Marilyn, le dernier secret
compagnie à son épouse.
En mai 1962, une nouvelle clause contractuelle rendit Taylor plus riche. Le calendrier de tournage ayant été dépassé, se mit en action la disposition lui accordant 10 000 dollars supplémentaires… par jour. Sans ce bonus, elle refusait de travailler.
Toute cette débauche de dépenses était d'autant plus incongrue, voire ahurissante, que la santé du studio n'était pas florissante. « Elizabeth Taylor connaissait parfaitement les difficultés financières de la 20th Century Fox [3] , affirme du reste Brad Geagley, historien du cinéma qui a passé cinq ans à enquêter sur les conditions de tournage de Cléopâtre . Ce travail, par lequel il a eu accès à une partie des archives du studio américain, lui a permis de découvrir comment des dizaines de millions de dollars ont été gaspillées. Ainsi que de voir comment sa rivalité avec Marilyn Monroe excitait les désirs d'Elizabeth Taylor. « Dès que le tournage du nouveau film de Marilyn débuta, écrit-il, Elizabeth Taylor commença à douter de la faculté de la Fox à la payer. Elle insistait alors pour recevoir ses dix mille dollars en début de journée ou cinquante mille dollars en début de semaine. Et c'est uniquement après avoir vérifié que la somme se trouvait bien sur son compte bancaire qu'elle acceptait de se rendre sur le plateau de tournage [4] . »
*
S'il ne fallait pourtant retenir qu'un chiffre de l'avalanche de billets verts déversée dans ce gouffre égyptien, ce serait… le prochain. Celui consacré à l'enveloppe des « faux frais » que Taylor toucha pendant le tournage de Cléopâtre . Un montant dont on se demande encore à quoi il correspondait, puisque son train de vie luxueux était déjà entièrement à la charge de la 20th Century Fox.
Quoi qu'il en soit, cette somme est capitale parce qu'elle renvoie directement à Marilyn. Elizabeth Taylor recevait 228 000 dollars, en plus de son contrat de millionnaire, pour « compenser ses frais » !
228 000 dollars… Soit le double du salaire que la Fox venait d'offrir à Monroe pour tourner un nouveau film en ce début 1962.
Pas de doute, la blague traînant dans les coulisses d'Hollywood était cruelle. Car elle reflétait tragiquement la réalité : la fausse blonde à la poitrine généreuse était désormais une star au rabais.
1 -
Soit sept fois plus, si on le compare au taux courant.
2 -
In Marilyn, The Last Take , Peter Harry Brown et Patte B. Barham, Dutton, 1992.
3 -
In Marilyn, The Last Take , op cit .
4 -
Ibid.
19. Enfer
Le tournage de Something's Got to Give débuta le 23 avril 1962. Et, pour les tenants du suicide, il conduit inexorablement, par les péripéties qui l'ont émaillé, à la tragédie de la nuit du 4 août. Car, dans le casting et l'équipe cohabitaient de multiples personnes dont les relations étaient sources de conflits.
*
À commencer par l'homme se tenant derrière la caméra, George Cukor.
Marilyn et lui avaient déjà travaillé ensemble sur Let's Make Love . Or le réalisateur, excédé par les retards de la star et la présence étouffante de son coach artistique, Paula Strasberg [1] , s'était juré de ne plus s'y laisser prendre. Mais voilà, son nom figurait sur la liste des dix metteurs en scène que Marilyn avait communiquée à la Fox. Pour être exact, Monroe ne souhaitait plus tourner sous la direction de cet homme dont elle n'appréciait ni la misogynie ni les accès de colère, mais son agent et son avocat avaient oublié de remettre à jour le document soumis avant la douloureuse aventure de Let's Make Love !
*
À la tête de la 20th Century Fox, on n'ignorait pas leur antagonisme. Mais, englué dans une situation financière de plus en plus critique à cause de la prolongation du tournage de Cléopâtre , le studio avait opté pour la facilité. Marilyn Monroe, contrainte par un contrat signé en 1956, devait assurer un rôle minablement rémunéré. Et, côté réalisation, Cukor aussi, se trouvait dans la même situation.
Deux stars à prix sacrifié, un film dont l'action n'exigeait ni coûteux décors ni plans en extérieur, pour un studio en crise, Something's Got to Give résonnait comme une aubaine. Certes. Mais George Cukor vit les choses autrement : la Fox pouvait bien l'obliger à réaliser un navet avec une actrice qu'il détestait, mais personne ne parviendrait à lui interdire de transformer l'épreuve en enfer !
1 -
L'épouse de Lee, le
Weitere Kostenlose Bücher