Métronome
parisienne.
Le roi mérovingien, qui se considère comme le bras séculier de l’Église, veut pour son prélat une cathédrale à la mesure de la capitale. Pour bien montrer son attachement et sa soumission, Childebert se met en tête de faire construire un édifice splendide inspiré par la basilique Saint-Pierre de Rome.
À la pointe orientale de l’île de la Cité, se trouvait à l’époque romaine un monument à Jupiter, dont les vestiges sont conservés au musée de Cluny. Avec la chrétienté triomphante, il est juste et bon que le vieux temple ruiné soit remplacé par le plus beau des sanctuaires. Puisque la paix chrétienne a succédé à la paix romaine, le bâtiment nouveau doit s’ancrer sur les anciens remparts romains. Ce détournement des vieux murs sera le signe tangible, visible, solide, du pouvoir militaire romain supplanté par un pouvoir spirituel plus puissant encore.
C’est ainsi que s’élève la basilique Saint-Étienne, un monument imposant : cinq nefs, soixante-dix mètres de long, trente-six de large, la plus grande église du royaume. Les curieux en trouveront le dessin sur le parvis de Notre-Dame. Quant aux fondations du mur sud, appuyées sur les murailles romaines, on les trouve dans la crypte archéologique du parvis de Notre-Dame.
À l’époque, une cathédrale n’est jamais conçue comme un édifice isolé ; elle forme au contraire une réunion de plusieurs lieux de culte. On adjoint donc à Saint-Étienne un baptistère, placé très logiquement sous l’invocation de saint Jean-Baptiste, et une église Notre-Dame, déjà ! Ce groupe épiscopal constitue le siège imposant de l’évêque Germain. À en croire ses ouailles, le prélat n’a de cesse de puiser dans la cassette royale pour faire la charité ; il enlève même quelquefois le pain de la bouche de ses moines pour le donner à quelque malheureux de passage. Les frères enragent, mais n’osent rien dire à un saint capable de miracles. Car, murmure-t-on, Germain guérit les malades et les infirmes, délivre les possédés, ressuscite des morts…
Comment Notre-Dame remplaça-t-elle Saint-Étienne ?
En 1160, Maurice de Sully, évêque de Paris, décida la construction d’une unique cathédrale, plus grande et plus belle que Saint-Étienne et l’ancienne Notre-Dame réunies. Saint-Étienne faisait soixante-dix mètres de long, la nouvelle construction en fera plus de cent vingt.
Les travaux furent gigantesques et durèrent cent sept ans, d’où l’expression « attendre cent sept ans » (et d’où le numéro de cette page… joli hasard, non ?). On dit qu’un artisan parisien, nommé Biscomet, fut chargé d’habiller les vantaux des portes de ferronneries et autres serrures. Devant l’enjeu de la tâche, il invoqua le Diable pour le soutenir ; et l’esprit du Mal l’aida si bien qu’il fallut avoir recours à de l’eau bénite pour faire fonctionner les clés ! Mais le travail du métal avait été si particulier qu’aujourd’hui encore, paraît-il, les spécialistes n’expliquent pas la manière dont ont été ouvragées ces fameuses ferronneries encore visibles sur les portes de la façade principale. Hélas, Biscomet mourut peu de temps après l’accomplissement de son œuvre, et il emporta son secret dans la tombe.
En traversant les siècles, la cathédrale a été profondément remaniée, et c’est une chance qu’elle soit encore debout : les soubresauts de l’Histoire l’ont souvent menacée. Condamnée par les Révolutionnaires, elle échappa de justesse à la démolition. Un peu plus tard, le sacre de Napoléon se fit à Notre-Dame, mais il se révéla nécessaire de tendre de nombreuses tapisseries sur les murs afin de dissimuler l’état déplorable de l’édifice.
En 1831, avec son roman Notre-Dame de Paris, Victor Hugo réveilla les consciences du gouvernement et de l’opinion publique. Désormais, tout le monde était d’accord : la cathédrale devait être sauvée ! L’architecte Eugène Viollet-le-Duc, spécialiste des reconstructions et des reconstitutions, se chargea de la restauration. Le chantier dura près de vingt ans et tenta, tant bien que mal, de rendre à l’édifice son aspect médiéval.
Il fallut notamment reconstituer la galerie des rois, qui s’étend sur toute la façade au-dessus des trois portails. Vingt-huit statues de rois de Judas et d’Israël représentaient les ancêtres traditionnels du Christ, mais sous la Révolution on
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