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Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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écarquilla ses yeux bleus. Étant une
femme mariée, elle n’avait de comptes à rendre qu’à son mari, non à sa mère !
    — Que voulez-vous dire, maman ?
    — Ne me réponds pas comme si j’étais stupide, Christina !
Je sais pertinemment que tu vas t’amuser dans des endroits très mal fréquentés.
Je comprends qu’une femme puisse s’ennuyer…
    — Ah ? s’étonna Christina, cinglante. Avez-vous la
moindre idée de ce que s’ennuyer veut dire ? S’ennuyer à mourir, au point
d’avoir le sentiment que votre vie vous échappe et, devant le vide de vos
journées, reconnaître que vous pourriez aussi bien passer votre temps à dormir ?
    — Bien sûr que je le sais ! T’imagines-tu être la
seule femme à trouver son mari assommant, et ses amies tellement prévisibles, qu’elle
connaît d’avance chaque mot de leur conversation avant même qu’elles n’aient
ouvert la bouche ?
    Le visage de Christina s’assombrit, mais sa mère n’aurait su
dire si elle était réellement peinée ou simplement agacée.
    — Pourtant, papa, quand il était jeune, devait être
quelqu’un de passionnant ? Un soldat qui revient du front a toujours des
choses à raconter.
    — Passionnant ? Ma chère petite, à ton avis
combien de fois ai-je eu envie de l’écouter décrire le dispositif de l’artillerie
durant la bataille de Balaklava – ou d’ailleurs ? Ton père considérait qu’il
était déloyal de parler des erreurs ou des ambitions des autres officiers, et
vulgaire d’évoquer leurs liaisons amoureuses devant des femmes. Mon Dieu !
Je m’ennuyais parfois à un tel point que si je n’avais pas été une femme bien
élevée, je me serais mise à hurler et je l’aurais giflé, pour le plaisir de le
faire sortir de ses gonds ! Mais cela n’aurait servi à rien. Il n’aurait
pas compris. Il se serait imaginé que j’avais une crise de nerfs et m’aurait
conseillé d’aller me reposer et de me faire monter une tasse de camomille dans
ma chambre. J’ai donc appris à garder mon calme dans ces circonstances, tout en
pensant à autre chose. Un peu d’autodiscipline te ferait du bien ; tu te
rendrais mieux compte de ce que tu as à perdre. Alan te gâte beaucoup trop…
    — Alan ? Me gâter ? D’accord, il me donne
tout ce dont j’ai besoin, mais il s’adresse à moi comme si j’étais une relation
mondaine, quelqu’un avec qui il faut se montrer aimable !
    Ses joues s’empourprèrent sous l’effet de la colère.
    — Il est si plein de piété qu’il en est insupportable !
Il aurait dû épouser une nonne ! Parfois, je me demande s’il possède la
moindre once de passion, de vraie passion !
    Augusta chassa le bref élancement de pitié qui l’avait
traversée. Le moment était mal venu de s’apitoyer.
    — Ne confonds pas passion et excitation, répondit-elle
avec froideur. L’excitation, ma chère, revient à disputer une partie de cartes
en pariant sur des allumettes ; perdant ou gagnant, au bout de la partie, il
ne reste qu’un tas de brins de bois.
    L’expression de Christina se durcit. Elle releva le menton.
    — Vous n’avez pas à me dicter ma conduite, maman. Je
fais ce que je veux.
    Lady Balantyne décida de changer de tactique.
    — As-tu lu les journaux ?
    — Pourquoi cette question ? Puisque mon mari n’y
voit pas d’inconvénient, cela ne vous regarde pas.
    — Si tu les as lus, tu dois être au courant des deux
horribles crimes perpétrés à Devil’s Acre.
    La jeune femme pâlit. Max Burton était à leur service, avant
son mariage avec Alan Ross. Cela peinait Augusta d’avoir à lui rappeler de
douloureux souvenirs, mais le comportement inadmissible de Christina et surtout
son entêtement à le nier ne lui laissaient pas le choix.
    — L’une des victimes a passé un certain temps à notre
service, souviens-toi…
    — Je suis au courant, fit Christina. Une affaire très
déplaisante, ajouta-t-elle en reprenant sa respiration.
    — La police enquête sur les deux crimes.
    — Évidemment. Cela dit, je n’en vois pas l’utilité. Il
n’est pas rare que ce genre de personnes finissent assassinées. À mon avis, on
ne découvrira jamais le meurtrier. Quant au mobile du crime, il n’a guère d’importance.
Je ne peux pas croire que la police s’y intéresse vraiment ; elle est bien
obligée d’ouvrir une enquête parce que c’est ce que l’on attend d’elle.
    — Sans aucun doute ; mais le problème n’est pas

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