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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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araignée.  
    — Ce sont des chasseurs d’isards, dit Navarrot. Ils vont prendre ceux d’en haut à revers. Nous nous occupons des autres. A l’abordage !  
    Le combat fut bref. Les Basques bien nourris et bien entraînés étaient des adversaires redoutables pour les brigands efflanqués, probablement des paysans misérables habitués à lever leur rançon sur des pèlerins pacifiques et désarmés. Bernard fit de son mieux avec son bâton de cornouiller en assommant deux des assaillants.  
    Navarrot était aux prises avec un grand gaillard barbu qui avait le dessous, mais se battait avec vaillance. Avant de prendre la fuite, le bandit réussit à placer un coup de plat de sabre sur la tempe de son adversaire qui chancela. C’est alors que Bernard vit un jeune garçon qui pointait un pistolet à bout portant sur le dos de Navarrot. En deux bonds, il fut à portée et, sur l’élan, balança à pleine volée son bâton sur la nuque du bandit qui s’écroula en avant.  
    Le pistolet échappé de sa main heurta violemment une pierre et le coup partit. Bernard tomba en arrière avec l’impression que quelqu’un l’avait frappé à l’épaule gauche. Il se releva aussitôt.  
    C’était la fin du combat. Don Gorka s’approcha du bandit que Bernard avait abattu et l’examina.  
    —  Requiem aeternam dona ei Domine, amen. Il a le cou brisé. Tu as une poigne digne d’un Basque, mon garçon !  
    Encore chancelant, Navarrot arrivait.  
    — Bernard ! tu es touché !  
    — Moi ? non…  
    Instinctivement, il porta la main à l’épaule et la retira toute sanglante. Puis le visage inquiet de Navarrot devint flou et il se sentit défaillir.  
    Un long hennissement aigu se répercutant de paroi en paroi le rappela à la réalité. Il était étendu sur le dos.  
    — C’est l’ irrintzina, le cri de guerre des Basques, lui dit Don Gorka, penché sur lui. Ça veut dire que nous avons gagné. Je te fais mal ?  
    Il prit soudain conscience de la violente douleur qui engourdissait son épaule.  
    — Je ne sais pas si c’est vous, mais ça me fait mal !  
    — Tu as de la chance : la balle est ressortie. Un quart de pouce en dessous, elle te brisait la clavicule. Heureusement que tu as du muscle à revendre. Il faudrait que je te fasse un pansement pour arrêter le sang.  
    Bernard songea à la gourde que lui avait donnée Mama Carla. Détachée du bâton pendant le combat, elle gisait intacte à quelques pas. Don Gorka flaira, goûta.  
    — Si je ne me trompe, il y a de l’arnica, de l’achillée, de la cochléaria, de la réglisse et quelques autres plantes. Ces Gallegos ne sont pas bêtes. Je vais te faire un pansement avec ça et tu en boiras un peu. L’achillée devrait arrêter le sang.  
    Bernard eut l’impression que la douleur sourde de son épaule se calmait un peu et il s’endormit, bercé par les coups de pelle de ses compagnons qui enterraient le brigand mort.  
    Il s’éveilla un peu fiévreux, mais capable de marcher. Don Gorka fit ralentir le train. Par petites étapes, les pèlerins reprirent le chemin de la montagne, évitant Santander. Chaque soir, Don Gorka changeait le pansement de Bernard. Sourde et diffuse, la douleur était plus supportable, mais plus sournoise, gagnant peu à peu toute l’épaule et le haut du bras. La nuit, il était plusieurs fois réveillé en sueur d’un sommeil agité par le sang qui martelait sa gorge.  
    — C’est le pus qui ramasse, disait Don Gorka. Quand on pourra crever l’abcès, la fièvre tombera.  
    Le matin du cinquième jour, il était si mal en point qu’on lui fit une civière avec des branches. Les pèlerins se relayaient pour le porter, mais Navarrot, les yeux inquiets, était toujours là pour prendre le tour d’un autre.  
    L’abcès creva de lui-même le 5 mai, alors qu’ils arrivaient en vue de la mer à Laredo. Bernard conserva toute la vie le souvenir du soulagement immédiat qu’il ressentit, avec la brise de mer qui caressait sa peau et emplissait ses poumons d’odeurs salines. Devant ses yeux éblouis, l’Océan vert s’étendait, accueillant et pacifique, au-delà d’un immense banc de sable en lame de faux.  
    Don Gorka arriva, brandissant un crin.  
    — Je l’ai emprunté à un cheval. Nous allons le mettre dans ta plaie pour qu’elle ne se referme pas avant de s’être bien vidée.  
    Bernard avait plusieurs fois vu soigner ainsi les blessés ou les amputés dont les

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