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Métronome

Métronome

Titel: Métronome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lorànt Deutsch
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simplement que Paris déjà s’impose comme capitale d’un grand royaume qui prend forme.

Mais Clotaire n’est plus un jeune homme. Il a dépassé la soixantaine, il est usé par ses nombreuses campagnes militaires et ses six femmes épousées successivement ou concomitamment – le mariage n’est pas encore considéré par l’Église comme un sacrement, en conséquence il peut facilement être dissous et la polygamie est une tradition bien ancrée dans les familles royales. Clotaire ne règne que trois ans et meurt en 561, stupéfait de constater que Dieu refuse d’offrir l’immortalité à un monarque aussi considérable que lui.
    — Hélas ! Quel est donc ce roi du Ciel qui fait mourir ainsi les plus puissants rois de la Terre ? demande-t-il avant de fermer les yeux.
    Pendant que le corps du monarque est transporté à Soissons, Chilpéric, le plus jeune des quatre fils du défunt, tente par un coup de force de dérober le royaume franc à son seul profit. Il s’approprie le trésor paternel et court au palais de la Cité distribuer des poignées de pièces d’or aux ministres et fonctionnaires. La cour, éblouie par la générosité du jeune homme, n’hésite pas à le célébrer comme seul roi légitime.
    Quand on connaît la mentalité tordue et la férocité effrénée des Mérovingiens, on imagine bien que les trois frères lésés ne vont pas rester les bras croisés à assister au triomphe de l’usurpateur ! Avec leurs troupes, ils marchent sur Paris et font rapidement déguerpir le souverain autoproclamé. Après quelques disputes et criailleries, les quatre frères tirent au sort la part de chacun… À Gontran échoit la Bourgogne et Orléans ; à Sigebert, l’Austrasie jusqu’au Rhin ; à Chilpéric, la Neustrie avec sa capitale Soissons. Caribert, lui, hérite de Paris avec tout l’ouest de la Gaule.
    *
    * *
    Avec Caribert, Paris trouve un roi pacifique et mesuré, un ami des arts, un défenseur de la justice, aux mœurs quelque peu dissolues, certes, mais tout de même respecté de tous. En cette année 561, la capitale du royaume n’a pas beaucoup changé depuis deux siècles. Sur la rive gauche, un entrelacs de ruelles conduit au forum, aux thermes et aux arènes qui, désormais inutiles, se dégradent lentement avant de sombrer bientôt dans l’indifférence et l’oubli. En fait, ce qui change vraiment dans Paris, ce sont les nombreux églises, cathédrales, monastères, oratoires, sanctuaires qui sont élevés sur l’île de la Cité et sur les deux rives du fleuve. Il y en a partout. Certains lieux de culte sont érigés à la hâte, avec quelques planches de bois, mais la plupart dressent vers le ciel de la capitale leur orgueilleuse flèche de pierre. Et c’est encore sur l’île de la Cité que s’enracine, autour de Saint-Étienne, le palais de l’évêque, siège de l’autorité de l’Église. Paris se fait chrétien avec ostentation.
    Il faut dire que les pieux bâtisseurs ont tout loisir de construire leurs églises et leur palais : sous l’autorité de Caribert, point de chevauchées victorieuses et de complots retors. L’époque est à la quiétude. D’ailleurs, où le roi trouverait-il le temps de faire la guerre ? Il est entièrement occupé à lutiner le moindre jupon qui passe à sa portée ! Mais enfin, mieux vaut sans doute vivre sous le règne d’un monarque débauché que sous celui d’un maître belliqueux…
    Cet attrait un peu trop marqué pour les petites femmes de Paris n’est cependant pas du goût du clergé. Les prélats réunis reprochent au roi, avec véhémence, ses concubines, et surtout son mariage avec la sœur d’une de ses épouses, ce qui est alors considéré comme un inceste par le droit canon. Lorsqu’une épidémie, qui vient ravager la population parisienne, démontre aux yeux de tous le courroux céleste, Germain, toujours évêque de Paris, lance sur la tête du roi la terrible malédiction de l’excommunication. Caribert apaise ses vertueux contempteurs en renonçant à son épouse. Le roi se marie alors avec une sainte femme qui fait l’unanimité. Cela dit, cette fureur d’épousailles n’est pas une tocade de coureur de jupons : Caribert n’a que des filles, aussi espère-t-il engendrer un garçon, un futur roi qui régnerait sur Paris.

Malheureusement, ces beaux efforts ne seront pas récompensés. Il rend à Dieu son âme dévoyée en 567 près de Bordeaux, au cours d’une visite à ses possessions

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