Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mélancolie française

Mélancolie française

Titel: Mélancolie française Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Zemmour
Vom Netzwerk:
qui, ne renonçant pas à leur quête révolutionnaire initiale, voient en l’islam la nouvelle religion des pauvres qui donnera l’effet de levier suffisant pour chasser la domination bourgeoise, américaine – et juive, qualifiée hypocritement de sioniste. Elle met de nouveau en difficulté les élites juives de gauche qui conduisirent le mouvement antiraciste dans les années 1980, associèrent étroitement toute agression contre les Arabes – et même toute tentative pour endiguer l’immigration de peuplement qui s’est développée au cours de ces deux dernières décennies – aux persécutions nazies contre les Juifs. Ébranlées par leur solidarité avec Israël, effrayées par la concurrence victimaire qui réveillait un antisémitisme virulent parmi les populations d’origine africaine et arabo-musulmane vivant en France, celles-ci se sont séparées de leurs anciens alliés d’extrême gauche, qui vitupèrent désormais leur « islamophobie » comme, cinquante ans plus tôt, on leur reprocha leur « bellicisme ».
    Le fameux « sinistrisme » français pousse depuis deux siècles le théâtre politique dans un mouvement continu vers la gauche, et transforme inexorablement la droite française en une ancienne gauche désillusionnée, et l’ancienne droite en un extrémisme qui n’a souvent besoin de personne pour s’ostraciser.
    Le nationalisme français de la fin du XIX e siècle est pourtant plus complexe que sa caricature. Un nationalisme de défaite, de repli sur soi, pour panser ses plaies, de ressentiment, de nostalgie, et même de paranoïa. Mais un nationalisme qui refuse de suivre les penchants racistes de son grand ennemi germanique : « Nous sommes des nationalistes. Nous ne sommes pas des nationalistes allemands, pouvait-on lire dans le journal de l’Action française du 1 er octobre 1926. Nous n’avons aucune doctrine qui nous soit commune avec eux. Toutes les falsifications, tous les abus de textes peuvent être tentés : on ne fera pas de nous des racistes ou des gobinistes. »
    Un siècle plus tard, Pierre-André Taguieff, dans La Couleur et le sang , leur donnera acte : si le racialisme de Gobineau n’a pas fait école en France, c’est notamment du fait « de l’incompatibilité du nationalisme français, incarné par l’Action française, avec toute forme de matérialisme biologique ».
    En 1918, seul Bainville, l’historien de L'Action française, comprit que le traité de Versailles n’effacerait pas celui de Vienne de 1815. Il était, selon la formule célèbre, trop mou pour ce qu’il avait de dur, trop dur pour ce qu’il avait de mou ; tout était vain. Devant la faiblesse de la France, une partie de la droite fut tentée de renoncer et d’abandonner toute politique nationale dans le giron protecteur de l’Europe allemande ; une minorité, de ressusciter le programme réactionnaire de Charles X contre 1789 ; certains rares esprits y verraient l’occasion tant attendue de se venger d’une Angleterre qui avait empêché opiniâtrement la domination française sur l’Europe. L’essentiel était désormais l’unification du continent, retrouver cet Empire romain qui nous échappait chaque fois que l’on croyait l’avoir ressuscité, même sous direction germanique : « Il faut détruire Carthage », scandait inlassablement Philippe Henriot sur les ondes de Radio-Paris. C’est ainsi que la droite des affaires retrouva la droite des « idéalistes » de l’Europe nouvelle qui rêvait d’un monde débarrassé de l’influence ploutocratique que les Anglais avaient transmise au monde via leur empire, l’Amérique, et… le poison juif. Ceux-ci – néo-pacifistes et vieux antisémites – retrouvèrent leurs adversaires de gauche – néo-antisémites mais vieux pacifistes – qui les jugèrent souvent collaborateurs trop tièdes, trop imprégnés encore par la germanophobie maurrassienne.
    Ils n’avaient pas tort. Le maurrassisme survécut à Charles Maurras. Alors que le vieux maître soliloquait sur « la divine surprise » de la victoire politique de Pétain – qu’on interpréta, ingénument ou malignement, comme une satisfaction affichée de la défaite –, beaucoup de ses disciples, imprégnés du patriotisme et de la germanophobie qu’il leur avait inculqués, refusèrent la défaite, et se retrouvèrent aux premières loges à Londres ou dans le maquis.
    Au milieu d’un nouvel amoncellement de noms et de biographies, mais dans le sens

Weitere Kostenlose Bücher