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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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petite terrasse pour accéder à la
porte. Plusieurs doubles fenêtres ogivales à colonnettes ouvraient sur la
façade. Une des voûtes formait la boutique du drapier.
    Ils frappèrent. Un intendant vint leur ouvrir et
les fit entrer dans la grande salle. Un homme de petite taille, légèrement
voûté, en hérigaud vert foncé, était devant une cheminée, tandis que des femmes
dressaient une table pour le souper.
    L’homme en vert se tourna vers les visiteurs et un
sourire illumina son visage.
    — Hugues ! Quelle heureuse
surprise !
    — Guillaume, voici mon ami Ibn Rushd dont je
t’ai souvent parlé. Tu dois t’en souvenir. Je l’ai connu durant la croisade et
il habite chez moi en ce moment. Je suis embarrassé de venir si tard, mais il
fallait que je te voie. C’est grave…
    Vivaud fit un signe aux femmes qui, après s’être
inclinées, sortirent par une porte dissimulée sous une draperie.
    — Asseyez-vous, je vais faire porter du vin
chaud.
    — Inutile ! Nous n’allons pas rester.
    Discrètement, Ibn Rushd balayait la pièce des
yeux. Le sol était en carreaux de terre cuite. Face à la cheminée, le mur
n’était qu’une immense armoire aux vantaux peints. Devant, un banc servait de
siège pour la table à tréteaux. Deux grandes huches, ciselées en bas-relief
représentant des hommes d’armes et des animaux, se dressaient sur un autre mur
auquel était suspendue une tapisserie. En face s’accumulaient de beaux coffres,
une armoire et une crédence qui exposait plats, aiguières et bassins en argent.
Un gros candélabre à plusieurs branches avec des bougies de cire avait été
placé près de la table. Tout l’intérieur de Guillaume Vivaud révélait la
prospérité du négociant.
    Il s’approcha de la crédence, saisit un drageoir
contenant des fruits confits et le leur tendit pour qu’ils se servent.
    — Roncelin a disparu… On l’a enlevé, lâcha
Fer, en choisissant un abricot.
    Vivaud fut si stupéfait qu’il posa le drageoir.
Ibn Rushd observa que sa main tremblait et que son visage s’affaissait. Hugues
lui avait dit que le drapier était plus jeune que lui, pourtant il ne le
paraissait pas. Un menton fuyant, un nez bossu, une bouche lippue au milieu
d’un visage sanguin aux lourdes poches sous les yeux le rendaient à la fois
laid et maladif. La bouche ouverte de saisissement, il eut un mouvement
d’horreur quand Fer décrivit ce qui était arrivé à Madeleine Mont Laurier et il
resta les yeux écarquillés quand on lui montra la pièce d’étoffe à l’étoile.
    — … Il faut réunir les consuls, dès
demain, conclut le viguier.
    — Je m’en occupe, dit lentement Vivaud après
avoir dégluti. Nous serons tous au Tholoneum… Mais j’ai du mal à croire à la
culpabilité d’Hugues des Baux…
    — Qui d’autre ? La pièce de tissu avec
la comète est une preuve irréfutable… N’oublie pas que c’est lui qui nous a
assiégés, il y a quatre ans ! Cependant, avant que j’arrive au Tholoneum,
ne parle ni de la disparition de Roncelin ni de l’implication des Baussenques.
    Vivaud lui lança un regard interrogateur.
    — Comment Hugues des Baux a-t-il su qu’il
trouverait notre vicomte à cet endroit et à cette heure ? demanda Fer. Un
complice l’a forcément prévenu. Je veux observer les réactions du conseil
demain.
    Vivaud se frotta le menton avec perplexité.
    — Tu penses à un consul ?
    — Tout est possible.
    — Je ne comprends pas pourquoi Hugues des
Baux aurait fait ça, dit alors Vivaud.
    — C’est évident ! Forcer Roncelin à lui
vendre sa part pour prendre possession de Marseille !
    — Mais ce crime ! L’assassinat de
Madeleine… Il sera poursuivi…
    — Il niera ! Il n’y a pas de témoin… Il
pourra toujours dire que c’est nous qui avons tout inventé pour le discréditer…
Que Roncelin est venu de son plein gré…
    — Il n’empêche, cette pièce de tissu… Et si
Roncelin confirme qu’il a été enlevé, l’affaire ira jusqu’à Rome… Cela vaudra
l’excommunication à Hugues des Baux.
    — Je connais Roncelin, toi aussi. Il est
suffisamment malléable pour accepter la domination des Baussenques et faire ce
qu’ils exigent de lui. Il vendra la part de la vicomté et Hugues prendra
possession de la ville. Si nous nous opposons à lui, si nous l’accusons, il
dira que c’est un complot de notre part. L’empereur le soutiendra, le comte de
Provence ne bougera pas et Rome s’inclinera.

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