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Même pas juif

Même pas juif

Titel: Même pas juif Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jerry Spinelli
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maison.

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27

    Le lendemain, j’ai rendu visite aux garçons. Je savais que je les
    trouverais dans leur nouveau repaire, une sente située derrière
    une boucherie éventrée par un incendie. Avant même d’arriver
    sur place, je les ai entendus : des bruits de coups suivis de
    hourras… puis, de nouveau, vlan ! et d’autres applaudissements.
    Que se passait-il ? J’ai débouché dans la ruelle. Gros Henryk
    tenait Kouba par les chevilles, tête en bas, pendant que Ferdi lui
    flanquait une fessée à l’aide d’un gros os ramassé parmi tous
    ceux qui tramaient là.
    En me voyant, Ferdi s’est interrompu.
    — Misha ! Amène-toi ! Viens te débarrasser de tes poux. J’ai
    compris. Chaque fois que Ferdi abattait son os, un minuscule
    blizzard pareil à du sel tombait des cheveux de Kouba. Sous la
    correction, Kouba oscillait d’avant en arrière comme le
    balancier d’une horloge de grand-père. L’opération terminée,
    Kouba a pris son os à Ferdi.
    — À ton tour, Misha, m’a-t-il dit.
    Rien que parce qu’il m’y avait fait penser, ma tête s’était
    mise à me démanger furieusement. Je sentais les poux ramper
    sur mon cuir chevelu. Je me suis mis à quatre pattes devant
    Gros Henryk. L’instant d’après, j’étais suspendu à l’envers, face
    à ses genoux.
    — Prêt ? a lancé Kouba.
    — Attends ! l’a arrêté Ferdi. Le livre !
    Il a fourré un volume dans mon pantalon, et le monde s’est
    ébranlé tandis que Kouba m’infligeait le premier coup de ma
    raclée. Soudain, une voix a hurlé :
    — Stop ! Ça suffit !
    Tournant la tête du mieux que je pouvais, j’ai vu Janina se
    jeter sur Kouba, véritable furie de pieds et de poings. Ferdi l’a
    attrapée et maîtrisée. Elle se débattait comme une diablesse.
    — Je ne lui fais pas mal, a précisé Kouba.
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    — Qui c’est ? a demandé Enos.
    Kouba s’était remis à frapper.
    — Ja… ni… na, ai-je expliqué, chaque mot haché par le
    tempo de la volée. Ma… sœur…
    Le temps que mon épouillage s’achève, Janina trépignait en
    criant :
    — À moi ! À moi !
    Elle se précipitait déjà vers Gros Henryk quand Enos est
    intervenu :
    — Une fille en robe ne peut pas être suspendue tête en bas.
    Il lui faudrait un froc.
    Comme j’étais le plus petit, c’est moi qu’on a choisi. Ôtant
    mon pantalon, je l’ai donné à Janina. J’y ai mis le livre et, hop !
    elle s’est retrouvée cul pardessus tête, fessée par Kouba. Chaque
    coup lui arrachait un hurlement de joie et des éclats de rire.
    Je me suis dit que, avec un peu de chance, son ange allait
    finir par sortir d’elle. Car telle était la dernière information que
    les gars m’avaient transmise : chacun portait son propre ange
    en lui. Lorsqu’on mourait, il s’échappait et s’envolait vers le
    Paradis. Malheureusement, quand j’insistais pour savoir où se
    trouvait le Paradis, tout le monde avait une réponse différente.
    En Russie, d’après Kouba.
    A Washington Amérique, selon Olek.
    — Vous êtes des imbéciles, objectait Enos. C’est ici. À
    Varsovie. De l’autre côté du mur.
    En voyant le petit corps de Janina secoué par tous ces
    coups, je me suis demandé comment l’ange arrivait à tolérer
    autant de remue-ménage. Mais j’ai eu beau surveiller encore et
    encore, rien d’autre n’est sorti d’elle que des piaillements, des
    rires et des poux.
    Enfin, Kouba a arrêté. Janina le suppliait de continuer. Elle
    a refusé de me rendre mon pantalon. Tout le monde s’est
    esclaffé quand je l’ai coursée dans les décombres. Le livre
    rebondissait sur ses fesses comme un paquet de crottin. Tout à
    coup, les rires se sont éteints. Je me suis retourné. Quatre
    personnes se tenaient au coin de la boucherie incendiée. Les
    garçons et Janina se sont interrompus pour regarder.
    Deux couples. Les hommes étaient des Bottes Noires. Les
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    boutons de leurs uniformes étincelaient comme des étoiles du
    berger. Les dames étaient blondes et portaient de petits
    chapeaux et des gants. Tous les quatre souriaient.
    L’un des Bottes Noires tenait un objet sombre. J’étais
    presque sûr qu’il s’agissait d’un pistolet, d’une arme
    quelconque. Pourquoi restions-nous figés sur place ? Soudain,
    un mouvement a attiré mon attention. Janina se dirigeait vers
    eux.
    — Janina ! me suis-je écrié. Non !
    Toujours béat, le Bottes Noires a levé son arme. Il l’a porté à
    son œil. A visé.
    — Non !
    Je me suis

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