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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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pour savoir que vous êtes encore en vie.
    — Alors, morte pour morte, soyons-le, si c’est pour être la femme de Morgennes.
    Et c’est ainsi que, dans la douce quiétude d’une ville déserte, au crépuscule, Morgennes et Guyane échangèrent leur consentement, sous un drap de soie noir qu’ils tenaient chacun d’une main, l’autre servant à serrer celle de l’être aimé.
    — Que rien jamais ne vous sépare, mais qu’au contraire tout vous rapproche, les joies comme les épreuves.
    — Rien ne nous séparera jamais, dit Guyane. Ni les joies ni les épreuves.
    — Ni la mort, ajouta Morgennes.
    Se penchant sur Guyane, il lui donna un baiser puis lui lâcha la main pour caresser son visage. Comme sa peau était douce ! Il en aurait pleuré. La jeune femme avait les paupières baissées, et Morgennes la regardait, cherchant à boire son image, comme s’il craignait de la perdre – ou pire, de l’oublier.
    — Jamais je ne t’oublierai, lui dit-il. Je t’en fais le serment…
    Sans lui répondre, Guyane lui rendit ses baisers, cherchant à reprendre la main de Morgennes, secrètement navrée de ce qu’il ait osé la lâcher car elle y voyait un mauvais présage. Ils s’embrassaient, et s’embrassaient, tenant toujours au-dessus d’eux le drap de soie noire qui était comme l’écho de celui sous lequel ils s’étaient cachés, au fond du puits où était Dieu.
    Azyme récita quelques prières, se désolant de n’avoir à sa disposition qu’une douzaine de bâtons d’encens pour célébrer leur union et éloigner les moustiques. « Il en aurait fallu douze mille. » Faute de mieux, il donna deux bâtonnets à sa femme, à son acolyte et à chacun des petits singes, en leur demandant de les tenir en l’air, aussi droits que possible. Les fines colonnes de fumée bleutée s’élevèrent verticalement vers le ciel, car il n’y avait pas un souffle de vent. Tout était calme, et depuis les hauteurs de l’antique Crocodilopolis, là où la jungle s’étendait, des rugissements de bêtes sauvages venaient rappeler à nos amis qu’ils ne bénéficiaient que d’une courte trêve. Le danger continuait de rôder.
    Morgennes, lui, scrutait les différents horizons sans cesser d’embrasser Guyane. Il regardait le ciel et la terre, et voyait comme une grande phosphorescence blanche illuminer la jungle où Gargano, la Compagnie du Dragon blanc et Dodin s’en étaient allés – vers là où ils iraient demain matin. Qu’y avait-il plus au sud ? Morgennes se remémora les nombreuses légendes qu’Azyme lui avait racontées au sujet de cette « Terre brûlée », ce pays primitif d’où venaient les « Eaux de Nulle Part », et qui était pour les Anciens le Pays des Dragons.

56.
    « Je veux en effet passer pour morte. »
    ( CHRÉTIEN DE TROYES ,
Cligès. )
    Dès le lever du soleil, ils grimpèrent les marches du grand escalier qui menait du port de Crocodilopolis à la jungle. La petite troupe avançait vaille que vaille sous les regards immobiles des statues de crocodiles, et ne voyait nulle trace de vie autour d’elles.
    — Pourquoi n’y a-t-il personne ? s’inquiéta Guyane.
    — Les habitants ont dû monter dans l’Arche, rejoindre le pays de celle qui fut leur première reine, dit Morgennes en désignant le temple – vide lui aussi – de la reine Hatshepsout. C’était autrefois la reine de Saba.
    Azyme caressa Frontin, qui se tenait perché sur son épaule, et décréta :
    — Il n’est peut-être pas très prudent de continuer… Si Gargano lui-même estimait que c’était un endroit trop dangereux pour y emmener Frontin, qui sommes-nous pour nous y risquer ?
    — Nous devrions nous séparer, dit Morgennes.
    — Non, dit Guyane en lui serrant plus étroitement la main.
    — Il a pourtant raison, dit Azyme. Quoi qu’il y ait là-bas, ce n’est pas un endroit pour une dame.
    — Ni pour un religieux, ajouta doctement l’acolyte.
    — Ce n’est un endroit pour personne, dit Morgennes. C’est pour cela que je vais y aller seul. Vous, vous m’attendrez ici. Nous aviserons à mon retour.
    — Regardez ! s’exclama l’acolyte.
    Il pointait le doigt vers le Nil, derrière eux, et plus précisément en direction d’une dizaine de felouques qui remontaient le fleuve à toute allure.
    — Les Égyptiens !
    — Moi je dirais plutôt les Damascènes, soupira Azyme.
    — Que faire ? demanda l’acolyte.
    Morgennes porta la main de Guyane à ses

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