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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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de la Bayonnaise et s’enquit de Jantet.  
    — Il est mort en héros ! lui répondit un gros calfat congestionné en brandissant une cruche. Buvons à ses cendres glorieuses !  
    — Il est mort ?  
    Frappé de stupeur, Hazembat regardait le vin dégouliner sur le menton râpeux du matelot.  
    — Il est mort comment ? quand ?  
    L’autre s’arrêta de boire et s’essuya les lèvres avec la manche.  
    — Pendant l’assaut de la frégate. Un boulet lui a arraché le bras.  
    Un homme que son âge et son autorité désignaient comme un premier maître intervint.  
    — Mais non ! Jantet n’est que blessé. Tu veux parler du second maître Rapin ?  
    — Oui, Jean Rapin, de Langon.  
    — Il a reçu un éclat de bois qui lui a fracassé le coude droit. Pour la charpente, il est foutu, mais pour le reste, il devrait être gaillard d’ici peu.  
    — Où est-il ?  
    — Je ne sais pas mais, quand on l’a fait monter dans la charrette qui transportait les blessés à l’hôpital, le chirurgien a dit que la blessure était saine. Je suppose qu’on va le renvoyer chez lui pour un bout de temps. Tu le connais ?  
    — C’est un ami d’enfance, presque un frère. Nos pères ont fait la guerre d’Amérique ensemble sur l ’Argonaute et ensuite ils naviguaient sur les couraus de la Garonne…  
    — Attends un peu… Tu ne serais pas Hazembat ?  
    — Oui, c’est moi.  
    — Jantet m’a souvent parlé de toi. Il t’aime bien.  
    — Il savait que j’étais sur le Mathurin-Mary ?  
    —  Oui, il me l’a dit quand nous vous avons croisés en mer l’été dernier.  
    — Je me souviens, mais comment l’a-t-il su ?  
    — Nous avions fait escale à Bordeaux la semaine avant et il avait reçu une lettre de Langon… Même il m’a dit que c’était d’une jolie fille. Il m’a aussi dit son nom, mais je ne me souviens plus…  
    — Marie Dubernet ?  
    — Euh… oui, c’est bien ça !  
    Plantant là le premier maître et Verdier, Hazembat tourna les talons et s’en fut à bord ruminer son amertume au fond de son hamac.  
    Quinze jours plus tard, le Mathurin-Mary retourna à Bordeaux et mouilla devant Bacalan. De propos délibéré, Hazembat évita de regarder vers l’amont et profita de la permission de descendre à terre pour aller, en compagnie de Verdier, dépenser avec les filles les derniers sous qui lui restaient.  
    Comme il rentrait à bord, légèrement ivre, mais toujours maussade, Cousseau le héla :  
    — Hé, Hazembat ! Amèn’toué donc un peu par ici que j’voué un mat’lot qu’a un courrier pis qu’un hand’putain d’notaire ! Deux let’s qu’il porté pour toué, l ’ vag’mest ’  !  
    Saisissant vivement les deux plis de papier bleu, Hazembat reconnut immédiatement les hauts déliés et les fioritures que Cametorte avait appris de feu son oncle Touton Tignous, l’ancien caporal fourrier de la garde nationale. Il décacheta les deux lettres afin de regarder les dates. L’une était du 1 er Thermidor, l’autre du 20 Nivôse, toutes deux étaient signées Marie Dubernet cadete.  
    Il compta sur ses doigts. Pouriquète lui avait donc écrit avant d’écrire à Jantet ou du moins en même temps et elle lui avait écrit de nouveau ensuite : la deuxième lettre datait d’à peine une semaine. Le ciel lourd, triste et froid qui pesait sur le port de Bordeaux lui parut soudain s’éclairer d’une tendre lumière. Chassant avec le jusant, le lougre faisait face à l’amont. Hazembat alla s’appuyer au bossoir tribord et laissa ses pensées franchir les douze lieues qui le séparaient de Langon, avant de lire ses lettres. La première répondait à la sienne, envoyée dix mois plus tôt.  
    Matelot Bernard Hazembat 1 er Thermidor de l’An 7 a bord du Maturin-Marie en mer de la République  
    Mon glorieux Marin aymé, J’ay eu grande joie a recevoir ta letre qui a mis grand tems a me parvenue et je ne savez pas a qui demander pour la lire et aussi te repondre. Enfin Cametorte a eu la Bonté et je le remercy. Il est en bonne santé ainsi que moi-même et thous a Langon. J’ecry aussi a Jantet de qui nous n’avons pas de nouveles. Peutetre tu le rencontrera dans les Combats. Je frémis a la pensée des Périls que tu endure. Je ne t’oubly pas et pense thoujour a toi tendrement.  
    Ton Amie eternelement fidèle Marie Dubernet cadete  
    De la deuxième lettre, Hazembat ne retint qu’une phrase :

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