Métronome
entières se soulèvent contre l’occupation anglaise. Le 13 avril 1436, à Paris, le tocsin appelle la population à l’insurrection et les rues sont barrées. Vieux tonneaux remplis de terre et charrettes renversées composent des formes menaçantes, isolant les troupes anglaises. Par les quartiers, des bandes éclatées d’archers ennemis errent sans ordre, sans commandement, dans un anxieux sauve-qui-peut…
Au même moment, les soldats du roi contournent Paris et s’emparent de Saint-Denis. Par des rumeurs soigneusement orchestrées, les Français donnent ainsi à penser que leur armée s’apprête à attaquer par le nord : les forces anglaises s’y précipitent pendant que le gros de la troupe française, opérant un mouvement tournant, pénètre dans la ville par la porte Saint-Jacques, au sud.
La population parisienne acclame les soldats français. L’heure tant attendue de la libération sonne enfin ! Dans un ultime sursaut, les Anglais mobilisent leurs dernières troupes autour de la Bastille, comme si les murs épais et l’imposante apparence de la forteresse devaient leur insuffler l’énergie de la riposte. Manœuvre désespérée, et inutile : la fière citadelle capitule bien vite.
Les officiers du roi vont à Notre-Dame écouter un Te Deum pendant que, signe de retour à l’abondance, une procession de cent chariots chargés de blé fait son entrée dans la ville. Peu après, des hérauts sillonnent les quartiers pour annoncer la paix civile voulue par le roi.
— S’il y a quelqu’un parmi vous qui ait forfait envers Monseigneur le roi, tout lui est pardonné. Tant aux absents qu’aux présents.
La souveraine indulgence jette son voile d’oubli sur les années écoulées, les collaborateurs de l’occupant – ceux que l’on appelle les « Français reniés » – sont définitivement amnistiés. Charles VII reconstruit son royaume sur la clémence.
Cependant, sa générosité a des limites. Pendant tous ces événements, il n’a pas quitté Bourges. Il consent bien à recevoir une délégation parisienne venue l’implorer de revenir au plus vite dans la capitale traditionnelle des rois de France. Le souverain écoute et ne dit mot. En fait, il n’a aucune envie de retrouver une ville qui réveille en lui tant d’affreux souvenirs, qu’il a jadis dû fuir honteusement et qu’il juge dans son for intérieur définitivement déloyale à la couronne.
Mais bon, Paris reste Paris… Après avoir atermoyé durant un an et demi, Charles VII fait enfin son entrée solennelle à Paris le 12 novembre 1437. En cette exceptionnelle occasion, pour célébrer ces retrouvailles si longtemps espérées par les Parisiens, pour glorifier l’union du souverain avec sa capitale historique, les cloches des églises sonnent à toute volée, des fleurs jonchent les rues, des oriflammes pendent aux fenêtres et des foules joyeuses se pressent sur le passage du flamboyant cortège.
Au son des trompes, huit cents archers et arbalétriers pénètrent dans la ville, annonçant l’arrivée de Charles VII. Celui-ci apparaît alors vêtu d’une longue cape d’azur et d’or jetée sur son armure, monté sur un palefroi blanc caparaçonné d’un velours bleu constellé de fleurs de lys. Déclenchant la liesse populaire sur son passage, il accueille d’un timide salut de la main les cris de tout un peuple avide de découvrir son souverain après une si longue attente.
Mais le roi ne reste pas longtemps : trois semaines plus tard, trop heureux de quitter Paris, Charles VII s’en retourne à Bourges. De là, il continue à organiser la guerre qui finira par bouter l’Anglais hors du royaume de France…
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Son successeur, Louis XI, se tient lui aussi très à l’écart de Paris, mais il a conscience de l’importance stratégique de la ville. Il faut la surveiller de près, tel est le rôle dévolu au château de Vincennes. Après la mort du roi d’Angleterre Henri V dans le donjon, la tour est désertée. Peut-être rappelle-t-elle un peu trop l’occupation anglaise et les prétentions du Plantagenêt sur les territoires de France. Désormais, ce donjon sert de prison. Louis XI, malgré son aspect rugueux d’affairiste, préfère un confort moins austère… En 1470, il se fait construire dans l’angle sud-ouest de l’enceinte un coquet pavillon de plain-pied. Il relance également le chantier de la chapelle du château, sublime témoignage de l’architecture de la
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