et de mouvements à votre corps, vous travaillez trop et vous ne vous promenez pas assez. [...] C’est un conseil de quelqu’un qui vous aime. » En sa qualité de surintendant de la Maison de la reine, Hénault
administre avec sérieux et efficacité le budget de Marie.
Un lecteur sans lecture et quelques ecclésiastiques
Poète, musicien et acteur, François-Augustin Paradis de Moncrif est le fils d’un procureur et d’une Anglaise de la famille des Moncrif, dont il a adopté le nom. Émule de Fontenelle
, d’une humeur toujours enjouée, il est protégé par le duc d’Orléans, les comtes de Clermont et d’Argenson dont il sera le secrétaire. Censeur royal et lecteur de la reine, sa charge fort enviée ne l’absorbe guère car c’est l’un des rares lecteurs qui ne lit pas, Marie préférant le faire elle-même. Il profite donc de ses loisirs forcés pour écrire des pièces destinées
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