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Montségur, 1201

Montségur, 1201

Titel: Montségur, 1201 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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qu’inutile, Guilhem était resté près de
Raymond de Saint-Gilles dont il était devenu le conseiller et le capitaine de
sa garde. Pour lui, rapportait-on, il s’était engagé dans de rudes entreprises,
mettant chaque fois sa vie en jeu. Pourtant, malgré sa brutalité, Guilhem
d’Ussel était aussi le plus émouvant troubadour de la cour de Saint-Gilles,
jouant à la perfection de la vielle à roue et chantant d’une troublante voix
les fins poèmes d’amour qu’il composait.
    Mais le mercenaire était pauvre et quand le temps
du mariage était venu pour Amicie, ses frères avaient choisi Amiel de Beaumont,
coseigneur de Saverdun.
    Les conditions du mariage d’Amicie avaient été
âprement négociées entre Amiel de Beaumont et les Villemur.
    Depuis plusieurs générations, les seigneurs de
Villemur étaient coseigneurs du fief de Saverdun ; un château et un bourg
au bord de l’Ariège qui constituait le verrou de la route vers l’Espagne. Cédé
un temps par le comte de Foix à la puissante famille des Marquefave, le fief
était désormais morcelé entre Arnaud de Villemur et deux frères : Amiel et
Gilabert de Beaumont. Le partage du pouvoir entre coseigneurs étant
inconfortable, il avait été décidé qu’Arnaud céderait sa part à sa sœur contre
la ferme et les biens qu’elle possédait. Il disposait d’un autre château et
l’échange était financièrement avantageux pour lui. Quant à Amiel, il
deviendrait principal seigneur de Saverdun en gouvernant la part de sa femme,
son frère Gilabert n’ayant plus qu’un quart de la coseigneurie.
    Les termes du contrat de mariage avaient aussi été
longuement discutés entre le comte de Foix, possesseur du château, et le comte
de Toulouse, son suzerain. Car malgré l’allégeance de Foix envers Toulouse, les
querelles entre les deux comtés étaient incessantes tant leurs liens de
vassalité étaient confus et emmêlés.
    Le comte de Foix se nommait Raymond-Roger.
Familièrement, on l’appelait le comte Roux en raison de la couleur de sa
pilosité. Ayant fait la paix avec ses voisins d’Aragon, de Barcelone et de
Toulouse, son père lui avait laissé un comté prospère et puissant. Mais cette
grandeur était sans cesse remise en question par les prétentions du clergé et
par les querelles et les guerres privées entre ses vassaux.
    Dur et violent, Raymond-Roger n’hésitait jamais à
utiliser la force contre l’Église. Ainsi, l’évêque d’Urgel n’ayant pas respecté
un accord les liant, il avait assemblé un corps de troupes et assiégé la ville.
Urgel, emporté de vive force, avait été livré au pillage et les chanoines de la
cathédrale, battus et prisonniers, avaient dû payer rançon.
    Cette brutalité n’empêchait pas Raymond-Roger
d’être fin politique. S’il faisait de généreuses donations aux abbayes
reconnaissant sa suzeraineté, il favorisait aussi les hérésies cathares et
vaudoises. Ainsi une de ses sœurs, Esclarmonde, avait embrassé la religion des
Albigeois, tandis que l’autre s’était jetée dans la secte des Vaudois. Pour ces
raisons, les hérétiques étaient nombreux dans le comté, ce qui affaiblissait
l’autorité de l’Église de Rome.
     
    Les premiers cathares, qui se nommaient aussi bons
chrétiens, bons hommes ou tisserands, étaient apparus dans le Midi une
cinquantaine d’années plus tôt, venus d’Italie et du nord de la France. Leur
doctrine réfutait l’Ancien Testament et expliquait le monde à travers deux
principes : le Bien et le Mal. Ils s’étaient solidement implantés dans les
comtés de Toulouse et de Foix depuis la venue de Nicétas, un évêque bogomile
arrivé de Valachie qui avait ordonné leurs premiers évêques.
    Comme les cathares, les bogomiles croyaient en un
double royaume : celui de la matière, créé par Satan, et celui de l’Esprit
saint, où régnait le vrai Dieu. Le monde matériel était donc celui du Mal et
l’homme ne pouvait être sauvé qu’en devenant digne du royaume de l’Esprit
saint. Cette interprétation de la création expliquait pourquoi le mal régnait
sur terre : notre monde était l’œuvre de Lucifer. Là où l’Église de Rome
était contrainte à des arguties pour justifier les malheurs du temps, les
guerres ou les épidémies, les explications des cathares étaient simples et
faciles à comprendre.
    Une fois cette doctrine admise, les croyants
voulant être sauvés et rejoindre le royaume de Dieu devaient respecter

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