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Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin

Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin

Titel: Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jan Karski
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codé et microfilmé. Ce devait être la base de mon rapport à London. Les orateurs parlaient lentement, calmement. Ils sentaient que leurs paroles, leurs opinions seraient considérées comme décisives par les hommes de London. Pour le gouvernement en exil, ce message serait l’écho des aspirations et des sentiments de la Pologne occupée et déterminerait sa politique :
    — L’unité des Polonais doit être renforcée… Le gouvernement de coalition doit être le représentant de toute la Nation… Aucun parti n’a le droit de se soustraire à la responsabilité de l’action et de la politique du gouvernement… La continuité de l’État polonais doit être maintenue… La continuité de l’État ne signifie pas la continuité des institutions. La nouvelle Pologne sera démocratique. L’ancienne tradition parlementaire qui a pu renaître dans la Résistance sera le fondement de la future Pologne… Les partis politiques coopèrent dans la lutte contre l’occupant et appuient le gouvernement, mais ils diffèrent par leurs programmes et veulent que ces différences existent… Dans la Pologne libre, le parlement libre, issu d’élections générales libres, décidera des institutions ainsi que de la structure politique et sociale de l’État. Ces élections refléteront le véritable rapport des forces politiques et l’importance de l’appui de la population à chacun des partis.
    « La Nation ne faiblit pas dans sa volonté de résistance et demeure toujours prête à supporter les sacrifices… Il faut maintenir à tout prix l’attitude irréductible face à l’occupant… Le pays occupé n’a pas suscité de “Quisling polonais” et n’en connaîtra jamais… Les actes de trahison et de collaboration sont sévèrement punis et demeurent marginaux… Les traîtres sont liquidés sans pitié… Le gouvernement en exil devrait prendre conscience des fardeaux que porte le pays… Il doit lui apporter toute l’aide possible et appeler les gouvernements alliés à l’aider… L’émigration devrait renoncer à toute ambition politique et faire taire ses rivalités… Son sort n’est ni pire ni meilleur que celui des Polonais demeurés au pays… L’émigration doit aider les Alliés dans l’effort pour la victoire… Après la guerre, les émigrés rentrant dans notre patrie nous feront partager le savoir acquis auprès de l’Occident.
    Les Alliés devraient savoir que les Polonais placent leur espoir en eux… Leurs déclarations au sujet de la Pologne sont prises à la lettre ici. Quand l’Occident déclare : “Le monde entier rend hommage au peuple polonais pour son attitude irréductible face à l’ennemi et ne l’oubliera jamais”, les Polonais comprennent que le monde entier leur rend hommage et que jamais il n’oubliera la Pologne cxxxix  »…
    La réunion dura plusieurs heures. Pour conclure, Grot prit la parole. Le commandant en chef de l’Armia Krajowa (Armée de l’intérieur) lança un appel pour un envoi d’armes et de matériel militaire dans la plus grande quantité possible. Il assura que rien ne serait gaspillé, que chaque grenade serait utilisée de manière à provoquer les pertes maximales chez l’ennemi.
    Après cela, le chef du bureau de la Délégation referma son registre. La réunion était terminée. Les participants quittaient l’appartement dans un ordre arrêté, les uns après les autres.
    Un message chiffré fut envoyé à London et à notre organisation en France cxl  : « Le courrier part incessamment. Itinéraire : Allemagne, Belgique, France, Espagne. Reste quinze jours en France, quinze jours en Espagne. Prévenez tous les centres de liaison en France et tous les représentants alliés en Espagne. Mot de passe : “Je viens voir tante Sophie”. Il porte le nom de Karski. »

Chapitre XXIX Le ghetto
    Avant mon départ de Pologne, sur l’ordre du délégué du gouvernement polonais de London et du commandant de l’Armée de l’intérieur, on m’avait arrangé une entrevue avec deux hommes qui étaient auparavant d’éminentes personnalités de la communauté juive et dirigeaient aujourd’hui la résistance juive. L’un représentait l’organisation sioniste, l’autre l’Union socialiste juive, le Bund cxli .
    Nous nous rencontrâmes au crépuscule dans une énorme maison vide et à demi détruite du faubourg de Grochow. Le fait qu’ils soient venus ensemble à ce rendez-vous, malgré ce qui séparait les bundistes et les

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