Meurtres dans le sanctuaire
attendent vos réponses.
Newington intervint.
— Asseyez-vous, Matthew ! ordonna-t-il. Je crois pouvoir répondra à cette dernière question au nom de tous, sauf en celui de Maître Cotterell.
Le magistrat resserra les pans de sa robe autour de lui avant de poursuivre :
— J’ai perdu ma femme, la mère de Marisa, il y a huit ans. L’année suivante, une épidémie de mal de la sueur a tué les deux parents de Maître Straunge.
— Moi aussi, j’ai subi des deuils, intervint précipitamment Chaddedon. Mon épouse, qui ne s’est jamais remise de ses couches, après la naissance de notre fille unique, est décédée trois ans plus tard ; huit mois après, ma propre mère mourait.
Kathryn ferma les yeux. Il lui semblait qu’elle se mêlait maintenant de choses qui ne la concernaient pas.
— Maître Cotterell, vous n’avez pas répondu à ma question, fit observer Colum, rompant le silence qui s’était établi.
Le gros médecin soutint le regard de l’Irlandais, ses yeux brillants de larmes contenues.
— Naguère, quand survenait la peste, elle emportait toujours les vieux, dit-il enfin. Je suis comme mes confrères. J’ai perdu ma mère et sa soeur lors d’une épidémie. Un jour, les deux femmes se rendirent au marché ensemble ; le lendemain, couchées sur leur lit de mort, elles rendaient l’âme.
Il se leva et s’en fut remplir sa coupe de vin.
— J’ai dit ce que j’avais à dire, conclut-il. Tout le monde lui fit écho, et Kathryn lança un rapide regard à Colum : inutile d’interroger davantage leurs hôtes, au risque de les indisposer à leur endroit, lui signifiait-elle tacitement. Se levant aussitôt, Colum étendit les mains devant lui et déclara :
— Eh bien, notre tâche est terminée. Pardonnez-nous si nous avons heurté certains d’entre vous, ce n’était pas intentionnel.
Il huma les savoureuses odeurs qui parvenaient de l’entrée et reprit :
— Vous avez raison, Maître Darryl, moi aussi, j’ai faim. Mon estomac crie famine. Tout le monde se leva. Cependant, bien que chacun approuvât ce qu’avait dit Colum, Kathryn sentait l’hostilité générale. Darryl prit la tête de la petite troupe pour l’entraîner hors de la salle dans un passage conduisant au jardin. Celui-ci était magnifique, éclairé par des torches et de grosses bougies en cire d’abeille dont les flammes étaient protégées par des calottes de métal. Leur lumière baignait une grande étendue d’herbe tondue qui descendait jusqu’à des plates-bandes surélevées garnies de fleurs et de plantes médicinales. Le parfum des roses et d’autres fleurs odorantes embaumait.
L’épouse de Cotterell et celle de Darryl bavardaient tranquillement sur un banc de bois, surveillant en même temps trois enfants qui se poursuivaient dans les allées pavées entre les parterres.
— Vous avez terminé vos affaires ? demanda la femme de Cotterell avec un sourire malicieux. Autant que faire se peut, rétorqua Newington. Les serviteurs peuvent servir, annonça Darryl. Marisa, dites aux servantes de coucher les enfants.
Kathryn, qui voulait se soustraire à l’hostilité de ses confrères, tendit sa coupe de vin à Colum et demanda :
— À qui sont-ils ?
Les deux garçons sont mes fils, répondit Darryl, et Chaddedon est le père de Marie, la petite fille.
— Je vais m’entretenir un moment avec eux, reprit Kathryn. Je les ferai rentrer.
Elle traversa vivement l’étendue d’herbe, remuant son cou et ses épaules pour les soulager, après la tension de la séance, un peu plus tôt.
La voyant approcher, les enfants avaient cessé de jouer pour la dévisager. Kathryn s’accroupit au bout d’une allée. La petite fille, presque encore un bébé, était adorable avec ses boucles blondes et son joli petit visage. Quant aux garçons, bruns tous les deux, ils fixaient la nouvelle venue avec un air buté, serrant dans leurs menottes de petites épées de bois.
— Il est l’heure de rentrer, dit doucement Kathryn.
— Qui es-tu ? demanda l’un des garçonnets.
— Je m’appelle Kathryn. Kathryn Swinbrooke.
— Et tu es docteur ?
— Oui, c’est ce que je suis.
Kathryn tendit la main à la petite fille qui la saisit et lui sourit, toute timide.
— Et toi, tu es Marie ? L’enfant hocha la tête.
Le garçonnet reprit la parole.
— Grand-père nous a parlé de toi. Il dit que tu es un bon docteur, mais que tu poses des questions sottes.
Kathryn
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