Métronome
destinés aux touristes d’il y a cent ans mentionnaient encore cette crypte. Et puis, elle fut englobée dans les caves du bâtiment qui s’éleva. Ce qui reste de la première cathédrale de Paris reste caché sous le parking, partie intégrante de la copropriété qui maintient les lieux en l’état, mais réserve la visite de ce trésor à quelques privilégiés. Situation absurde : ce témoignage unique des premiers chrétiens de Paris survit par la bonne volonté de quelques particuliers ! L’histoire de cet endroit est pourtant si riche…
La cathédrale clandestine a fait place à un oratoire au VII e siècle, à une église cent ans plus tard, puis à un prieuré au XII e siècle. Enfin, au début du XVII e siècle, les Carmélites de Notre-Dame-des-Champs s’installèrent en ces lieux. La fureur révolutionnaire ravagea le couvent, mais la crypte de Saint-Denis, bien cachée dans les profondeurs, échappa à la destruction. En 1802, quand les sœurs rachetèrent la parcelle de terrain surplombant la crypte, elles la dégagèrent et bâtirent un nouvel ensemble conventuel. Ces bâtiments furent démolis lors de la fermeture définitive du couvent en 1908.
De cette longue histoire, il reste aujourd’hui quelques éléments épars et discrets :
— Le portail de pierre d’une entrée du couvent, conservé mais inséré dans un magasin qui fait le rez-de-chaussée de l’immeuble moderne du 284, rue Saint-Jacques.
— Un petit oratoire enfermé dans les jardins privés du 37, rue Pierre-Nicole.
— Et, bien sûr, la crypte située sous le parking de l’immeuble du 14 bis, rue Pierre-Nicole, avec quelques fragments des murs du couvent pris en surface dans la construction nouvelle.
Pour retrouver l’esprit des premiers chrétiens de Paris, mieux vaut se rendre dans les catacombes, dont l’entrée se situe place Denfert-Rochereau. Vous pénétrez ici dans les profondeurs de la plus grande nécropole parisienne, tout comme le faisait saint Denis.
À l’époque du saint, la nécropole occupait, sous le cardo maximus , l’espace laissé par d’anciennes carrières… Ce lieu était celui des disparus, idéal pour saint Denis et les autres chrétiens pour qui la mort n’est qu’un passage vers le royaume de Dieu avant la résurrection. Car les corps se reposent au royaume des ombres : catacombe ne vient-il pas du latin cumbere , qui signifie « se reposer » ? Cet endroit, que l’on appelait « fief des tombes », a laissé un souvenir durable : une inscription « FDT » (fief des tombes) au 163 bis, rue Saint-Jacques, nous le rappelle.
La nécropole que l’on peut visiter n’a été créée qu’en 1785 par mesure d’hygiène, elle était alors en périphérie de la ville et devait recueillir les ossements des églises de la capitale. Les restes de six millions de personnes y ont été transportés, et la visite est impressionnante. Fouquet, Robespierre, Mansart, Marat, Rabelais, Lully, Perrault, Danton, Pascal, Montesquieu et tant d’autres nous observent…
Mais revenons en arrière. Le chemin qui nous a conduit à l’entrée de l’ossuaire n’est autre que le soubassement de l’antique aqueduc romain apportant l’eau d’Arcueil. Ce chemin nous invite à retourner à l’époque romaine et à saint Denis priant dans la clandestinité et l’obscurité…
Un jour de l’an 257, des légionnaires déboulent dans la petite cathédrale des profondeurs. Ils viennent arrêter ceux qui annoncent la résurrection du Christ : Denis, Rusticus et Éleutherius. Ces agitateurs doivent cesser de fomenter des troubles ! À force de répéter que les idoles de pierre ne sont pas les vraies puissances de l’univers, ces rebelles ébranlent l’esprit des plus forts. Si on laisse parler ces provocateurs, c’est tout un ordre social qui risque d’être bouleversé… Les trois hommes sont immédiatement conduits devant le préfet Sisinnius Fesceninus, représentant à Lutèce de l’empereur Valérien. Le préfet, comme son maître à Rome, ne supporte pas le désordre engendré par les chrétiens.
Au temps du paganisme, l’empereur est objet de vénération et les chrétiens qui ne pratiquent pas ce culte de la personne impériale sont persécutés. Pour eux, il faut rendre à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu. Les chrétiens ne s’intéressent pas au temporel, c’est le céleste qui les préoccupe. Du coup, pour l’empereur, ils sont
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