Métronome
et modestes, dans des cités aisément détruites, regardent maintenant d’un œil émerveillé ces Romains édifier pour les siècles à venir. Les Parisii ne savent pas encore que leur ville se bâtit pour l’éternité.
Où se situaient le cardo maximus et le forum ?
Le cardo , c’est aujourd’hui la rue Saint-Jacques. Il se prolonge rive droite par la rue Saint-Martin. On dit que cette voie a été tracée sur le chemin que prenaient les mammouths pour descendre des collines quand ils voulaient aller boire les eaux de la Seine. Belle légende sans doute, mais il y avait une route à cet endroit bien avant les Romains, bien avant Lutèce, une route qui venait d’Espagne et conduisait jusqu’à la mer du Nord.
Les dalles romaines de la rue Saint-Jacques ont disparu, mais devant l’église Saint-Julien-le-Pauvre, au carrefour entre la voie romaine d’Italie et le cardo axial de Saint-Jacques, une dalle antique a été déposée juste derrière le vieux puits à margelle qui précède le portail. Voilà le reste de la plus vieille route de Paris !
Au fait, juste à côté, dans le square Viviani, vous trouverez le plus vieil arbre de la capitale, un robinier originaire d’Amérique du Nord planté en 1602 par le botaniste Jean Robin, qui lui a donné son nom. Cet arbre semble encore vert, mais ne vous y fiez pas trop : le premier niveau de feuilles n’est que du lierre qui grimpe sur une étrange structure en béton destinée à soutenir le vénérable robinier.
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1 Les fondations en bois de ce premier pont romain ont miraculeusement été retrouvées dans le lit de la Seine et sont visibles dans les réserves de Carnavalet, rue Truffaut.
Plus loin, sur l’ancien cardo , au 254 de la rue Saint-Jacques, reste un four de potier ; vestige miraculeusement sauvegardé d’un artisan établi en bordure de la grande voie, version antique de nos zones industrielles.
Par ailleurs, sur la place de la Sorbonne, une niche circulaire rompt la symétrie du bassin : c’est le vestige d’un puits appartenant à deux insulae (hautes maisons romaines).
Quant au forum, il subira aussi, hélas, les exigences des hommes et des époques. Son souvenir repose aujourd’hui au 61, boulevard Saint-Michel, dans l’accès au parking Vinci : un morceau du mur d’enceinte de ce forum a été conservé… Maigre consolation.
En revanche, non loin de là, au 36 de la rue de Vaugirard, dans la cour, vous aurez l’agréable surprise de vous retrouver nez à nez avec un magnifique four romain exhumé près du Luxembourg et entreposé ici.
III e siècle
NOTRE-DAME-DES-CHAMPS
Le martyre de saint Denis
Notre-Dame-des-Champs : l’escalator de la bouche de métro dégorge ses voyageurs au beau milieu du boulevard Raspail, et les piétons n’ont d’autre choix que d’interrompre la circulation pour tenter de regagner la quiétude d’un trottoir. Je viens chercher ici le souvenir de la Lutèce antique, mais rien autour de moi ne semble l’évoquer. En face, dans un petit square rachitique, se dresse la statue du capitaine Dreyfus, cet officier juif accusé à tort d’espionnage à la fin du XIX e siècle. Un peu plus loin, à Montparnasse, l’église Notre-Dame-des-Champs se drape dans sa façade rococo fin de siècle, témoignage de la foi qui animait les bourgeois du second Empire.
En ces lieux un peu excentrés de la ville des origines, nous entrons dans le domaine vaporeux de la légende et de la mystique. Tout est dissimulé aux yeux de celui qui cherche des traces et réclame des gages ; il faut y pénétrer dans le souffle léger du credo et de la crédulité.
Au milieu du III e siècle, Lutèce est devenue une cité importante, assez importante du moins pour que des chrétiens puissent songer à venir évangéliser la population. Car ici on adore Toutatis et Jupiter, dieux gaulois et dieux romains se mêlent sur les mêmes autels.
Or en Italie, un évêque énergique, un certain Dionysius – celui que nous appelons Denis – brûle d’une ferveur inextinguible pour le Christ. Il veut répandre la vraie foi, étendre la religion du Dieu crucifié et sauver les âmes égarées dans le paganisme. Humblement, il se rend aux pieds de l’évêque de Rome, successeur de saint Pierre, afin d’implorer une mission de catéchisation… Mais le prélat a bien d’autres soucis : il est avant tout préoccupé de maintenir une survie chrétienne locale en dépit des persécutions. La diffusion de la bonne
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