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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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les mains dans les poches et y tenait fermement les lunettes de son père et l’enveloppe expédiée par M. Favreau.
    Au Centre de la Croix-Rouge, Élisabeth apprit l’évacuation d’une partie de la population de Saint-Norbert. Elle réussit à joindre Étienne qui lui confirma, après quelques recherches, que Jerzy était au nombre des évacués.
    – Tu parles d’un bête revirement, Élisabeth! C’est la rivière LaSalle qui a débordé. Même pas la Rouge. La Rouge se recouche hypocritement après avoir gavé l’autre.
    Élisabeth s’inquiétait et pria Étienne d’utiliser les ondes pour demander à ses frères de donner des nouvelles.
    Jan ravalait silencieusement sa colère et son désespoir. Il jeta la lettre de M. Favreau dans les eaux avant de monter dans une des grandes barges motorisées. Il tenait toujours Stanislas dans ses bras tandis que Jerzy essayait maladroitement d’aider sa belle-mère, qui ne cessait de marmonner des excuses à sa fille, à son gendre et à son Dieu.
    Jan s’enfouit la tête dans la couverture de Stanislas, espérant cacher sa déception. Il regarda le paysage, aussi noyé qu’il l’était lui-même par le chagrin. Le camion amphibie partit, laissant derrière lui une égratignure brune sur une eau indésirable.
    Jerzy et sa famille furent conduits à la gare, où, avec les autres évacués, ils prirent un train qui les mena à Beauséjour. Le maire du village les accueillit dans la salle paroissiale, leur promettant qu’ils dormiraient tous dans un lit bien sec. Stanislas interrompit son allocution à quelques reprises. Anna tenta vainement de le calmer. Ce fut finalement Jan qui y parvint en le berçant tout doucement. Plusieurs familles de Beauséjour arrivèrent pour venir chercher qui des connaissances, qui des évacués. Jan se sentit aussi désespéré qu’il l’avait été à Amberg, demandant, encore une fois, d’être parrainé dans son malheur.
    Et puis il les vit.
    Avec Stanislas endormi dans ses bras, il se glissa doucement derrière Jerzy.
    – Regarde à deux heures, Jerzy. Lentement.
    Jerzy tourna la tête et se figea. Deux hommes venaient d’entrer. Jerzy les reconnut immédiatement même s’il ne les avait vus que le temps de les mettre knock-out.
    –
Kurwa
de
shit
!
    Jan chercha Anna des yeux et lui fit un discret signe de tête pour qu’elle vienne reprendre Stanislas. Anna confia sa mère à d’autres personnes de Saint-Norbert et s’approcha, avec un sourire fatigué. Jerzy se tourna vers elle.
    – Si tu vois des choses que tu ne comprends pas, Anna, regarde ailleurs.
    – Qu’est-ce que tu veux dire?
    – Je t’expliquerai.
    Il avait pris un ton désinvolte pour qu’elle ne s’inquiète pas, jetant à la dérobée un regard en direction de son frère puis des nouveaux venus.
    Les responsables de la relocalisation temporaire s’approchèrent de lui et de Jan, leur posant les questions d’usage.
    – Vous êtes combien?
    – Cinq.
    On leur apprit qu’il était fort peu probable qu’ils puissent être tous logés à la même enseigne.
    – Je voudrais quand même être avec ma femme et mon fils.
    – Moi, je crois préférable d’être avec sa belle-mère, M me Jaworska, parce qu’elle ne s’exprime pas très bien en anglais, ni en français d’ailleurs.
    – Polonais?
    Jan acquiesça. Il regarda Jerzy, faisant un signe de tête si discret que même l’homme qu’il désignait ne le vit pas.
    – Dans une minute, ils vont être à côté de nous.
    Jerzy se rapprocha de son frère tout en faisant un sourire rassurant à Anna qui était allée retrouver sa mère. Puis les yeux se rencontrèrent. Les deux hommes s’arrêtèrent devant eux.
    – Tiens, tiens, tiens! Tu les reconnais, Fred?
    – Ma mâchoire reconnaît surtout le boiteux.
    Jan et Jerzy leur tournèrent le dos et allèrent se mettre en file devant la table des responsables. Fred et l’autre les suivirent discrètement. Devant l’irritabilité croissante et de sa mère et de Stanislas, Anna vint trouver Jerzy pour le prier de hâter les procédures.
    – J’imagine que dans cinq minutes tout va être réglé. Va t’asseoir. Stanislas doit te peser sur les bras.
    Jerzy avança d’un pas, Jan derrière lui. Jan entendit l’un des hommes dire que le boiteux au poing de fer n’était sûrement pas myope.
    – On l’a vu deux fois avec des femmes, et deux belles femmes.
    – Ta gueule, Albert.
    Jan frissonna, supposant qu’encore une fois la bagarre

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