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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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personne à qui
vous pourrez faire confiance : Michel de Castellaire, le nouveau juge
ecclésiastique de l’évêché. Le Saint-Père vient de l’envoyer comme commissaire
pontifical chargé de lutter contre l’hérésie. Évitez de rencontrer l’évêque.
Mgr Rainier est un ancien chanoine de l’église de Marseille. C’est un homme
pieux mais trop accommodant envers les dérives des Marseillais. L’Église ne
tolérera plus les complaisances coupables faites aux juifs, aux Sarrasins, aux
sorciers et aux hérétiques.
    Au château Babon, l’intendant et le secrétaire de
Roncelin n’apprirent rien à Hugues de Fer. Il fouilla la chambre du vicomte, y
trouva des chartes et des documents notariaux, mais aucun document ayant un
rapport avec son déplacement à sa maison de Portas Gallicus.
    Fer repartit donc bredouille. De retour à
l’écurie, il expliqua à Ibn Rushd qu’il voulait se rendre chez son ami, le
consul Guillaume Vivaud, pour le prévenir et lui demander de réunir le conseil
de la ville.
    — Guillaume est plus jeune que moi, dit-il
tandis qu’ils reprenaient la Grand-Rue, et nos familles se connaissent depuis
très longtemps. La sienne, qui a fait fortune dans le commerce des draps, vient
de Gênes. Guillaume continue à vendre des draps du Languedoc en Italie et à
acheter de la soie en pays sarrasin, mais il participe surtout à des societates. Tu le sais, chez nous catholiques, l’usure est interdite. Seuls les prêts
gratuits et amicaux sont autorisés, mais à ces conditions, personne ne veut
prêter son argent ! Or, même les plus prospères négociants ont besoin de
financer leurs affaires, car souvent leur fortune est immobilisée en terres, en
fiefs ou en maisons. Moi le premier. Vivaud propose donc d’apporter un capital,
tandis que son associé apporte son expérience, sa clientèle et son matériel. Il
y a ensuite partage des bénéfices.
    — Son gain paye son risque, c’est cela ?
    — Oui et non. Il s’agit quand même d’un prêt
déguisé, car en cas de perte sur l’affaire, l’autre associé remboursera tout ou
partie de la somme avancée. Tout cela est bien sûr détaillé dans un contrat
devant notaire, mais en n’utilisant jamais le mot de prêt.
    — Pourtant les juifs peuvent faire des prêts…
    — En effet, à des taux d’intérêt au denier
six, et même quelquefois au denier deux [34] . Seulement les prêteurs juifs
ont par moments besoin d’argent, aussi pratiquent-ils des associations de même
nature avec quelques négociants, pour des entreprises uniquement financières.
C’est ainsi que Vivaud est associé avec Samuel Botin, que nous verrons demain,
car j’ai besoin d’un prêt en attendant le retour de ma galère. C’est leur
société qui a pris en gage, pour vingt mille sous, les droits féodaux du père
d’Alice, ma pupille. Vivaud se comporte aussi en banquier quand il fait crédit
en vendant du drap, car le payement différé est autorisé par l’Église. Mais il
se fera alors payer vingt-cinq sous pour une aune qu’il aurait vendue dix si le
paiement avait été immédiat.
    Les hommes cherchaient toujours à tromper les lois
que Dieu leur imposait, persuadés que le Grand Miséricordieux ne s’en
apercevrait pas, songea Ibn Rushd avec une triste ironie.
    — Pourquoi faire appel à ce Botin si tu as
besoin d’argent ? Ton ami Vivaud ne pourrait-il pas t’avancer la
somme ?
    — Il y a quelques mois, j’ai prêté à Guillaume
deux mille sous d’or pour acheter un fief près de Hyères, car tout son argent
était immobilisé. Or, nous sommes associés dans plusieurs entreprises, en
particulier, il a une part de ma galère. Comme moi, il attend donc son retour,
car il ne conserve que ce qu’il lui faut pour sa dépense. Il n’y a donc que
Botin qui peut me prêter ce qui m’est nécessaire, c’est-à-dire de quoi payer
les marchandises et les gages de l’équipage d’une de mes tartanes qui part dans
quelques jours.
    — Et si ta galère ne rentre pas ?
    — Ce sera plus que fâcheux… Je serai
contraint de vendre des terres. Il me faudra aussi financer une autre galère,
mais ce sont des risques acceptables au regard des bénéfices que j’en tire.
    Ils s’arrêtèrent devant une écurie accolée à la
muraille du port où ils laissèrent leurs montures. Fer désigna la maison de
Vivaud, à quelques pas : une grande construction de pierre, élevée sur des
voûtes en cintre, avec un bel escalier et une

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