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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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lèvres, et y déposa un baiser. Puis il embrassa sa femme sur le front, la serra une dernière fois contre lui et lui dit :
    — Tu vas redescendre cet escalier.
    — Je veux rester avec toi.
    — Tu attendras que les soldats de Saladin débarquent. Tu leur diras qui tu es, et qui était ton père…
    — Je ne te quitterai pas.
    — Chut, fit Morgennes. C’est un ordre.
    — Non. Je ne suis pas tenue de t’obéir.
    — C’est pour ton bien, coupa-t-il.
    Il lui remit une mèche de cheveux en place, mais une légère brise la ramena sur son front. Morgennes eut un demi-sourire. Cette mèche était bien à l’image de sa femme. Douce, belle… Mais volontaire et déterminée !
    — Écoute, lui dit-il. Les soldats de Saladin vont bientôt débarquer. S’ils te voient avec moi, ils nous tueront tous les deux. En revanche, toi, ils ne te tueront pas. Azyme est trop important pour être éliminé. Il se rendra, et sera fait prisonnier. Vous aussi, dit Morgennes à l’acolyte.
    — On dit que Saladin sait faire preuve de clémence, commenta ce dernier.
    — Et s’il nous interroge, nous lui dirons que tu es mort pendant l’insurrection, ajouta Azyme.
    — C’est parfait, fit Morgennes.
    — Non, répliqua Guyane. Pour moi la vie n’a aucun sens si nous ne sommes pas ensemble.
    Voyant qu’elle ne céderait jamais, Morgennes décida de lui avouer que c’était lui qui avait tué son père. C’est à ce moment-là qu’une voix derrière eux s’écria :
    — Il a tué votre père !
    — Comment ? s’exclama Guyane.
    Tous se retournèrent vers le sommet de la chaussée, par où descendait Dodin le Sauvage, une lance à la main et une gibecière dans l’autre.
    — Morgennes a tué Chirkouh, répéta-t-il froidement.
    Guyane se tourna vers Morgennes, les yeux embués de larmes, les lèvres tremblantes.
    — Est-ce vrai ?
    Morgennes détourna le regard. Alors, elle lui toucha le bas du visage, et l’implora :
    — Mais tu ne savais pas, n’est-ce pas ? Tu ne savais pas qu’il était mon père ?
    Morgennes lui prit la main, et la serra avec d’autant plus d’amour et de force qu’il savait que c’était peut-être la dernière fois.
    — Tu savais ? Tu savais ? répéta Guyane.
    Mais, déjà, ce n’était plus une question. Elle commençait à percevoir la vérité :
    — Oui, tu savais ! Mais pourquoi ne m’as-tu rien dit ? Pourquoi, quand je me suis réveillée…
    — J’ai eu peur, avoua Morgennes.
    — Peur, mais de quoi ?
    — Peur de ta réaction. Peur que tu ne m’aimes…
    Il n’acheva pas sa phrase. Guyane l’avait giflé. Une puissante douleur irradia dans toute sa joue, le brûlant plus vivement que les flammes de Fostat.
    — Assassin ! Menteur ! Je ne te connais plus ! Tu n’existes plus pour moi ! Et, morte pour morte, je considère que tu es mort toi aussi !
    Elle éclata en sanglots, se cacha le visage dans les mains, et dévala les marches du grand escalier, en direction du port et des felouques égyptiennes.
    — Prends soin d’elle, dit Morgennes à Azyme. C’est peut-être mieux comme ça.
    — Promis, dit Azyme en serrant Morgennes contre lui.
    — Il faut se dépêcher ! fit l’acolyte.
    En effet, une première felouque venait déjà de toucher le port, et des soldats en débarquaient. L’acolyte trépignait sur place. Autour de lui, les singes – à l’exception de Frontin – tourbillonnaient dans tous les sens, impatients de déguerpir.
    — Allez ! dit Morgennes.
    Alors Azyme cracha au visage de Dodin le Sauvage, et repartit vers le Nil. Tandis qu’il s’éloignait, Morgennes vit Frontin se balancer sur son épaule. Le petit singe agita la main pour lui dire adieu, puis se blottit dans le cou d’Azyme. Il avait l’air très triste.
    Enfin, Morgennes s’avança vers Dodin, et lui dit :
    — Ne restons pas là.
    Les deux hommes gagnèrent rapidement les hauteurs du grand escalier, qui donnait sur une immense voie ouverte dans la jungle, et par laquelle – semblait-il – un bâtiment était passé plusieurs mois auparavant. Probablement lorsque le Nil était en crue.
    Avant de pénétrer dans les sous-bois, Morgennes se retourna une dernière fois vers la femme de sa vie, se promettant de la rejoindre après s’être amendé.
    Elle était là, minuscule brindille habillée de blanc, tremblant dans l’air du matin, non pas à cause du brouillard, mais parce que Morgennes pleurait.
    *
    Tels étaient les derniers

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