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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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souvent eu peur. Maintenant, elle était paniquée. Jan allait crever de faim et son père certainement mourir de chagrin. Cet officier allait tous les tuer. Elle sentit Adam lui pincer les fesses et, de la main droite, lui fit quelques signes d’impatience. Adam se mit à ricaner. L’officier le regarda, jeta un coup d’œil à Élisabeth, et parla encore.
    – Nous avons été forcés,
Frau
, de réquisitionner votre chambre. J’ai dû céder l’appartement que j’occupais à un supérieur. Croyez-moi, rien ne me déplaît davantage. J’aime les soirées calmes, et trois enfants...
    Zofia ne le laissa pas terminer, craignant qu’il ne veuille les éloigner.
    – Ils sont ici chez eux!
    – Comme je disais avant que vous ne m’interrompiez, j’aime les soirées calmes comme celles que vous semblez avoir. Et trois enfants bien élevés ne devraient pas être un problème.
    Zofia baissa les yeux. Tomasz lui aurait reproché son manque de pondération.
    – Quand apporterez-vous votre bagage?
    – Dans une heure. Au fait,
Frau
, mon nom est Schneider.
    Élisabeth n’avait pas eu le temps de réagir que déjà l’officier franchissait d’un pas rapide le seuil de la porte.
    – Maman, est-ce que nous sommes obligés de dire oui?
    – La pièce est réquisitionnée, Élisabeth, pas louée. Ils en sont les propriétaires.
    – Eux?
    – D’une certaine façon, oui. Jusqu’à nouvel ordre. Vite, il faut déménager toutes nos choses dans la chambre de Jerzy. Je vais installer l’officier dans la nôtre.
    – Dans la vôtre? C’est révoltant et dégoûtant.
    – C’est la plus grande, elle a sa propre salle de bains avec le cabinet, sa fenêtre donne sur la rue...
    – Tu parles comme une propriétaire d’hôtel.
    – C’est un peu ce que nous devenons aujourd’hui, Dieu nous bénisse et nous pardonne. Allez, grouille.
    Zofia mit un violon dans les mains d’Adam et lui recommanda d’en jouer pendant plus de dix minutes. Elle s’empressa ensuite de vider les commodes et chiffonniers de sa chambre pendant qu’Élisabeth faisait de même dans celle de Jerzy. Zofia essaya de garder son calme. De la pensée, elle ne cessait de chercher Tomasz. Il avait certainement bien compris les signaux puisqu’il n’était pas encore rentré. Elle se pencha à la fenêtre et vit que la sentinelle du lieu était toujours là, au coin de la rue Sainte-Croix. Quelle merveilleuse organisation que la résistance! Cet officier Schneider ne devait pas être trop important parce qu’il n’avait même pas demandé à rencontrer son mari. S’il y avait un Dieu pour tout le monde, il avait quand même pris le temps, aujourd’hui, de voler au secours de leur famille.
    Jan arriva au moment où sa sœur et sa mère replaçaient le dessus-de-lit très usé sur la couverture.
    – Au moins, il est propre.
    – Qui? L’Allemand ou le lit?
    Mère et fille sursautèrent comme si elles avaient entendu un violent coup de tonnerre.
    – Jan! C’est terrible. Je ne dormirai plus de ma vie. Penser que cet homme-là va être dans leur lit et que...
    – Cesse donc, Élisabeth. Nous n’avons pas de temps pour des jérémiades. Il nous faut mettre au point une stratégie pour continuer à vivre comme hier.
    Zofia regarda son fils et, malgré le fait que la famille subissait un cataclysme, elle prit le temps de savourer sa fierté. Quel homme il devenait! Petit d’âge, grand de taille et de cœur. Tous les jours, sans se plaindre, il travaillait à la brasserie que les Allemands avaient ouverte au Wawel, à se tremper les bras jusqu’aux coudes et à s’arracher les ongles à récurer, sans abrasif ni brosse, des casseroles et des poêlons noircis. En hiver, le travail était tolérable, mais en été la chaleur déjà opprimante de la ville ne faisait qu’épaissir celle qui l’étouffait dans ses éviers inondés d’eau à quelques degrés d’être bouillante.
    – J’ai dit que nous faisions de la musique tous les soirs.
    – Tous les soirs?
    – Je sais, je sais, c’est une erreur. Il va falloir que nous le fassions. Je ne peux vraiment pas me contredire.
    Ils passèrent tous les trois dans la chambre de Jerzy et commencèrent à l’organiser assez fébrilement.
    – Oui, tu peux. Si tu expliques que tu étais nerveuse, trop impressionnée. Que les bons nerfs, c’est pour les hommes, pas pour les femmes qui ne sortent jamais. Tu peux préciser que nous ne faisons de la musique qu’un soir sur deux.
    – Et nous

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