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Monestarium

Monestarium

Titel: Monestarium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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l’autorisation
qu’elle lui accordait, d’un petit signe de tête.
    — Votre serviteur, madame. Que
l’on mande par-devers nous votre apothicaire. Je souhaite avant tout qu’elle confirme
le diagnostic de mon mire.
    Bernadine s’était un peu reculée et
attendait les instructions de l’abbesse, mains croisées sur le devant de sa
robe, le dos appuyé au mur de larges pierres sombres comme si elle souhaitait
s’y fondre. Mortagne et Plaisance s’étaient installés côte à côte, chacun
derrière un scriptionale [137] ,
évoquant deux enfants en attente de la sœur écolâtre. Le comte jouait sans même
s’en apercevoir avec une plume taillée dont le tuyau portait la marque d’une
encre verte préparée à l’aide de fine poudre de malachite. Hermione se tenait
très droite devant eux. Son extrême pâleur ne l’avait pas quittée et prenait
des allures spectrales sous la lueur mouvante dispensée par les torches de
résineux.
    À la question sans ménagement du
comte Aimery, elle répondit d’une voix lente, un frêle nuage de buée se formant
à chacun de ses mots :
    — Certes, la soudaineté et la
violence de l’attaque ne me font pas pencher en faveur de l’ingestion d’un
aliment frelaté, d’autant que nous sommes plusieurs centaines à avoir consommé
la même nourriture.
    — Un poison, donc.
    — Comment l’aurait-elle
ingéré ?
    — C’est ce que je me propose de
découvrir.
    Il détailla quelques instants la
femme, d’assez belle taille et silhouette, qui se tenait devant lui, son regard
s’attardant sur le petit triangle de peau qui dépassait du col haut de sa robe,
au point qu’un peu de couleur revint aux joues d’Hermione.
    — Cela étant, reprit-il d’une
voix plus sèche, votre expérience d’apothicaire ne pourrait-elle nous aider à
démasquer la nature du poison… d’après les symptômes ?
    — C’est que… J’avoue m’y
perdre. Je compose à longueur d’année des remèdes afin de guérir grands et
petits maux, pas d’intoxiquer.
    — Allons, ne me dites pas que
vous ne concoctez pas également quelques redoutables mixtures destinées à
exterminer rats et mulots.
    — En effet, cependant il s’agit
d’animaux nuisibles.
    — Certes, trancha Mortagne que
l’humeur gagnait. Madame de Gonvray, n’est-il pas exact que des poisons
dévastateurs font, à plus faible dose, de magnifiques potions ?
    — Il s’agit même d’effets assez
répandus. Ainsi la digitale…
    Coupant court à la démonstration
qu’il pressentait longue, Mortagne demanda :
    — N’est-ce donc pas l’un des
fondements de votre art que de connaître les effets délétères, voire mortels,
des plantes, et les doses auxquelles on peut les redouter ?
    — Où voulez-vous en venir, à la
fin ? s’impatienta Hermione. À vous entendre, j’en viens à craindre que
vous me soupçonniez d’un acte inqualifiable.
    Le regard du comte descendit de ses
joues vers sa bouche, pour se poser à nouveau sur son cou. Le rouge de
l’embarras empourpra l’apothicaire.
    — Pas encore, se contenta-t-il
de rétorquer avec une goujaterie qui sidéra Plaisance.
    — Enfin, monsieur, comme vous y
allez ! protesta celle-ci.
    — Votre pardon. Je veux faire
admettre à votre fille apothicaire qu’elle connaît parfaitement le poison qui
ronge à petit feu la sous-prieure, et j’y parviendrai. Le plus simple serait
qu’elle cède aussitôt, nous épargnant ainsi un criminel gâchis de temps.
    — Criminel ?
    — C’est le mot, ma mère. J’ai
dans l’idée que les deux meurtres de moniales sont liés, sans toutefois
parvenir à préciser la nature de ce lien. (Se tournant à nouveau vers Hermione,
qui semblait transformée en statue de sel, il insista :) Fichtre, madame,
pourquoi tant de réticences à expliquer ce qui ne sont que connaissances
scientifiques ?
    Hermione tenta une dernière dérobade
et lança d’un ton à l’évidente agressivité :
    — Ma parole, monsieur… ne
dirait-on pas que me voilà traînée devant un tribunal afin d’y répondre de mes
fautes ?
    — C’est en tout cas ce qu’il
risque de vous advenir si vous tergiversez plus avant.
    Plaisance, que l’affolement gagnait,
la pressa d’un ton inquiet :
    — Enfin, ma chère… Puisqu’il
est exclu que… Si vous connaissez la nature du poison utilisé pour assassiner
Aliénor, pourquoi ne pas…
    — Il s’agit de Colchicum
autumnale , le colchique [138] ,
j’en suis presque

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