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Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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théâtral.
    — Ça, Dieu seul le sait ! Peut-être faisait-il
chanter ces dames ? À moins qu’il n’ait eu recours à son art pour
découvrir leurs secrets intimes ? Ou bien alors il était associé à Max. Comment
le saurais-je ? Voulez-vous que je fasse le travail à votre place ?
    Pitt sourit et vit une trace d’irritation passer sur le
visage d’Ambrose. Celui-ci avait parlé ainsi pour l’offenser, non pour l’amuser.
    — J’apprécie toujours l’aide d’un expert, répliqua-t-il
d’une voix douce. Dans mon métier, j’ai eu l’occasion d’enquêter sur différents
homicides et incendies volontaires ; grâce aux cambrioleurs, j’ai pu
parfaire mes connaissances en matière d’œuvres d’art ; en revanche, la
tenue d’une maison close est tout à fait étrangère à mes compétences. Je n’ai
pas votre expérience, Mr. Mercutt.
    Celui-ci prit une inspiration, prêt à répliquer, mais ne
trouva pas la repartie à temps : Pitt avait déjà tourné les talons et
quitté son élégant salon. Ambrose se retrouva seul, debout au milieu de la
pièce, dans son peignoir de soie.
    Dehors, il pleuvait. Pitt sortit dans la rue bordée de murs
gris. Au fond, il était assez content d’avoir rabattu son caquet à cet individu.
Mais l’hypothèse émise par Mercutt lui semblait fort plausible.

4
    Lady Augusta Balantyne appréhendait la matinée qui s’annonçait.
Elle avait décidé de ne pas différer plus longtemps sa visite à sa fille, pour
lui dire tout net ce qu’elle pensait de son comportement. Christina et son mari,
Alan Ross, venaient dîner chez eux le soir même, mais ce qu’Augusta avait à
dire à Christina était d’ordre strictement privé. Comme par le passé, lorsqu’elle
avait eu à s’occuper des écarts de conduite de leur fille, Augusta avait la
ferme intention de laisser son époux à l’écart de tout cela. Le général
Balantyne était peut-être un tacticien de génie, lorsqu’il commandait une
canonnade ou une charge de cavalerie, mais dès lors que la bataille concernait
les sentiments et l’éventualité d’un scandale, il était notoirement incompétent.
    Durant le petit déjeuner, Augusta s’en tint à une
conversation polie, se contentant des banalités d’usage. Le général, de son
côté, se garda bien d’évoquer les meurtres de Devil’s Acre, qui faisaient la
une de tous les journaux, pour ne pas choquer son épouse, sans se rendre compte
qu’elle les avait déjà lus. Augusta ne chercha pas à aborder le sujet : cela
lui convenait très bien de le laisser dans l’ignorance, s’il y tenait.
    À dix heures, elle fit préparer son attelage et ordonna au
cocher de la conduire chez sa fille. Sa visite ne manqua pas d’étonner
Christina.
    — Maman ! Quelle surprise ! Je ne m’attendais
pas…
    — Bonjour, Christina.
    Lady Augusta entra sans se préoccuper, une fois n’est pas
coutume, de la fraîcheur des fleurs, de la présence de nouveaux bibelots, ni
même de la nouvelle toilette de sa fille. Elle lui avait déjà reproché ses dépenses
excessives ; désormais, c’était l’affaire d’Alan Ross. Aujourd’hui, un
souci infiniment plus sérieux l’habitait.
    — Je viens juste de finir de prendre mon petit déjeuner,
expliqua Christina, encore étonnée par cette arrivée inopinée. Voulez-vous du
thé ?
    — Non, merci. Je ne tiens pas à être interrompue par
les allées et venues des domestiques, ni à devoir faire attention aux tasses.
    Christina faillit protester puis se ravisa. Elle s’assit sur
le canapé et prit sa broderie.
    — J’espère que vous n’avez pas été obligée d’annuler le
dîner ?
    — Si tel était le cas, j’aurais envoyé un valet faire
la commission, fit sèchement Lady Augusta. Non, je voulais te parler en privé, car,
ce soir, l’occasion ne se présentera pas.
    Elle observa le charmant profil de sa fille, la courbe douce
du menton, les yeux baissés. Comment pouvait-on posséder à la fois un tel
caractère et si peu d’instinct de survie ? Depuis toujours, Augusta avait
tenté d’inculquer à sa fille sa conception des usages et des interdits en
société, sans jamais y parvenir. La discussion s’annonçait donc fort
déplaisante, mais elle était inévitable.
    — Peux-tu poser cette broderie et m’écouter avec
attention ! De récents événements m’ont amenée à réfléchir : je ne
puis me permettre de te laisser te comporter de la sorte.
    Stupéfaite, Christina

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