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Marie

Marie

Titel: Marie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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Dieu
Tout-Puissant le permettait, elle le délivrerait.
    Assis
derrière elle sur la lisse du bateau, Barabbas perçut son appréhension. Il posa
la main sur son épaule.
    — Il
n’y a plus longtemps à attendre, dit-il lorsqu’elle leva la tête vers lui.
Encore un peu de patience.
    Son visage
était tiré par la fatigue, mais sa voix demeurait gentiment malicieuse.
    Miryem
aurait voulu lui sourire, à son tour lui effleurer la main pour dire son amitié
et sa confiance. Mais elle en était incapable. Ses muscles étaient si tendus
qu’elle peinait à s’empêcher de trembler. Sa gorge nouée l’autorisait à peine à
respirer. La nuit précédente, brisée d’angoisse et de fatigue, elle avait à
peine dormi. Barabbas, lui, ne s’accordant que des moments épars de sommeil,
n’avait guère pris de repos.
    En vérité,
Miryem avait été sidérée par son habileté et son efficacité.
    *
    * *
    Après leur
départ de Sepphoris, marchant toute la nuit et ne s’arrêtant que pour laisser
reposer les ânes et les mules, la bande de Barabbas s’était retrouvée au petit
matin dans les collines surplombant les rives du lac de Génézareth. Tarichée
était à leurs pieds. La forteresse, avec ses murailles de pierres taillées, ses
tours et ses remparts crénelés, apparut plus imprenable que jamais.
    Malgré la
distance, Miryem repéra immédiatement le champ terrible des supplices. À la
droite de la forteresse, il s’étendait sur la rive du lac sur près d’un quart
de lieue. De loin, on devinait les centaines de gibets, comme si, en cet
endroit, avait poussé une herbe monstrueuse.
    Tout
autour, aucune culture. Les vergers et les jardins entouraient uniquement les
murs blancs de la ville et l’entrelacs des ruelles prudemment serrées de l’autre
côté de la forteresse. Vu de haut, le champ des suppliciés dessinait une longue
bande brune bordée d’une palissade menaçante, monstrueusement hachurée de noir
et souillant la splendeur naturelle des berges.
    Miryem se
mordit les lèvres. Elle aurait voulu se précipiter, s’assurer que Joachim
n’était pas déjà parmi les formes noires que l’on percevait aux extrémités des
croix irrégulières, même si ne pas l’y voir n’eût été d’aucun réconfort.
Peut-être l’avait-on déjà assassiné dans la forteresse ?
    Sans perdre
de temps, Barabbas ordonna sa troupe. Ils devaient demeurer à l’abri de la
forêt tandis que lui-même, Abdias et des compagnons de confiance iraient en
reconnaissance dans Tarichée.
    Ils en
revinrent la mine sombre. Abdias s’approcha aussitôt de Miryem. Du menton, il
désigna le champ des supplices.
    — Ton
père n’y est pas. Je suis sûr qu’il y est pas.
    Miryem
ferma les yeux, respirant profondément pour calmer les battements de son cœur.
Abdias se laissa choir sur le sol. Ses joues creuses et sales semblaient plus
tendues, ses traits plus anormalement vieillis que jamais. Dans leur dos, les
autres s’étaient approchés pour l’entendre.
    — Je
suis allé tout près, comme m’a demandé Barabbas. C’est plein de gardes, mais
ils se méfient pas trop des gosses. La palissade de pieux qui entoure le champ
des croix est cloutée sur le haut. Celui qui veut la passer, il se retrouve en
charpie. Il y a deux endroits où on peut voir à l’intérieur. Et ce qu’on voit,
c’est pas drôle, je peux vous dire.
    Abdias
marqua un temps d’arrêt, comme si ces horreurs s’étalaient encore sous son
regard.
    — Des
dizaines et des dizaines. On peut pas les compter. Il y en a qui sont là depuis
tant de temps que c’est plus que des os dans des bouts de tissu. D’autres, ça
fait pas assez longtemps pour qu’ils soient morts. On les entend marmonner.
Parfois, il y en a qui crient d’une drôle de voix. Comme s’ils étaient déjà
avec les anges.
    Un long
frisson, irrépressible, secoua les épaules de Miryem.
    — S’ils
sont si nombreux, demanda-t-elle d’une voix enrouée, à peine audible, comment
sais-tu que mon père n’y est pas ?
    La ruse
revint dans les yeux d’Abdias. Il eut presque un sourire.
    — J’ai
causé avec un vieux mercenaire. Les vieux comme ça, quand ils voient un gosse
comme moi, ils deviennent plus mou qu’une épouse de rabbin. Je lui ai raconté
que mon grand frère allait être mis sur la croix. Il a commencé par ricaner que
ça l’étonnait pas et que j’allais sûrement aller lui tenir compagnie. J’ai fait
semblant de pleurer. Alors, il m’a dit

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