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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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n’ai jamais eu beaucoup de temps pour faire de la politique : je naviguais déjà bien avant la Révolution, mais j’ai toujours eu l’habitude de juger les gens sur leurs actes et non sur leurs paroles. Toi, je te fais confiance, parce que je sais ce que tu vaux. Bonaparte, pas encore.  
    — Il remporte des victoires.  
    — Des victoires, oui, mais j’attends la victoire, celle qui ramènera la paix.  
    Leblond-Plassan parti, Hazembat se sentit très seul à bord de l’ Argonaute. L’épuration se faisait plus dure encore. En Frimaire, un second maître fut pendu pour avoir, disait-on, conspiré contre la vie de l’amiral.  
    Les premiers mois de l’An   IX s’écoulèrent dans un climat maussade. Reprise en main politiquement, la marine ne croyait plus à son destin. Pourtant les équipages étaient mieux entraînés, mieux nourris, mieux équipés et tout le monde s’accordait à dire que les vaisseaux français étaient meilleurs que les anglais. Mais la gloire était ailleurs, sur les champs de bataille du continent.  
    Vint le deuxième hiver en rade. Il fut plus rude. Dès Nivôse, les glaces encombraient déjà les parties les plus reculées du port. Renfrogné, Hazembat ne parlait plus à personne, se défiant surtout de Dutertre. Un lieutenant de Toulon avait remplacé Leblond-Plassan. C’était un ancien de l’expédition d’Egypte, du nom de Chaussade.  
    Un jour qu’il inspectait la timonerie, il s’arrêta devant Hazembat.  
    — Tu es de Langon, je crois ?  
    — Oui, lieutenant.  
    — Sur le Muiron, il y avait un aspirant de Langon. Il s’appelait Castaing. Tu le connais ?  
    — Oui, lieutenant. C’est Louis Castaing. On le surnommait Castagnot.  
    — Il y a aussi le commandant de la frégate la Minerve qui est du côté de chez toi. Il s’appelle Pellébridoire. Ça te dit quelque chose ?  
    — J’ai navigué au commerce avec un lieutenant Pellé de Bridoire qui était de La Réole. Il a pris du service dans la marine en 94 .  
    —  Oui, encore un ci-devant qui a républicanisé son nom ! La marine en est pleine. Mais toi, tu n’es pas un ci-devant et tu es dévoué au Premier Consul, hein ?  
    — Oui, lieutenant, je suis dévoué à la République. L’autre le considéra longuement, puis hocha la tête et s’en fut.  
    A la fin de Nivôse, les exercices s’intensifièrent et Ganteaume en personne vint les surveiller. Le 28, les sifflets et les tambours rassemblèrent les hommes à l’arrière. Guillotin parut à la rambarde, flanqué de Violet et de Chaussade.  
    — Matelots ! cria-t-il dans son porte-voix. Un grand honneur vient d’être fait à l’ Argonaute. Les sept plus fins voiliers de la flotte ont été choisis pour partir en escadre. Notre navire est l’un d’entre eux. Vous saurez vous montrer dignes de l’honneur qui vous est fait, sans quoi le chat à neuf queues ne vous laissera pas un pouce de peau sur les côtes ! Nous appareillerons ce soir sous les ordres de l’amiral Ganteaume. Vive le Premier Consul ! Vive la République !  
    A l’aube, l’escadre, formée en colonne, cinglait ouest-sud-ouest au large d’Ouessant. C’était la première fois qu’Hazembat naviguait en escadre et il était frappé par l’impression de puissance que donnaient les deux vaisseaux de premier rang et les quatre vaisseaux de second rang qui formaient sur la mer calme une file longue de plus de trois milles. Contrairement à Bruix, Ganteaume n’avait pas voulu s’encombrer de navires auxiliaires. Seule une frégate couvrait le flanc nord de l’escadre.  
    — Le vent est bon pour les Antilles, dit Dutertre. Hazembat était trop habitué aux feintes et aux manœuvres de la stratégie de haute mer pour tirer des conclusions hâtives.  
    Le septième jour, la vigie signala des voiles par tribord. C’était certainement l’escadre anglaise. Pendant toute la journée, elle suivit une route parallèle à celle des vaisseaux de Ganteaume.  
    Un peu avant la tombée de la nuit, une volée de pavillons se déploya à la corne d’artimon du vaisseau amiral. Le signal fut repris successivement par tous les navires. La cloche piquait quatre quand un ordre retentit sur la dunette :  
    — A changer les voiles par grand largue, bâbord amures ! La barre au vent, toute ! Cap est-sud-est !  
    — C’est Gibraltar, dit Hazembat en s’arc-boutant à la grande roue. Il fallait s’y attendre.  
    Quasiment vent arrière,

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