Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
Vom Netzwerk:
nef. Villeneuve s’énerva davantage.
    – Mais vous ne pouvez pas tourner le dos au Seigneur!
    Élisabeth inspira longuement avant de lui répondre gentiment que s’il avait vanté leur talent, c’est qu’il leur faisait confiance.
    – Nous n’irons pas dans la sacristie, mon père. À chacun sa place.
    Villeneuve fut piqué et redescendit l’escalier, déçu de penser que son coup de théâtre allait probablement échouer parce qu’il ne connaissait rien à la musique. Deux enfants de chœur l’attendaient dans la sacristie. Ils avaient déjà revêtu leur aube et se moquaient l’unde l’autre parce qu’ils avaient grandi et que leur robe laissait voir des chaussures poussiéreuses et des chaussettes dépareillées. Villeneuve les salua et se dirigea vers la table où avaient été déposés ses vêtements sacerdotaux. Il menaça le Seigneur de lui remettre sa démission si la réunion ne se faisait pas.
    Jerzy et Anna marchaient bras dessus, bras dessous, en direction de l’église ukrainienne, plus éloignée de la maison que l’église polonaise. Jerzy ne s’en plaignit pas, appréciant ce temps de calme.
    – Ta robe s’harmonise à merveille avec toutes les couleurs qu’on voit. Il n’y a rien de plus beau que toi aujourd’hui.
    – Et personne de plus aimé que toi, Jerzy.
    Plusieurs invités les suivirent après les avoir d’abord salués au passage. Le couple auquel s’agglutinaient les invités était resplendissant et la démarche claudicante de Jerzy semblait tout à coup rythmée sur le battement de son cœur.
    – Jamais je n’ai trouvé ta canine aussi charmante, Anna.
    Anna sourit tout en regardant les deux clochers bulbes, pointés, patauds, vers le ciel. Ils laissèrent passer les invités et M me Jaworska et entrèrent finalement, le cœur un peu comprimé.
    Le père Villeneuve ouvrit les bras pour les accueillir, comme si jamais il n’avait vu d’aussi beaux mariés. Ils arrivèrent enfin à l’avant et Villeneuve fit signe à l’organiste de commencer. Jerzy ne broncha pas mais sourit de bonheur lorsqu’il entendit la complainte de deux violons. Il se pencha pour remercier Anna de cette délicate attention et elle le regarda, étonnée, ayantelle-même pensé que la surprise était de lui. Le père Villeneuve avait l’air plus inquiet qu’eux, des petites perles de nervosité s’accrochant à son nez. Le temps des vœux arriva enfin. Jerzy et Anna se levèrent et firent un pas en avant pendant que Villeneuve ne cessait de regarder au jubé. Il n’apercevait que deux têtes blondes penchées l’une vers l’autre et des mains tripotant des feuilles de musique.
    – Jerzy Pawulski…
    Il fit mine de s’étouffer et recommença une deuxième fois, plus fort.
    – Jerzy Pawulski…
    Encore une fois il s’étouffa, ce qui amusa les mariés et les invités. Quant à Jan et Élisabeth, ils n’entendirent rien, si ce n’est une petite commotion d’amusement. Ils ne se retournèrent pas, au grand dam de Villeneuve qui promit à Dieu que, si Jan et Élisabeth ne se retournaient pas la troisième fois qu’il ferait chanter son coq, il vendrait son âme au diable, aussitôt prononcé l’
Ite missa est
.
    – Jerzy Pawulski…
    Villeneuve fit une pause et regarda au jubé, soupira et tenta de se reconcentrer sur la cérémonie. Il prononça le reste de l’office un peu trop distraitement à son goût, déçu à mourir de n’avoir pu réussir la spectaculaire réunion qu’il s’était promise.
    L’organiste fit signe à Élisabeth et à Jan qu’ils pouvaient attaquer l’
Ave Maria
, les mariés commençant à redescendre l’allée. Jan donna un coup de coude à sa sœur et lui demanda de jouer seule.
    – C’est encore plus beau quand un seul violon fait la voix.
    – Tu ne peux pas faire ça…
    – Vas-y, je t’écoute.
    L’organiste, impatiente, attaqua les premières mesures et Élisabeth, voyant que Jan ne plierait pas, décida de se lever. Le son du violon monta si pur dans l’église que Jerzy s’arrêta pour écouter la beauté de l’interprétation de cette pièce que sa mère et sa sœur avaient si souvent jouée ensemble. Il leva la tête pour remercier la violoniste d’un signe de complicité et ne bougea plus. Anna avait fait un pas mais, sentant qu’il ne la suivait plus, elle s’immobilisa elle aussi. Villeneuve regarda au jubé et vit la tête recueillie de Jan et celle d’Élisabeth qui, les yeux fermés, semblait bercer son

Weitere Kostenlose Bücher