Meurtres Sur Le Palatin
vie, je... Je suis arrivé à Rome il y a un mois à peine. Malah l'a trouvé là
en faisant sa ronde nocturne et je lui ai ordonné de prévenir les autorités
compétentes. Je... Je ne sais rien de plus, centurion.
Kaeso
essuya son visage moite d'un revers de la main et tira brutalement le rideau de
la litière pour sortir.
-
Je dois parler à ton esclave.
Apollonius
acquiesça sans oser relever la tête pour le regarder en face.
-
Bien sûr. Je... je comprends. Malah ! appela-t-il d'une voix étranglée. Malah !
Le
géant noir apparut aussitôt.
-
Maître ? Est-ce que ça va ? demanda-t-il avec un regard dépité, inquiet de voir
Apollonius recroquevillé contre le rideau du fond.
-
Le centurion souhaite te parler, Malah. Suis-le et rejoins-moi à la maison
lorsqu'il en aura fini avec toi.
-
Bien, maître, répondit l'esclave en jetant un regard à la fois interrogateur et
accusateur au prétorien.
-
En route, vous autres ! ordonna encore Apollonius aux porteurs en détournant le
visage, qu'il essuyait discrètement d'un pan de sa tunique. On rentre !
Le
géant referma la litière et s'éloigna sous le soleil encore cuisant de la fin de
l'après-midi.
-
Tu as fait pleurer mon maître, centurion, murmura-t-il en ravalant sa rage à
grand-peine. Pourquoi ?
-
Ici, c'est moi qui pose les questions ! Avance ! Le prétorien désigna du doigt
l'entrée de la caserne et l'esclave obéit à contrecoeur.
Matticus
passa la main sur ses cheveux coupés à ras et jeta un regard contrarié aux deux
jeunes prétoriens qui venaient de lui faire leur rapport.
L'un
d'entre eux, un grand garçon aux immenses yeux marron qui lui mangeaient la
moitié du visage, haussa les épaules, impuissant.
-
La description de ce type pourrait correspondre à la moitié des gladiateurs de
l'empire ! plaida-t-il.
-
Si, au moins, il avait un signe particulier..., ajouta le second soldat qui,
petit et nerveux comme un jeune chiot, paraissait ne pas pouvoir tenir en place
plus de quelques instants. Un oeil en moins, une oreille ou le nez coupé, je ne
sais pas, moi !
-
Une corne de bouc au milieu du front, peut-être ? tempêta Matticus, le faisant
rougir. Vous ne voulez pas non plus qu'on lui tranche la tête, pour que vous
puissiez la présenter à toutes les écuries de gladiateurs de Rome ?
-
Qu'y a-t-il, Matticus ? s'enquit Kaeso en pénétrant dans le vestibule de la
caserne, talonné par Io et le géant noir d'Apollonius, qu'il venait d'interroger.
On t'entend rouspéter à l'autre bout de la cour. Tu peux rentrer chez ton
maître, ordonna-t-il à l'esclave. Je n'ai plus besoin de toi.
Le
géant s'inclina avec obséquiosité, et une certaine condescendance, puis
disparut.
-
Alors ? s'enquit Matticus en désignant du menton la porte par où l'esclave
venait de sortir.
-
Il dit n'avoir touché à rien ni déplacé quoi que ce soit. Et il assure que le
corps n'a pas bougé entre l'instant où il l'a découvert et celui où nous sommes
arrivés. (Son second fit vibrer ses lèvres avec un grognement irrité.) Et pour
l'identité de notre homme, qu'est-ce que ça donne ?
Matticus
désigna les deux jeunes prétoriens d'un geste excédé.
-
Ça donne deux traîne-sandales incapables de décrire un mort ! C'est pourtant
pas faute de rester immobile pour pouvoir être contemplé ! ajouta-t-il en les
crucifiant du regard.
Les
deux jeunes gens échangèrent une oeillade agacée et ravalèrent une repartie
bien sentie. Comme s'il était facile de faire identifier un homme par une
simple description lorsqu'il n'avait aucun signe distinctif pour le
différencier des jeunes gens de son âge !
Mais
lorsque Matticus était en colère, mieux valait laisser passer gentiment l'orage
sans rien dire car, pour violent que cela puisse être, ça ne durait jamais très
longtemps.
-
Quel est le problème ? demanda Kaeso, un sourire en coin.
-
Il est trop... banal, centurion ! s'excusa le plus petit. Tous les jeunes
gladiateurs sont plus ou moins taillés dans le même bloc et avec le même
ciseau.
-
Et tous disparaissent de leur écurie du jour au lendemain sans prévenir aussi,
sans doute ? ne put s'empêcher de railler Matticus.
Kaeso
leva la main pour interrompre la discussion.
-
Inutile de s'énerver. J'ai peut-être une solution.
Iambicus
Abrahaeus était un homme fier de son talent et de son statut.
Portraitiste
de la famille impériale depuis plus de quarante ans, il pouvait se vanter
d'avoir toujours su
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