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Monestarium

Monestarium

Titel: Monestarium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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insuffisantes.
    La bouche de son vis-à-vis se
crispa.
    — Nous avions topé,
rétorqua-t-il d’un ton sec.
    — J’ignorais l’exacte valeur de
ma marchandise. Tel n’est plus le cas. D’autres propositions me sont faites,
que je serais impardonnable d’ignorer.
    — Combien ?
    — Cinq cents livres, annonça
Firûz sur une déglutition pénible.
    — Morbleu [14] , c’est une somme !
    — J’en suis conscient. Aussi ne
vous en voudrais-je pas si vous décidiez de renoncer. J’ai pensé plus honnête
de vous prévenir puisque vous avez été le premier acheteur à vous manifester,
rusa Firûz, tout en se rongeant les sangs.
    Et si l’autre l’envoyait
paître ?
    — Va pour cinq cents et que ce
soit ton dernier prix. La colère pourrait me venir.
    — Je suis homme de parole,
affirma Firûz d’un ton peu convaincu.
    — Sais-tu seulement ce que ce
mot signifie ? ironisa son interlocuteur. Sortons et procédons à
l’échange.
    — Auriez-vous la somme avec
vous ? Toute la somme ? s’étonna le marchand.
    — Que crois-tu ? Que j’en
suis à ma première transaction avec des roublards et des cupides ?
    Firûz ne protesta pas. Les termes,
bien que blessants, lui allaient comme un gant, et il n’en était pas fier.
Après, lorsqu’il serait très riche, il ferait le bien et plus jamais
n’escobarderait [15] son prochain. Il en faisait le serment. Après, dans quelques minutes.
    Il suivit l’intermédiaire,
allongeant sa foulée pour se maintenir à sa hauteur. Ils s’enfoncèrent dans un
entrelacs de ruelles, croisant rarement âme qui vive. Enfin, ils parvinrent au
pied de la tour du Diable située à la pointe nord de la citadelle. L’homme
n’avait pas prononcé un mot depuis leur départ de la taverne. Il sortit de sa
jaque [16] richement brodée une lourde bourse et lâcha :
    — Je veux voir l’objet avant de
le payer.
    Firûz s’exécuta et se pencha vers le
sac pour en défaire les liens. C’est alors qu’il découvrit derrière lui deux
pieds. Il se tourna d’un bloc. Le gros homme aviné qui ronflait dans la taverne
le considérait, un air indéfinissable sur le visage. L’intermédiaire commanda
d’un ton sans hargne :
    — Fais ton office, Michel.
    L’autre tira le couteau de chasse
qui pendait à sa ceinture. Et Firûz comprit. Il balbutia :
    — Attendez… Je… J’ai été trop
gourmand, vous aviez raison. Restons-en à notre premier accord : trois
cents livres.
    Le grand homme maigre hocha la tête
en signe de dénégation et murmura :
    — Je suis… homme de parole et
ne m’en suis jamais dédit. Je t’avais prévenu dans cette cabane du Bosphore que
trois cents livres constituaient ma dernière proposition.
    Au regard désolé de l’intermédiaire,
l’Arménien sut qu’il allait mourir. Il sentit également que l’argent n’avait
que peu à voir dans son exécution.
    Une main impitoyable lui tira la
tête vers l’arrière. Il voulut hurler, mais le tranchant inexorable de la lame
brisa net son cri. Il s’effondra en sanglotant, tentant d’endiguer le flot
carmin qui giclait de sa gorge.
    Le grand homme maigre tomba à genoux
à côté du corps agité de soubresauts nerveux. Ils prièrent longtemps pour l’âme
de celui qu’ils venaient d’abattre.
     
    Étienne Malembert se signa et se
releva, imité par Michel, une brute sans autre méchanceté que celle des ordres
auxquels il obéissait aveuglément. Le faciès de bête de l’exécuteur s’était
ridé de chagrin. Malembert lui lança avec gentillesse :
    — Il fallait en passer par là,
Michel. Peut-être cette histoire de surenchère n’était-elle qu’une duperie
destinée à ouvrir plus large notre bourse. Quoi qu’il en soit, le vendeur nous
aurait trahis à la première occasion, ou alors, sa langue se serait déliée à la
faveur d’une soûlerie. (Il hésita, puis :) Michel, inutile de conter la
fin de notre… négociation à notre maître. Il ne s’en informera pas, l’important
pour lui étant d’avoir récupéré la besace. Notre devoir et notre honneur
consistent à le protéger, surtout des ennemis qu’il ignore, ou des amis qu’il se
croit. Allons, charge notre… acquisition avec précaution sur ton épaule, nous
sommes attendus par notre seigneur.
     
    Aimery, comte de Mortagne, âgé de
vingt-cinq ans en cette année 1290, avait trouvé logis au château royal de la
citadelle d’Acre, situé non loin de l’Hôpital, derrière la

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