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Mélancolie française

Mélancolie française

Titel: Mélancolie française Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Zemmour
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empire américain de nations germaniques.
    La brutalité de la crise de l’automne 2008 a montré cruellement cette réalité : une France qui fait semblant d’être plus européenne que tous ; une Allemagne qui refuse de faire semblant, et de payer au nom d’une illusoire « solidarité européenne ». Le conflit fondamental entre la France et l’Allemagne tourne autour du libre-échange et du protectionnisme. Toujours la même querelle, de Napoléon à de Gaulle. Alors que l’Allemagne s’est positionnée comme une immense Hanse, les Français ne parvenaient pas à faire leur deuil de la « préférence communautaire ». Ils ont toujours la tentation inconsciente d’installer les soldats de Davout à Hambourg. Davout, l’homme qui entra dans Berlin.
    Pour une fois, le vent a tourné en faveur des thèses françaises. Depuis l’automne 2008, nous vivons non seulement la fin d’un monde, mais peut-être la fin de la mondialisation. Celle-ci se définit par la libre circulation des marchandises – selon le schéma classique – mais aussi par celle tout à fait nouvelle des « facteurs de production », capitaux et hommes. Celle-ci a entraîné un phénomène de déflation, une crise de la demande américaine, que Washington a tenté d’enrayer par un développement fou de l’endettement privé ; jusqu’à l’explosion finale de la bulle financière forgée à cette occasion. Le commerce des marchandises commence déjà à se rétracter, alors même qu’aucune mesure sérieuse de protectionnisme n’a été prise, sur le modèle méconnu de la crise de 1929, qui vit en effet une réduction du commerce international des marchandises précéder la « guerre des tarifs » que se livrèrent tous les pays à la suite des États-Unis. Le Premier ministre britannique s’est inquiété publiquement de la « déglobalisation ». Mais le discours lénifiant des grandes institutions internationales et des réunions médiatisées du G8, remplacé désormais par le G20, continuent de proscrire tout « protectionnisme » et d’exalter les bienfaits du « libre-échange » et de la « mondialisation ». Un incommensurable endettement public a seulement pris le relais, selon un modèle pour le coup très français, de celui des particuliers.
    Les Français ont tendance à surestimer la puissance germanique. Ils ont eu la surprise de découvrir la faiblesse des banques allemandes lors de la crise de 2008. Ils ne veulent pas voir les lacunes et pesanteurs d’un système de décision régionalisé, il y a peu encore alourdi par les contraintes politiques de la « grande coalition » entre les deux principaux partis politiques. Les plus lucides – ou les plus paranoïaques – considèrent que l’Allemagne joue des politiques régionales de Bruxelles et de la puissance financière du SPD et de la CDU pour conserver un œil attentif sur les régions à dialecte germanique que l’histoire lui a « arrachées » : Alsace, canton belge d’Eupen ou Sud-Tyrol (l’Alto Adige italien) ou encore des territoires de l’Europe centrale.
    On se souvient encore comment le chancelier Kohl se précipita pour reconnaître l’indépendance de la Slovénie, puis de la Croatie, qui se dégageaient de la tutelle de l’État yougoslave. Quitte à provoquer une guerre féroce.
    Entre Français et Allemands, rien ne va plus, mais personne n’ose avouer que le roi est nu. Le passé inhibe les esprits et clôt les langues. L’Allemagne a jadis eu besoin de la France pour redevenir « présentable », « hoffähig », et récupérer « son » charbon et « son » acier. La France avait, elle, tendu la main à son ancien « ennemi héréditaire » pour en faire son « levier d’Archimède », avec d’autant plus de tendresse que celle-ci avait renoué avec sa tradition séculaire de divisions de son territoire. L’Allemagne n’a plus besoin de la France pour être respectable ; le levier d’Archimède ne fonctionne plus, ou alors contre nous. Les divergences d’intérêts sont devenues plus nombreuses que les convergences. Le fameux « couple franco-allemand » est plus que jamais un mythe qu’affectionnent tant des Français si sentimentaux. On ne sait quel événement se produira d’abord, de l’effondrement du dollar, déstabilisé par les déficits démesurés, ou de la fin d’un euro, de plus en plus cher, outil masochiste de torture pour les industries françaises et italiennes. Le dernier grand dessein géostratégique

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