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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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Jan partit dans la direction opposée. Jerzy se releva à son tour, secoua le fessier de son pantalon et regarda marcher son frère.
    – On dirait qu’il a tout le poids de la terre sur les épaules. C’est bien lui qui devrait boiter.
    Anna s’approcha de Jerzy et nicha sa tête dans le creux de son épaule.
    – À qui est-ce qu’il ressemble?
    – Il a des côtés de mon père, toujours inquiet. Je ne l’ai pas connu après son emprisonnement, mais ça devait être difficile. Mon père avait tendance à philosopher avec ses angoisses et il n’avait pas beaucoup d’humour. Mais quel homme!
    – Tu penses vraiment que Jan lui ressemble?
    – Je pense que oui, en exagérant qualités et défauts.
    Élisabeth et Étienne apparurent au bout de l’allée bordée d’arbres qui menait à la maison. Élisabeth fit de grands signes de la main auxquels Anna répondit avec enthousiasme.
    – Je pense que nous allons avoir d’autres noces.
    – Oh non! Élisabeth n’est pas amoureuse d’Étienne.
    – Non?
    – Bien non, Jerzy. Élisabeth réapprend les gestes de la séduction. Elle ne l’aime pas.
    – Tu te trompes, Anna. Moi, je suis certain du contraire.
    Tant qu’Élisabeth ne fut pas à portée de voix, Jerzy et Anna s’obstinèrent dans leurs perceptions respectives.
    Ils préparèrent le souper assez tôt, après qu’Élisabeth eut réussi à convaincre Jerzy de la laisser s’occuper de la traite des trois vaches. Étienne était rentré en se bouchant le nez.
    – C’est qu’Élisabeth elle-même sent la vache.
    Étienne lut un magazine pendant qu’Élisabeth se lavait et remettait sa robe du dimanche.
    – Mais où est Jan?
    Jerzy regarda l’heure. Son frère était parti depuis longtemps. Ils l’attendirent pour passer à table, puis, voyant qu’il ne revenait pas, décidèrent de manger.
    – Ça lui arrive souvent d’aller au village?
    – C’est dimanche. Tout est fermé.
    – Peut-être les commerces mais pas toutes les portes.
    Anna avait voulu se faire rassurante. Élisabeth attendit encore une heure, marchant de la porte à une fenêtre, puis à l’autre fenêtre, s’approchant de l’appareil téléphonique dans l’espoir de l’entendre sonner. Elle était incapable de sourire et eut quelques impatiences envers Étienne qui n’essayait pourtant que de la rassurer.
    – Personne ici ne connaît Jan comme moi.
    Anna mit la main sur l’épaule de Jerzy, sachant que cette affirmation lui avait certainement fait mal.
    – Jan ne ferait jamais quelque chose comme ça. Pas quand il sait que je suis là et que je l’attends.
    Encore une fois, Jerzy réagit comme s’il venait de recevoir une injection de liquide fielleux dans le cœur. M me Jaworska se leva, alluma une bougie devant l’icône de la Vierge noire et se rassit. Élisabeth la dévisagea, la crainte inscrite dans les yeux.
    – Vous êtes inquiète, madame Jaworska.
    – Je m’interroge parce que Jan m’avait promis de jouer aux cartes ce soir. Il ne manque jamais à sa parole.
    Jerzy, suivi d’Anna, sortit de la maison après avoir emporté une lampe de poche.
    – Il a dû se saouler et il doit être affalé quelque part. Je vais faire le tour du terrain.
    Anna marcha derrière lui, scrutant chaque buisson. Les piles de la lampe faiblirent et c’est dans la noirceur totale qu’ils rentrèrent.
    – Jan?
    – Non, c’est Jerzy.
    Il crut entendre une déception dans la réaction pourtant discrète et assourdie d’Élisabeth. Anna lui prit la main et la serra très fort.
    – Ne sois pas susceptible, Jerzy. Elle est inquiète.
    – Moi aussi, je le suis.
    Le silence entra dans la maison en même temps que Jerzy. Seuls le tic-tac de l’horloge et le bruit que faisait Jerzy en aspirant et expirant la fumée de ses nombreuses cigarettes réussissaient à le troubler un peu. À vingt-trois heures, M me Jaworska s’endormit sur sa chaise. Étienne se leva donc sur la pointe des pieds pour se diriger vers Élisabeth qui était debout devant une fenêtre noire, n’y voyant que les reflets de la maison.
    – Il faut partir, Élisabeth.
    – Pars si tu veux, moi je ne bouge pas d’ici.
    – Tu travailles demain matin.
    – Ça n’a aucune espèce d’importance.
    Étienne jeta un regard de supplication en direction de Jerzy qui se contenta de hocher la tête. Étienne serapprocha encore d’Élisabeth et voulut lui donner un baiser avant de partir. Elle le repoussa.
    – Franchement, Étienne, ce n’est ni l’endroit

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