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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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plaies s’envenimaient. Il savait qu’il fallait garder le crin parfois pendant deux ou trois semaines en espérant que, les chairs une fois assainies, il céderait facilement sous une traction légère, entraînant avec lui les dernières humeurs.  
    Le lendemain et le surlendemain, ils suivirent le chemin côtier. Enfin, vers midi, sous un ciel pommelé de petits nuages blancs, ils franchirent une dernière colline et découvrirent devant eux un profond estuaire parsemé d’embarcations.  
    —  Eskual herria ! s’écria Don Gorka. C’est la ria de Bilbao ! Nous sommes de retour au Pays basque.  
    Il tomba à genoux et entonna un cantique en basque. Les autres l’imitèrent. De sa civière, Bernard joignit sa voix au chœur, essayant de suivre les syllabes rocailleuses.  
    Ils traversèrent la ria sur un bac et passèrent la nuit au couvent de Deusto. Un jeune médecin moustachu vint examiner la blessure de Bernard. Il approuva les soins de Don Gorka et pratiqua une saignée.  
    — L’empoisonnement du sang n’était pas loin, dit-il. S’il doit reprendre la route, je pense qu’il devrait se reposer quelque temps.  
    Bernard voulut protester, mais Don Gorka lui coupa la parole.  
    — L’air de mon ermitage est bon. Tu y resteras le temps qu’il faudra pour que ta bonne amie ne s’évanouisse pas en te voyant cette tête d’épouvantail.  
    Précédés par un cavalier envoyé en estafette, les pèlerins furent accueillis au col de Sollube par un cortège monté de Bermeo, bannière en tête.  
    Bernard passa la nuit dans le coin d’une salle d’auberge pleine de cris, de jurons et de tintements de pichets. Don Gorka lui apporta un gobelet de vin rouge.  
    — C’est du txakoli gorri de Bakio, lui dit-il. C’est le meilleur des remèdes.  
    Le vin était frais, pétillant et légèrement acide. La saveur rappelait celle du vin de Galice que lui avait fait boire Manœl. Apaisé, Bernard dormit profondément malgré le tintamarre des Bermeanos en fête.  
    A l’aube, Navarrot vint prendre congé. Il continuait sa route vers Fontarabie.  
    — Je viendrai te chercher le mois prochain pour te ramener en France. En attendant, je vais tâcher de faire passer la nouvelle de ton retour jusque chez toi.  
    A califourchon sur des ânes, Don Gorka et Bernard suivirent le chemin vertigineux qui, tout en haut des falaises de Machichaco, menait à l’ermitage de San Pelayo d’où, chaque matin, Don Gorka descendait pour aller dire la messe dans l’église des marins sur le rocher de San Juan de Gastelugache.  
    — San Pelayo est la plus vieille chapelle de Biscaye, dit-il fièrement. D’ici, par temps clair, tu peux voir de Santander jusqu’à Hendaye.  
    Le crin tomba au bout de la première semaine et la cicatrisation s’accéléra. Jour après jour, sur les pacages balayés par le vent, les embellies alternaient avec les orages de printemps. Chaque fois, la mer changeait de visage, tantôt explosant contre les hautes parois rocheuses en de grands jaillissements d’écume, tantôt souriant de mille rides qui déchaînaient comme par jeu de minuscules tempêtes au creux des récifs.  
    Bientôt, Bernard se sentit assez fort pour accompagner Don Gorka jusqu’à l’église. La descente le long du sentier de chèvres était vertigineuse et, ne pouvant encore se servir de son bras gauche pour prendre appui sur la roche, il avait du mal à garder son équilibre. La petite nef était encombrée d’ex-voto en remerciement de sauvetages miraculeux obtenus par l’intercession de la Vierge de Begona, de saint Ignace de Loyola ou de saint Jacques de Compostelle. Une vingtaine de femmes en noir, pieds nus, cheveux au vent et regard hardi, assistaient à l’office.  
    Après la messe, Don Gorka conduisit Bernard par un autre sentier de chèvres jusqu’à une longue plage de sable fin qui s’étendait vers l’ouest au débouché d’une vallée fertile parsemée de fermes qu’entouraient des treilles. Ensemble, ils firent un plongeon dans l’eau claire.  
    — Nage ! cria Don Gorka. Il n’y a rien de tel pour rendre de la force à ton bras !  
    Ils remontèrent à l’ermitage après avoir fait un déjeuner de fromage de brebis dans une des fermes de Bakio.  
    — Ces gens-là, dit Bernard, ont l’air très pauvres, mais heureux.  
    — Ils ont leurs misères, mais, comme tous les Basques, ils sont libres et égaux en droits, et ils n’ont pas eu besoin d’une

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