Métronome
confort. Rien de grand ne se ferait sans les bains publics ! Lutèce compte trois établissements. Deux relativement petits : l’un au sud, un autre à l’est, à l’emplacement actuel du Collège de France et qui se prolonge sous notre rue de Lanneau…
Où peut-on voir les thermes anciens ?
La cave voûtée du restaurant Le Coupe-Chou est un vestige émouvant de ces thermes du II e siècle, la plus vieille cave de Paris ! Au cours de travaux, on y a découvert de précieux témoignages : notamment, des conduites d’eau chaude et une piscine gallo-romaine.
Mais l'établissement de bains le plus important, qui date lui aussi de la fin du II e siècle, sont les thermes de Cluny, que l’on connaît encore. On devrait peut-être lui conserver son nom d’origine : les thermes du Nord.
Ouverts à tous gratuitement, ces thermes constituent un espace de détente, de loisir, un point de rencontre, un lieu d’hygiène. Tout est fait ici pour le bien-être du citoyen : mosaïques, marbre et fresques agrémentent les murs de scènes colorées qui évoquent la mer… Après un peu d’exercice, on passe de la salle tiède, le tepidarium , à la salle chaude, le caldarium , puis à la salle froide, le frigidarium , et enfin à la salle de repos où l’on se retrouve entre amis pour passer un moment convivial et bavarder un peu.
Qui fit construire les thermes de Cluny ?
Ces thermes sont évidemment d’influence romaine. On aurait tort, pourtant, d’y voir une pure implantation de l’occupant sur une population béate. Les Parisii ont eux-mêmes participé à la construction de cet édifice qui a défié le temps. Une décoration du frigidarium nous expose des bateaux chargés d’armes et de marchandises… Cette manière de signer l’œuvre montre que la puissante corporation des nautes a collaboré aux travaux. Ces hommes qui régentent alors le commerce fluvial et font un peu office de Conseil municipal n’ont pas voulu laisser aux seuls Romains le bénéfice de l’érection d’un aussi prestigieux ensemble. Les Parisii étaient conscients de la nécessité de prendre leur destin en main et d’organiser, eux aussi, la construction et la gestion de la ville. C’est sans doute à cette vitalité que Lutèce doit d’être devenue Paris.
En dépit de l’implication gauloise, l’architecture urbaine reste typiquement romaine. Des rues rectilignes se coupent à angle droit et dessinent des étendues où se succèdent les villas patriciennes et les espaces publics. La voie principale de cette Lutèce romaine est le cardo maximus . Il traverse la ville haute de part en part et mène aussi, par un petit pont, vers la ville basse 1 . C’est le nerf de l’agglomération, l’artère qui la nourrit et lui donne la vie. Tout ce qui va à Lutèce passe par le cardo , tout ce qui part de Lutèce passe par le cardo . Cette voie apprend aux Parisii comment une ville se construit. Et la leçon ne sera pas perdue quand il faudra, plus tard, organiser une cité agrandie.
Le long de cette route se trouvent les deux ateliers de potiers qui alimentent Lutèce. Bien situés, entre ville et campagne, sur une voie passante, ces artisans peuvent fournir les riches boutiques de la cité, les paysans des campagnes environnantes et même éventuellement le voyageur égaré là.
En empruntant le cardo maximus , on grimpe sur ce qui sera la montagne Sainte-Geneviève. Ici se situe l’épicentre de la ville : le forum. Il s’agit d’une vaste esplanade entourée d’un portique à colonnes. Ici on vit, ici on parle, ici on s’affronte en joutes verbales toujours recommencées. Le mur d’enceinte est bordé sur deux côtés par une galerie couverte où se succèdent des boutiques. Et les Lutéciennes, qui n’ont pas changé, viennent « faire les magasins » pour se fournir en onguents délicats, en huile d’olive ou en fibules plus fines et plus brillantes que celles de la voisine.
Pour établir ce précieux cœur de Lutèce, les constructeurs n’y sont pas allés de main morte : ils ont arasé la colline afin d’obtenir des pentes plus douces et des formes plus gracieuses. Grands bâtisseurs, les Romains n’hésitent jamais à redessiner la nature selon les besoins d’une urbanisation bien pensée. On imagine sans peine la stupéfaction des Parisii devant ces travaux qui doivent leur paraître à la fois titanesques et mystérieux. Eux qui ont vécu si longtemps soumis à la nature, dans des villes fragiles
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