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Mon Enfant De Berlin

Mon Enfant De Berlin

Titel: Mon Enfant De Berlin
Autoren: Anne Wiazemsky
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Malgré cela, il est enchanté de ce qu’il fait. Il est vrai que tout le monde l’adore. Les Russes lui font une de ces cours !
    Chère maman, je vous quitte en vous remerciant de tout mon cœur de ce que vous avez fait pour moi, ainsi que papa, pendant mon séjour à Paris. J’ai vraiment été très heureuse d’être avec vous deux comme avant.
    Je vous embrasse très fort ainsi que papa.
     
    P.-S. 1 : Dites à papa que l’Américain est plus que ravi de son livre dédicacé.
    P.-S. 2 : Je penserai bien à Claude samedi et surtout les autres jours. Je suis très fière et dis à tout le monde que mon frère part faire des conférences en Angleterre ! »

 
    Rolanne a refusé que Claire prenne le volant, pour une fois c’est elle qui conduit l’ambulance. Claire n’a pas discuté. Depuis qu’elle se sait enceinte, elle prend quelques précautions : elle ne participe plus aux expéditions lointaines, évite autant qu’elle le peut les trajets en voiture. Elle se sent inutile, cela la met de très mauvaise humeur, elle s’en plaint auprès de ses compagnes. Comme elle se plaint de ne pas voir assez Wia qui, tant qu’il remplace Rosen à la tête de la Division des personnes déplacées, se lève très tôt et rentre très tard.
    Mais ce jour-là tout est différent.
    L’ambulance transporte quatre hommes que les Soviétiques après des négociations particulièrement longues ont finalement consenti à livrer à la Croix-Rouge : deux Belges, un Français et un jeune Grec.
    C’est pour ce dernier que Claire a tenu à être présente. Il lui semble qu’elle n’a encore jamais souhaité sauver autant une vie humaine, qu’elle ne s’est jamais donné autant de mal pour convaincre Wia d’abord, puis par son intermédiaire, les autorités du camp de prisonniers où il a été signalé.
    On sait peu de choses sur ce garçon d’environ dix-huit ans capturé par les Allemands, puis considéré comme leur complice par les Soviétiques, donc destiné à être déporté, sans jugement, sans personne qui puisse l’innocenter. Claire et Rolanne, en l’aidant à s’allonger dans l’ambulance, ont vu tout de suite qu’il était tuberculeux, très mal en point. Le faire hospitaliser devient urgent. Mais où trouver de la place ? Tous les hôpitaux de Berlin sont pleins. « Essayons tout de même », ont décidé de concert les deux femmes.
    Au premier hôpital, elles parviennent à caser pour quelques heures les deux Belges et le Français. Mais au troisième et après un autre refus, elles ne savent plus quoi faire.
    — Retourne les voir encore une fois, supplie Claire, insiste. Toi, tu baragouines dans plusieurs langues... Chaque minute compte si on veut qu’il vive...
    — Tu as raison.
    Rolanne renonce à garer convenablement l’ambulance, descend à nouveau après avoir rajusté son manteau et sa chapka. Depuis la veille, la température est tombée en dessous de zéro, une mince couche de glace recouvre le sol. Claire contemple accablée les immeubles toujours en ruine de ce quartier de Berlin et cède à un moment de découragement. Elle attend un enfant, un jeune garçon va mourir près d’elle sans qu’elle ne puisse rien tenter pour le sauver. Rien tenter, vraiment ? Être près de lui au moins, ne pas le laisser seul avec la peur de mourir.
    Elle entrouvre la bâche de toile, pénètre à l’intérieur de l’ambulance. Le jeune Grec gît inerte sur la couchette où on l’a déposé. Malgré les deux couvertures militaires, il tremble de froid, de fièvre. Ses yeux sont fermés. Mais quand il sent la main de Claire sur son front, il les ouvre d’un coup. Son regard désespéré appelle au secours. « Ça va aller, ça va aller », répète Claire en lui caressant le visage. Elle met dans ce simple geste toute la délicatesse dont elle se sait capable quand elle est confrontée à la misère du monde, aux horreurs de la guerre. Les grands yeux noirs brillants ne la quittent pas, elle a le sentiment qu’elle transmet un peu de sa vie au garçon. Mais cela ne dure pas. Il tremble maintenant de façon convulsive.
    « Que je suis bête ! » Claire enlève son manteau, le pose sur les couvertures militaires. Est-ce son imagination ? Il lui semble que le garçon tremble moins, qu’il respire avidement le parfum dont le manteau est imprégné. «  Après l’Ondée  », annonce Claire. Elle se met à lui parler de Paris, de la croisière en Grèce faite en famille avant la
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