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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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sont des pêcheurs de Bermeo qui sont venus à notre secours…, ce qui t’explique qu’il y ait surtout des Bermeanos parmi les rescapés.  
    Les Basques repartaient vers l’est dès le lendemain matin. Bernard demanda la permission de se joindre à eux. Il y eut un long et inintelligible conciliabule entre Navarrot et ses camarades.  
    — Bon, dit enfin Navarrot, ce n’est pas de gaieté de cœur, mais ils t’acceptent à condition que tu obéisses au doigt et à l’œil à notre chef, Don Gorka. C’est le grand, avec une cicatrice sur le front.  
    Don Gorka avait quelque chose de Roumégous, en plus massif et carré.  
    — Il a l’air ronchon, dit Bernard.  
    — Il l’est, et, de plus, c’est un curé.  
    — Un curé ? Il n’en a pas la mine !  
    — C’est un curé basque. Son église est sur un piton, à la pointe des rochers de San Juan de Gastelugache. Quand on nous a ramenés chez lui, à demi noyés, avant de nous donner à manger ou à boire, il nous a fait jurer d’aller en pèlerinage d’abord à Begona, ensuite à Santiago.  
    Les Basques marchaient en droite ligne, sans tenir compte des chemins et des sentiers. Même les plus lourds escaladaient les rochers avec une agilité de chèvres. Pourtant, chacun portait un paquetage de plus de cinquante livres, Bernard comme les autres. Il suivit d’abord le train, mais, à mesure que la journée s’écoulait, il se trouva distancé. A la halte de midi, il ne rejoignit ses compagnons qu’au moment de se remettre en route et, le soir, il dut se guider à la lueur du feu de camp pour les retrouver. Ses pieds, enflés et douloureux, saignaient par des dizaines de coupures.  
    Après le repas, Don Gorka s’approcha de lui, un paquet d’herbes séchées sous le bras.  
    —  Mira, hijo.  
    Il lui montra comment, en tressant l’herbe, il pouvait se fabriquer des sortes d’espadrilles. Bernard s’escrima une bonne partie de la nuit. Le résultat n’était pas très beau à l’œil, mais, quand vint le moment du départ, il constata que le confort de sa marche s’était considérablement amélioré. Le soir, il se fit une nouvelle paire d’espadrilles, plus solides et plus agréables à porter. Dès lors, jour après jour, il essaya de rivaliser de vitesse avec ses compagnons et de tenir le train. Parfois, ils traversaient des villages perdus dont les habitants dépenaillés s’enfuyaient à leur approche. Quand on rencontrait un bourg plus important ou une ferme d’allure prospère, Don Gorka allait négocier quelques achats de nourriture. Son aspect redoutable et sa qualité de prêtre arrivaient toujours à obtenir des conditions avantageuses.  
    — D’habitude, les pèlerins sont pauvres, dit un jour Bernard à Navarrot, mais Don Gorka semble avoir la bourse bien garnie.  
    — Les Basques ont de gros besoins et ils n’aiment pas mendier. Ce sont les pêcheurs de Bermeo qui se sont cotisés pour nous permettre d’accomplir notre vœu dans des conditions dignes de notre peuple. Leur part de pêche n’est pas grosse et ils en dépensent la moitié à boire le jour de la San Roque, mais avec ce qu’il reste ils sont généreux.  
    Jusqu’au dixième jour, ils marchèrent à l’estime, comme s’ils étaient en mer. Ce matin-là, après avoir dit sa messe en plein vent, Don Gorka fit un bref discours en basque.  
    — Il dit, traduisit Navarrot, que nous allons entrer dans la Montana où les gens sont fourbes et cruels. Les pics sont trop hauts pour que nous puissions les escalader. Il nous faudra suivre le chemin qui est infesté de bandits.  
    Tous les pèlerins prirent en main leur makila de bois dur, lesté d’une lourde pointe de fer. Seul, Don Gorka n’était pas armé. La troupe aborda la montagne au sud, par Riano. C’est le lundi suivant, à la tombée de la nuit, que se produisit l’attaque au Desfiladero de la Hermida.  
    Une vingtaine d’hommes brandissant des coutelas et tirant des coups de pistolet dévalèrent la pente à la sortie du défilé, tandis que d’autres, de la crête, faisaient pleuvoir des pierres sur la troupe.  
    Les Basques n’étaient que quinze, seize en comptant Bernard. Don Gorka les rallia à l’abri d’un rocher en surplomb et donna rapidement ses ordres.  
    Trois hommes posèrent leur paquetage et se mirent à escalader la paroi par une cheminée dont l’inclinaison paraissait à Bernard impraticable pour tout autre animal qu’une mouche ou une

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