Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mon Enfant De Berlin

Mon Enfant De Berlin

Titel: Mon Enfant De Berlin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Wiazemsky
Vom Netzwerk:
Soviétiques, il a combattu à leurs côtés pour rejoindre ensuite Léon de Rosen dont il est à la fois le bras droit et le meilleur ami. C’est l’officier français le plus populaire du 96 Kurfürstendamm, les femmes comme les hommes l’adorent. Il est toujours le premier à partir en mission, le premier à improviser une fête. Parlant sept langues couramment dont le russe, le français, l’anglais et l’allemand, il sait se faire des amis partout, aussi bien dans le camp où il était prisonnier que dans Berlin occupé par les Alliés. Ces qualités font de lui un excellent négociateur, les filles le réclament souvent quand elles vont chercher des Français en zone soviétique.
    Claire, dès son installation dans l’immeuble, n’avait pas pu faire autrement que de le remarquer. C’est lui qui avait organisé une petite réception pour accueillir la Croix-Rouge française, lui qui avait instauré un constant va-et-vient entre les étages. Au terme d’une première soirée toutes et tous avaient l’impression de se connaître depuis longtemps et le désir sincère de travailler ensemble. On avait dansé, chanté, bu, porté un grand nombre de toasts à la fin de la guerre, au retour des prisonniers et à la réconciliation des peuples. « Il en fait trop », pensait Claire qui l’avait considéré comme un martien. « Il nous a toutes mises dans sa poche ! Avec lui, on ne va pas s’ennuyer », s’amusait Mistou, et Rolanne, rêveuse, de soupirer : « Quel charme... » Plus tard, les ambulancières belges avaient confié aux Françaises que Wia était un authentique prince et sa famille une des plus anciennes de Russie. « Bah... », avait été le seul commentaire de Claire. Elle avait reconnu toutefois qu’il était sympathique, facile à vivre et bon camarade. Elle semblait ne pas remarquer que Wia, très séduit, se donnait beaucoup de mal pour lui plaire.
    Un matin, alors qu’elle se trouvait au deuxième étage, dans le bureau de Léon de Rosen, en train de feuilleter un journal français qui relatait un voyage de son père en Suisse, Wia avait demandé : « C’est qui ce François Mauriac ? — Voyons, Wia, tu te fiches de nous ! Tu ne peux pas ignorer qui est François Mauriac ! » s’était indigné Léon de Rosen. « Mais si. Alors, qui c’est ? » Devant tant d’ignorance, Claire avait attrapé un fou rire, le premier depuis son arrivée à Berlin. Un fou rire qui l’avait obligée à s’asseoir par terre à même le plancher et qui n’avait fait que s’accroître à mesure que Wia, mis au courant par son ami Léon, lui avait présenté ses excuses. « Vous ne lisez pas de livres ? avait demandé Claire tandis qu’elle commençait à se calmer. — Jamais ! » Nouveau fou rire que les deux hommes ne comprirent pas.
    Quand Claire quitta le bureau pour rejoindre son étage, elle avait envie de chanter de joie dans l’escalier : elle venait de rencontrer enfin un homme qui s’intéressait à elle et rien qu’à elle ; un homme qui ignorait l’existence de son illustre père et pour qui la littérature, les livres ne comptaient pas. Cette situation si nouvelle l’enchantait. Ce Wia était bien un martien comme elle l’avait pressenti au début. Dès cet instant, elle remarqua l’attention qu’il lui portait.
    Au cours d’une mission avec Mistou et Plumette, alors que les Soviétiques niaient détenir des prisonniers français, Wia avait une fois de plus décidé d’obtenir gain de cause, de ne pas rentrer bredouille. Cela se passait à une centaine de kilomètres de Berlin, dans une zone dévastée, sans un toit pour les abriter. Comme il fallait passer la nuit sur place pour reprendre dès le matin les négociations, ils avaient trouvé à se loger dans une maison occupée par l’Armée rouge. Wia était inquiet. Il savait que les soldats allaient se soûler jusqu’à perdre tout contrôle et que la présence de trois jeunes femmes, des étrangères, exciterait leur convoitise. La peur des viols n’était pas sans fondement, Claire, Mistou et Plumette le savaient. Elles acceptèrent les consignes, il les installa dans une chambre où elles dormiraient ensemble, sans retirer leur uniforme. Il leur demanda encore de pousser de gros meubles contre la porte afin de mieux se protéger d’une tentative d’intrusion nocturne. Lui-même resterait à portée de voix. Mais deux minutes après, il était de retour. « J’ai un cadeau pour

Weitere Kostenlose Bücher