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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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pour commander du vin au
cabaretier.
    — Après tout, pourquoi pas ? Dis-m’en
plus, compagnon ! proposa-t-il.
    En écoutant le Saxon lui raconter ce qu’il savait,
Guilhem se disait que la chance lui souriait. Ce qu’il apprenait complétait ce
que lui avaient raconté Constance et Raymond de Toulouse. Mais avait-il intérêt
à participer à la délivrance du vicomte ? Il avait fait ce que souhaitait
Raymond de Toulouse. Il pouvait rentrer à Saint-Gilles et tout lui raconter.
    L’argent serait pourtant une bonne raison pour se
lancer dans l’aventure, car il n’était pas riche et après tout il était
mercenaire. Et puis il y avait Constance. En délivrant Roncelin, il gagnerait
sa main. Et même s’il échouait, à condition qu’il revienne, il pourrait lui
dire qui avait tué sa sœur. Elle comprendrait qu’il n’avait pu vaincre les
seigneurs des Baux. Cela suffirait sans doute pour qu’il soit agréé comme
époux.
    De plus Raymond de Saint-Gilles préférerait sans
doute Roncelin libre que prisonnier du seigneur des Baux. Hugues des Baux lui
avait menti en lui faisant croire que Roncelin allait vendre sa part
volontairement. Il ne serait jamais un allié de confiance pour le comte de
Toulouse.
    Il avait enfin une dernière raison. Il s’était lié
d’amitié avec Robert de Locksley et il lui répugnait de l’abandonner quand il
partirait se battre.
    Cela ne lui coûterait rien d’écouter la
proposition et le plan du viguier.
    Ayant vidé leurs verres, ils se rendirent donc à
la tour de Hugues de Fer. En arrivant, l’écuyer qui attendait Locksley le
conduisit par l’escalier jusqu’à la grande salle. Fer et Ibn Rushd étaient
penchés sur la table. On avait tendu au-dessus une peau de porc tannée et, à
l’aide d’un charbon de bois, un jeune homme dessinait un plan. Une femme qui
leur tournait le dos faisait des commentaires.
    En les entendant, tous se retournèrent, et quand
Robert de Locksley découvrit le visage d’Anna Maria, il resta pétrifié.
     

Chapitre 17
    C ’est
au souper que l’épouse de Hugues de Fer parla du sorcier.
    — Il était devant la porte de l’Annone
pendant le marché, comme tous ces bateleurs qui font des tours de passe-passe
en espérant une obole. Mais celui-là n’était pas comme les autres ; grand
et sombre de peau, avec une terrifiante barbe noire, il s’exprimait dans un
baragouin incompréhensible. Ses yeux brillaient d’une étrange lueur et je dois
avouer que j’ai eu peur rien qu’en le regardant. C’était sûrement un
infidèle ! À grand renfort de gestes, il nous a demandé de nous écarter,
expliquant que ce qu’il allait faire était dangereux. Un attroupement s’est
formé aussitôt autour de lui, tant on était intrigués.
    À ce stade de l’histoire, elle se mordilla la
lèvre après avoir observé qu’Ibn Rushd avait eu un sourire quand elle avait
parlé d’infidèle.
    — Il a répandu une épaisse poudre, noire comme
sa barbe, dans un grand cercle de deux cannes autour de lui et nous a prévenus
qu’il allait ouvrir la porte de l’enfer, poursuivit-elle. Puis toujours dans
son sabir, il a ajouté qu’il connaissait les formules pour se faire obéir du
démon. Ensuite il a battu du briquet et une immense flamme l’a entouré dans un
fracas de tonnerre. L’odeur de soufre était irrespirable… Il avait vraiment
ouvert la porte de l’enfer ! fit-elle d’une voix perçante.
    Toutes les conversations avaient cessé à la table.
Quelques convives se signaient, d’autres priaient, chapelet en main, car ils
avaient été nombreux à avoir assisté au prodige : l’épouse du viguier
étant accompagnée de ses servantes et d’un des gardes de Hugues de Fer.
    — Que s’est-il passé, ensuite ? demanda
Hugues qui n’avait pas été informé de l’histoire, trop occupé avec les
préparatifs de l’expédition aux Baux.
    — Quand on a vu l’enfer, on s’est
enfuis ! Des femmes sont tombées dans la bousculade. Puis la flamme s’est
éteinte et le sorcier était toujours là, souriant de sa méchanceté !
Autour de lui, le sol avait fondu ! Il a alors déclaré que, contre
quelques piécettes, il pouvait obtenir pour nous les faveurs du démon.
    — Les faveurs du démon ! Mais qui est
cet individu ? demanda le viguier dans un mélange de colère et
d’inquiétude.
    — Je ne sais pas, mais ce n’était pas un
bateleur ordinaire, mon seigneur, affirma dame de Fer. Il a fait une

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