Métronome
incroyable, inattendue, allie en une même ferveur militaire ceux qui se faisaient la guerre jadis. Elle avance et vient bousculer les Huns à l’ouest de Troyes. Terrible choc, qui commence dans l’après-midi et se prolonge jusqu’au milieu de la nuit…
Au matin, Attila et ses hommes se sont repliés dans leur camp, la peur est passée de leur côté. Un grand feu est allumé, le roi des Huns promet de s’y jeter si le Romain veut le faire prisonnier. Attila parvient à éviter une telle extrémité : sagement, Ætius ne force pas la victoire, il se contente d’observer la retraite de l’ennemi et le guette longtemps à travers les plaines, jusqu’à ce que les Huns pénètrent dans la vallée du Danube.
À Paris, la victoire est attribuée à Geneviève, elle a sauvé la ville et toute la Gaule ! Comment lui refuser alors les efforts qu’elle réclame ? Elle demande que l’on construise une basilique à l’endroit où saint Denis s’est effondré, sa tête tranchée tenue entre ses mains. Elle fait lever un impôt spécial pour réaliser ce projet, établit les fours à chaux nécessaires à la construction et suit avec attention l’édification du bâtiment. C’est qu’il s’agit bien plus que d’une simple basilique ! Le culte rendu à saint Denis, dont Geneviève est la grande prêtresse, a pour objectif premier d’ancrer les citoyens parisiens dans la foi catholique. Avec ses compagnes diaconesses, Geneviève parcourt le chantier. Elle vient inspecter les travaux de nuit, à la lumière d’une chandelle tenue par l’une des pieuses jeunes filles. Si le vent fripon souffle malencontreusement la flamme, Geneviève prend la bougie en main. Alors la mèche se rallume aussitôt, et quand la bougie est tenue par la sainte femme, elle ne s’éteint plus, malgré les bourrasques diaboliques.
L’actuelle crypte de Saint-Denis correspond globalement à cette basilique primitive élevée du temps de la sainte.
Paris vit sa propre histoire, modeste encore, réduite aux dimensions d’une sainte que l’on vénère. Une sainte, en effet, car on lui attribue déjà des miracles : elle aurait jadis rendu la vue à sa mère en lui appliquant sur les yeux une eau bénie par elle-même, elle aurait rendu la santé à douze malheureux possédés par le démon, elle aurait ressuscité un petit garçon tué par une chute dans un puits…
Et pendant que Paris frissonne en répétant les merveilles accomplies par sa sainte, les grands événements de l’Histoire se déroulent ailleurs. À Ravenne, dont il a fait sa capitale, Valentinien, l’empereur romain d’Occident, enrage : en Gaule, Ætius lui dérobe une part de sa gloire ; ce généralissime à qui tout réussit pourrait briguer le trône pour lui ou son fils. Il faut le faire disparaître, trancher cette racine qui pousse et s’impose. Le 21 septembre 454, Valentinien, qui reçoit en son palais le triomphateur de la Gaule, se jette sur son visiteur et le poignarde. Geste fou, faute politique et militaire, mais dictée par le plus puissant des sentiments : la jalousie.
Les peuples de la Gaule pleurent Ætius, surnommé désormais « le dernier des Romains ». Et c’est vrai, le crime de Ravenne précipite la fin inéluctable de l’empire.
Il faudra à peine plus de vingt ans pour que tout s’effondre et qu’un autre monde émerge…
Le 4 septembre 476, l’ultime empereur d’Occident, Flavius Augustule, se voit contraint d’abdiquer, vaincu par Odoacre, chef germanique. La gloire romaine survit ailleurs grâce à Zénon, empereur d’Orient. Odoacre se pare du titre de « roi en Italie » pendant que le Sénat romain, dans un dernier geste, adresse à Constantinople sa soumission et lui envoie les insignes impériaux. L’Empire romain d’Occident a cessé d’exister.
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Paris n’est plus ville d’empire, Paris n’est plus citadelle de la force romaine, Paris entre dans des temps nouveaux que l’on appellera le Moyen Âge.
Paris ne peut compter que sur lui-même pour se défendre, Paris est à prendre. Mais par qui ? La situation en Gaule devient singulièrement embrouillée. Childéric, le roi franc qui règne à Tournai, dans le nord, se soumet à Odoacre, roi en Italie. De son côté, Syagrius, dernier général romain responsable de la Gaule, prétend perpétuer la loi de l’empire défunt. Les Wisigoths, quant à eux, dominent en Aquitaine, alors que les Burgondes rêvent d’étendre leur royaume
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