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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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molles !  
    Le jour vint enfin où deux soldats vinrent chercher Hazembat pour le conduire sur l’ Argonaute à bord duquel devait se tenir la cour martiale. Il mit un point d’honneur à se tirer à quatre épingles avec l’aide de Lambert. Cela lui valut un certain nombre de remarques ironiquement admiratives quand il monta à bord, mais les camarades avaient l’air contents de le revoir et cela lui fit chaud au cœur.  
    Du coin de la dunette où on le fit attendre, il découvrait la rade de Brest, avec toute l’escadre au mouillage, voiles ferlées et pavillons battant au vent. Des chaloupes se détachaient de certains des vaisseaux et faisaient route vers l’ Argonaute. C’étaient sans doute les capitaines qui devaient faire partie de la cour. Il vit Guillotin sortir de sa cabine et se rendre dans la chambre des cartes devant laquelle deux soldats montaient la garde, baïonnette au canon. Violet l’y rejoignit au bout d’un moment, puis Demaison, l’air absent, alla s’enfermer avec eux. Survinrent alors trois hommes. L’un était Guirrec, un autre Bottereaux, amaigri et portant un pilon de bois à la place du pied droit. Le troisième était un officier inconnu, au visage ouvert et agréable, portant une courte barbe châtain clair.  
    Ils se dirigèrent vers Hazembat et, sans mot dire, Guirrec lui donna l’accolade. Bottereaux, un sourire sur les lèvres, fit de même.  
    — Alors, matelot, te voilà recousu ! Viens, que je te présente à l’ancien commandant du Mathurin-Mary, le lieutenant Leblond-Plassan. Nous l’avons embarqué à Lorient comme troisième officier. C’est presque un pays à toi : il est de Bordeaux et, comme toi, il a fait ses débuts au commerce bien avant la Révolution !  
    La poignée de main de Leblond-Plassan était franche.  
    — J’ai entendu parler de toi, Hazembat, dit-il. Bottereaux m’a dit que tu étais un excellent timonier, mais je connaissais déjà tes talents par le patron Roumégous.  
    — Vous l’avez connu, lieutenant ?  
    — Il était maître sur le Vainqueur où j’ai embarqué en 1784 comme pilotin, à destination de la Guadeloupe. Je l’ai revu à Bordeaux en 1792 et il m’a raconté votre expédition de Montauban.  
    — Vous êtes allé à la Guadeloupe, lieutenant ?  
    — Plusieurs fois. C’est là que le général Desfourneaux m’a nommé lieutenant de vaisseau en Prairial dernier. Et, là-bas aussi, j’ai entendu parler de toi par un vieil aubergiste du port de Pointe-à-Pitre.  
    — Papa Lafortune ? Il est encore en vie ?  
    — Conservé dans le rhum, il tiendra encore longtemps !  
    Papa Lafortune, c’était le père de Belle. Hazembat allait s’enhardir à demander des nouvelles de sa fille quand un déchaînement de sifflets à la coupée annonça l’arrivée du premier des membres de la cour.  
    C’était un capitaine de frégate aux airs de paysan mal dégrossi. Il répondit brièvement aux saluts, puis disparut dans la grande cabine arrière.  
    — C’est Duranteau, commandant de la Constitution, dit Leblond-Plassan. Il est de Listrac, dans le Médoc. Son père est un ami du mien : ils sont tous deux avocats à la Cour de Bordeaux.  
    Quand tous les capitaines furent arrivés, Bottereaux alla rejoindre les officiers de l’ Argonaute dans la chambre des cartes. Leblond-Plassan le regarda s’éloigner, claudiquant à peine.  
    — Un bon officier, dit-il. Je suis content qu’il ait servi sur mon vieux Mathurin. C’était une bonne coque de noix. J’espère que tu n’en as pas gardé un trop mauvais souvenir, Hazembat ?  
    La cloche piqua le quart de huit heures. Aussitôt, le visage de Leblond-Plassan se ferma, son maintien se raidit. Hazembat et Guirrec portèrent leur poing à leur front et l’officier leur répondit par un salut sec avant de s’éloigner à pas lents pour aller relever l’officier de quart.  
    Guirrec fut appelé en fin de matinée et Hazembat immédiatement après lui. Très intimidé par la rangée de personnages chamarrés qui se tenaient serrés derrière la table de la grande cabine, il se dandinait gauchement, faisant tourner son chapeau entre ses doigts. Le président de la cour, qu’on lui avait dit être le capitaine de vaisseau Lucas, commandant le Redoutable, ne fit rien pour le mettre à l’aise en le regardant droit dans les yeux et en lui demandant d’une voix tonnante :  
    — Citoyen matelot, quand tu as reçu l’ordre de

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