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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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d’autre choix que de partir en guerre.
    — Mais grâce à Dieu, nous pensons savoir d’où les coups sont venus ! dit l’empereur.
    Il laissa tomber son linge entre les mains du jeune page au plateau d’argent, et s’éloigna de la fontaine, sans un dernier regard pour ses pauvres qui, vrais ou faux, mettaient sur son passage un genou en terre.
    — Mais, d’où ? insista Guillaume.
    — Ni de Rome ni de chez vous. Non.
    — Majesté, je meurs d’impatience…
    — Silence, fit le secrétaire.
    — Chaque chose en son temps, continua l’empereur. Je vous ai parlé de ma collection d’objets précieux, vous rappelez-vous ?
    — C’est un honneur qu’on n’oublie pas, Majesté, dit Guillaume. Mais quel rapport y a-t-il entre les dragons et le royaume du prêtre Jean ?
    — Eh bien, après mûre réflexion, je me demande s’il ne se pourrait pas qu’ils existent, l’un et l’autre. Au même titre que, par exemple, les Chevaliers de la Table Ronde… Vous êtes, je crois, un grand amateur de livres ?
    — Oui, je me targue en effet de passer beaucoup de temps en leur compagnie ; mais je ne perds pas de temps à lire des contes d’aventures. C’est de l’Histoire, et d’elle seule, que j’ai le souci… Je me m’intéresse qu’aux faits. À la réalité. Les affabulations des ménestrels ne m’intéressent pas…
    À ce moment de leur conversation, ils arrivèrent à l’autre bout du jardin, devant une lourde porte de bronze insérée dans un mur de pierre blanche. L’empereur, qui marchait en tête, s’écarta pour laisser passer Guillaume devant lui :
    — À vous l’honneur.
    Une nouvelle fois, Guillaume trembla. Et comme il était bientôt midi, impossible de mettre ses frissons sur le compte du froid. Surtout en ce début de printemps, alors qu’il faisait un temps magnifique.
    Obéissant à l’empereur, auquel de toute façon nul n’aurait jamais osé désobéir en son palais, Guillaume franchit le seuil de l’énorme double porte que deux valets venaient d’ouvrir devant lui, et se retrouva face à un long corridor, gardé par deux dragons.
    Guillaume manqua s’évanouir, mais l’empereur lui-même l’empêcha de s’effondrer, en le retenant au dernier moment.
    — Remettez-vous ! lui dit-il. Et regardez !
    Guillaume ouvrit les yeux, et s’aperçut qu’il avait mal vu. Ce qu’il avait pris pour deux dragons n’était en réalité que deux immenses lézards, avec crêtes et écailles, équipés d’une selle où se tenait perché un chevalier – lance en avant. Les lézards, aussi hauts et apparemment aussi dociles que des palefrois, ne bougeaient pas d’un cil. Seuls leurs yeux globuleux et noirs étaient dardés sur Guillaume, tout comme la longue langue rouge au bout fendu en deux, qu’ils pointaient à intervalles réguliers dans sa direction.
    — Mon Dieu ! fit Guillaume. Par quel miracle…
    — Il n’y a pas là de miracle, fit l’empereur. Mais une simple découverte. Ces lézards, ou dragonnets, si vous préférez, proviennent d’une île située dans les parages de l’Inde, où mes mercenaires sont allés les chercher.
    — C’est extraordinaire.
    — Avez-vous entendu parler de la Compagnie du Dragon blanc ?
    — Et comment ! s’enthousiasma Guillaume.
    — Ma nièce en fait partie. L’auriez-vous, par hasard, rencontrée ?
    — Non, je ne crois pas. Mais cette compagnie a donné à Jérusalem un spectacle que nous n’oublierons jamais. Et j’ai entendu dire que le Dragon blanc avait permis de sauver la vie d’Amaury et de ses hommes, lors d’une des campagnes, désastreuses il est vrai, de Son Altesse en Égypte.
    — Racontez-nous ça.
    Guillaume toussa pour cacher son trouble. Alors, pour ne pas ajouter à son embarras, l’empereur suggéra :
    — Allons dans ma bibliothèque. Nous y serons mieux pour parler. Je comprends qu’il ne vous soit pas facile de vous exprimer ici, tant la présence de ces dragonnets est bouleversante. Mais ils me sont indispensables. J’ai subi, voici deux mois et demi, des vols…
    — On a cambriolé Sa Majesté !
    Manuel Comnène fit un geste en direction de son secrétaire, qui poursuivit :
    — Oui. Quelqu’un a dérobé trois reliques auxquelles Sa Majesté tenait tout particulièrement. Enfin, depuis que Sa Majesté a fait mettre ces deux dragonnets à l’entrée de son musée, plus aucun vol n’a été commis.
    — Ce genre d’incident ne se reproduira plus, conclut

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