Métronome
méridionales.
Et ça recommence ! Ses trois frères, Chilpéric, Sigebert et Gontran, se disputent âprement l’héritage, pour finalement s’entendre sur un découpage à peu près équilibré. Mais demeure la question cruciale de Paris, que chacun prétend mériter mieux que les autres. Ah, Paris, la vraie capitale du royaume franc ! Celui qui possédera cette ville sera évidemment un peu plus roi que les autres. Aucun des frères ne veut céder, alors ils se concèdent une autorité commune sur l’agglomération : les revenus fiscaux seront partagés en trois, et nul d’entre les frères ne pourra entrer dans la ville sans le consentement des deux autres. Un triple serment solennel, prêté sur les reliques de saint Martin, saint Hilaire et saint Polyeucte, entérine cet accord. Alors, trois rois pour Paris ?
Pendant dix-sept ans, on ne sait pas exactement qui règne sur la ville, mais les habitants s’en portent bien. Car on s’étripe gaillardement en des luttes fratricides, mais ailleurs. Alors que Sigebert est occupé à repousser les Barbares de l’Est, Chilpéric en profite pour voler Reims à son frère absent. Rentré en ses États, Sigebert reprend sa ville et, en manière de rétorsion, dérobe à son tour Soissons. Une nouvelle irruption des Barbares rappelle Sigebert au-delà du Rhin, mais ce roi est fait prisonnier au cours de l’affrontement. Finalement, après versement d’une belle rançon, le prisonnier est libéré. Cet intermède a donné quelque espoir au perfide Chilpéric, qui reprend la guerre contre son frère. Encerclé à Tournai, Chilpéric va être vaincu. Son seul espoir réside dans une débandade des troupes ennemies… Pour obtenir ce prodige, il faut faire assassiner son frère Sigebert ! La mort du chef provoquera l’effroi dans les rangs de ses soldats. Le vaincu cherche dans la fourberie et le crime la victoire que le sort des armes lui refuse.
En ce mois de décembre 575, deux sbires surprennent donc Sigebert à Vitry-en-Artois, et lui enfoncent dans la poitrine leur scramasaxe, petit sabre à la lame droite trempée dans du poison, arme privilégiée des Mérovingiens et de leurs hommes de main.
— Voici ce que dit le Seigneur par la bouche de Salomon : celui qui aura creusé une fosse à son frère y tombera lui-même, gronde Germain.
Effectivement – mais près de dix ans plus tard –, Chilpéric meurt assassiné à son tour, poignardé après une partie de chasse par un inconnu qui parvient à s’enfuir.
Gontran, le frère survivant, devenu seul roi des Francs en 584, est un personnage comme l’époque les aime : onctueux et violent, cauteleux et brutal. Il est féru de religion, dévot à souhait, le peuple lui attribue des guérisons miraculeuses et les évêques l’appellent saint Gontran, ce qui est bien le comble de la flagornerie !
Mais enfin, il règne avec intelligence et, pour éviter de se faire éventrer par ses neveux, pour empêcher sa famille de s’exterminer, il convoque à Paris une assemblée des Grands. L’agressivité des siens, il la détourne subtilement sur un ennemi bien désigné : les Wisigoths. La guerre menée contre ce peuple qui règne sur le Languedoc se révèle vaine et sans succès, mais peu importe, elle préserve momentanément la dynastie mérovingienne des complots assassins.
Gontran meurt en 593 à l’âge de soixante-huit ans. Il s’éteint paisiblement dans son lit, ce qui n’est pas tellement courant dans la famille. Il ne laisse qu’une fille, qui s’empresse de se faire religieuse, et le royaume se trouve partagé entre le fils de Sigebert, Childebert II, roi d’Austrasie, à l’est, et le fils de Chilpéric, le jeune Clotaire II, âgé de neuf ans, roi de Neustrie, à l’ouest.
En 613, les meurtres et les maladies ont éclairci les rangs de la famille, aussi Clotaire II parvient-il à grouper sous sa seule autorité le royaume des Francs, mais c’est un royaume déchiré entre la Neustrie, l’Austrasie et la Bourgogne. Est-ce pour cela qu’il ne réside pas dans Paris, et lui préfère son palais de Clichy, au nord-ouest de l’île de la Cité ?
N’empêche : c’est bien à Paris qu’il convoque un grand concile destiné à réorganiser le clergé et le royaume. En octobre 614, soixante-dix évêques et tout ce que le pays compte d’officiers et de nobles se réunissent autour du tombeau de Clovis en l’église Saint-Pierre-et-Saint-Paul. Clotaire II s’efforce de
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