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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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Sois courageuse.
    — Bonne nuit, monsieur.
    Elle descendit de la voiture, entra dans la cuisine d’été.
    Songeur, Mathieu amena la jument à effectuer un demi-tour. Sa dernière conversation avec le curé lui trottait dans la tête. Se pouvait-il que le saint homme ait encouragé, ou à tout le moins toléré, la cruauté des parents?
    Après tout, ceux-ci se vouaient à combattre le démon de l’impureté glissé dans le corps d’une petite pécheresse de dix ans.
    Avant d’aller au lit, le stagiaire prit le temps de mettre sur papier une description de sa soirée longue de cinquante lignes. L’exercice lui paraissait bien futile. Excepté l’histoire du rondin et l’identité de Marguerite Lebœuf, rien de tout cela ne serait utile.

    *****
    Le lendemain au déjeuner, la conversation dériva sur son existence à Québec et ses origines familiales. Après s’être un peu imposé à ses hôtes, satisfaire leur curiosité lui parut un tribut légitime à payer. Ils se montrèrent particulièrement intéressés par le fait que sa mère vivait à l’étage de son commerce.
    — C’est comme ici, remarqua madame Mailhot, ravie du constat.
    — Avec une seule différence : maman se limite à la vente des vêtements.
    — J’aimerais bien, mais c’est impossible dans la paroisse.
    La bonne dame en rêvait sans doute. Plus tard, tout en marchant vers l’église, Mathieu déclara au juge de paix :
    — Les enfants Gagnon ne fréquentent pas l’école, je crois.
    — Je ne peux vraiment pas vous renseigner à ce sujet.
    — Après la messe, j’aimerais parler à l’institutrice.
    — Vous l’amènerez au magasin, ce sera plus discret. Je suis autorisé à ouvrir une petite heure après la cérémonie.
    Le curé consentait à cet accroc au respect du jour du Seigneur pour rendre service à ses paroissiens. Certains d’entre eux habitaient loin du village, ils n’y venaient que le dimanche. Leur permettre d’effectuer quelques achats leur épargnait de refaire le trajet un autre jour de la semaine.
    Dans le temple, le visiteur se retrouva cette fois sur le banc du marchand. Le curé Massé paraissait morose, préoccupé même. Les incantations en latin s’allongeaient indûment au goût du jeune homme. Du haut de la chaire, il évoqua l’affaire de manière succincte :
    — Ces derniers jours, de bien tristes événements ont touché notre communauté. Je ne saurais trop insister: la défunte, tout comme ses parents, méritent vos prières sincères. Surtout, je vous invite à réprimer la tentation de médire de vos voisins.
    Dans d’autres circonstances, la recommandation serait apparue bien innocente. Dans le contexte d’une enquête criminelle, elle devenait fort suspecte.
    — Au cours des prochains jours, je devrai me rendre à l’évêché. En cas d’urgence, vous pourrez vous adresser au pasteur de Parisville.
    Trente minutes plus tard, à la sortie, Mathieu se retrouva au milieu d’une foule de paysans qui voulaient échanger les dernières nouvelles. Sa présence les empêchait d’évoquer les événements récents, même s’ils leur brûlaient les lèvres.

    Il se retrouva en face du grand-père Gagnon flanqué de Marie-Jeanne, Georges et Gérard. La grand-mère devait garder la petite fille.
    — Bonjour, mademoiselle. Vous vous portez bien ?
    Devant des témoins, il préférait revenir à son formalisme habituel.
    — Oui, monsieur. Merci.
    Elle emboîta le pas au vieil homme. Celui-ci préférait sans doute s’esquiver bien vite, dans les circonstances.
    — Voilà l’institutrice, murmura Mailhot à l’intention de son invité, mademoiselle Saint-Onge. Je peux vous la présenter.
    Il accepta d’un signe de tête. Ensuite, le jeune homme lui demanda :
    — Accepteriez-vous de m’accorder quelques minutes ?
    J’aimerais vous parler.
    — Je ne vois vraiment pas ce que je pourrais vous apprendre.
    Ni son identité ni le motif de sa présence dans la paroisse ne lui étaient inconnus. Elle aussi était au courant des allées et venues des « gens de Québec » depuis leur arrivée dans la paroisse.
    — Je veux seulement connaître un peu mieux cette petite fille et les membres de sa famille.
    Son interlocutrice lui parut quelque peu indécise, puis elle donna son assentiment avec un demi-sourire.
    — Vous pouvez me poser vos questions.
    Le jeune homme regarda autour de lui. Au moins dix personnes paraissaient tendre l’oreille.
    — Monsieur Mailhot m’a gentiment offert

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