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Montségur, 1201

Montségur, 1201

Titel: Montségur, 1201 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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combattants et du
comté de Foix. La foule s’y pressait pour voir défiler et combattre les
chevaliers aux écus, cimiers de casque, surcots d’armes et couvertures de
palefrois richement décorés d’animaux fabuleux et multicolores, de fleurs de
lys d’azur ou de croix perlées.
    Dans ces joutes, les jeunes gentilshommes et les
écuyers s’affrontaient pendant la première journée. La deuxième était pour les
chevaliers nouvellement armés et la troisième était réservée aux guerriers
éprouvés. À la fin de chaque combat, Amicie de Villemur, assise sur une estrade
et entourée des plus belles dames du pays, distribuait couronnes et rubans aux
vainqueurs.
    Durant les jours suivants, ceux qui maniaient le
débat, la poésie ou qui jouaient de la musique avaient une autre occasion de
recevoir un prix. C’était la cour d’amour où s’affrontaient non seulement des
chevaliers, mais aussi des prélats, des jongleurs ou des troubadours.
    Dans la grande salle du château. Amicie, en bliaut
de soie aux manches évasées, trônait sur une haute chayère [3] avec un marchepied. À côté d’elle
se tenait son époux Amiel, prêt à exécuter ses moindres ordres. Sur des sièges
particuliers étaient assis jongleurs et troubadours réputés, dont certains
étaient chevaliers ou religieux. Les prix étaient posés sur des coussins aux
glands dorés. Le premier était toujours une couronne tressée d’or, le second un
poignard au manche magnifiquement travaillé, le dernier une lyre d’argent.
Quand chacun avait pris la place liée à son rang, Amicie se levait, annonçait
le tournoi ouvert et lançait un sujet.
    La matière en était toujours l’amour. L’amour vrai
est-il l’amour qu’on chante ? Qui de l’amant ou de l’amante souffre le
plus de l’amour chaste ? L’amour sauve-t-il ? Telles étaient les
questions que la châtelaine de Saverdun s’ingéniait à poser.
    S’ensuivaient alors des défis, des débats à deux
où les adversaires s’affrontaient en vers et en musique. On appelait cela les
tensons.
    D’autres fois, ce n’était pas la reine de la cour
qui proposait l’objet de la dispute, mais un chevalier. Il commençait seul à
débattre, utilisant une harpe ou une viole pour accompagner ses paroles. Après
quelques strophes, un compétiteur s’avançait pour contrarier les propositions
de son rival sur le même air, par une strophe de même mesure et avec les mêmes
rimes.
    Les deux adversaires alternaient ainsi en
improvisant et la dispute se terminait en cinq couplets. La cour d’amour
délibérait ensuite gravement. On y débattait non seulement du mérite des deux
poètes, mais aussi de leurs arguments. Après quoi, la cour rendait en vers un
arrêt d’amour.
    La cour d’amour était aussi un tribunal à
l’imitation de la justice seigneuriale. Dans ces occasions, entourée d’autres
dames distinguées par leur esprit, la dame de Saverdun rendait la justice.
Certes, les sujets abordés n’étaient que des questions de galanterie, mais les
formes juridiques y étaient rigoureusement observées, bien que les décisions
prises soient le plus souvent immorales.
    Ainsi la cour de Saverdun avait-elle autorisé un
époux divorcé à redevenir l’amant de son ancienne femme remariée. Dans un autre
arrêt, soutenu par Amicie, on y avait décidé que le véritable amour ne pouvait
exister entre époux et que chacun pouvait prendre maîtresse ou amant pour éprouver
son conjoint.
    La cour de Saverdun avait ses codes qu’il était
défendu d’enfreindre sous peine de forfaire à l’honneur et d’en être chassé
comme un félon. Amicie y brillait par son charme, sa beauté et son esprit. Sans
être docte et savante en belles-lettres, elle savait lire et écrire le latin,
ce qui n’était pas le cas de son mari, et si elle paraissait douce comme le
miel, elle était pourtant capable d’être plus cuisante qu’une morsure de
serpent quand on ne respectait pas les lois de sa cour d’amour.
     
    Si Amicie pouvait organiser de si somptueuses
fêtes, c’était grâce à la prospérité du fief. Saverdun était riche des péages
du pont sur l’Ariège, des redevances sur ses moulins, des leydes des ventes et
des tasques payés par les tenanciers. De plus, le bayle d’Amiel, Figueira, se
passionnait pour l’élevage des abeilles. Nombre de ruches, installées dans les
champs et les bois autour du château, produisaient un miel réputé dont on
disait qu’il soignait

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