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Mort d'une duchesse

Mort d'une duchesse

Titel: Mort d'une duchesse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elisabeth Eyre
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eut-elle refermé sa propre
porte que sœur Ancilla passait dans le couloir afin d’aller voir où en était la
séparation de l’âme de sœur Benedicta de ses attaches terrestres. Se doutant
que la sœur voudrait s’assurer de sa propre condition, la veuve se jeta à
genoux devant sa paillasse et se mit à débiter une prière d’une voix altérée.
    Elle continua à prier tout le temps qu’il fallut à l’aide-infirmière
pour visiter les deux autres cellules occupées ; puis un coup fut frappé à
la porte et la garde-malade entra, suivie d’une sœur converse portant une planche
avec un plat couvert, le potage prescrit par mère Luca. La veuve se leva et
avoua qu’elle se sentait un peu mieux mais souffrait d’une grande agitation du
cœur. Elle ne fut pas surprise d’apprendre que mère Luca lui avait elle-même
préparé une potion calmante et que, comme promis, elle viendrait en constater
les effets après complies.
    Il n’y avait pas de temps à perdre.
    Une fois seule, la veuve but le potage, considéra la potion
calmante, la vida dans le nécessaire disposé sous le lit et, glissant le pot
sous ses robes, en dilua le contenu afin de le dissimuler. Tout cela ne lui
prit que peu de temps et elle fut vite prête à regagner la chambre de Cosima. Il
faisait à présent très sombre en cette soirée d’hiver, les fenêtres
paraissaient noires à côté des reflets rougeâtres de la lanterne sur les murs.
    La cloche sonna les vêpres, ce qui signifiait que les sœurs
se rendaient à la chapelle, sauf celle qui veillait sœur Benedicta et celles
qui, comme la garde-malade, étaient autorisées à vaquer à leurs tâches ; quant
à sœur Ancilla, elle venait de visiter ses patientes et ne serait pas de retour
avant un moment.
    Dans la cellule de Cosima, le brasero avait été regarni de
charbon mais on avait aussi, malheureusement, rempli la coupe. Elle était vide
à présent, et Cosima reposait, immobile et stupéfiée. Même en la secouant, la
veuve n’obtint aucune réaction de sa part.
    Sans s’attarder, elle retourna dans sa propre chambre, où
elle resta un long moment à réfléchir, assise sur le lit. Ensuite elle ôta ses vêtements
et son voile, qu’elle plia sur le tabouret, et se mit au lit, tirant la
couverture jusqu’aux attaches de son bonnet, moucha la chandelle et ferma les
yeux en attendant la visite que mère Luca avait promis de lui rendre quelques
heures plus tard.
    Seuls les êtres sans ressort gaspillent leur temps à se chagriner,
et en quelques minutes, la veuve dormait du sommeil du juste. Lorsque enfin
mère Luca et sa lanterne vinrent faire leur tournée, elles repartirent satisfaites
de l’efficacité de la potion.
    La veuve était habituée à un sommeil léger, et à s’éveiller
quand elle le désirait. Elle entendit la cloche appelant à matines à deux
heures du matin ; à cinq heures, celle des laudes. Et quand la cloche
sonna prime, elle déduisit, à la pâle lueur grise qui apparut aux interstices
de son volet et s’éclaircit peu à peu en lumière matinale, qu’il ne devait pas
être beaucoup plus de sept heures. Elle avait observé qu’avant chaque office, mère
Luca ou sœur Ancilla, parfois les deux, faisaient la tournée de leurs patientes.
Elles passaient presque sans bruit devant les cellules, et seule une oreille
attentive pouvait déceler le léger cliquetis des loquets. L’habitude qu’avaient
les nonnes de s’acquitter en silence de leurs tâches s’avérait bien utile dans
les soins aux malades.
    La veuve avait également appris, en prêtant l’oreille, que
les nonnes priant près de leur sœur agonisante étaient relevées avant chaque
office.
    Mère Luca fut heureuse de savoir que la veuve avait passé
une bonne nuit, mais s’inquiéta de ce qu’elle se sentît encore faible, à vrai
dire presque incapable de se tenir sur ses jambes.
    — Il semble, hélas, que je doive abuser de votre patience.
Mais je me souviendrai de cette charitable maison dans mon testament comme dans
mes prières. Et je vous paierai ce que vous demanderez, pour la nourriture et
les médicaments. Ces brigands, grâce à Dieu…
    Elle leva un pieux regard au plafond.
    — … ont été repoussés avant d’avoir pu dérober ce que
je transportais.
    Sur quoi elle sortit de sous ses robes une petite sacoche
dont le contenu tinta.
    — Ma fille, vous pouvez bien faire ce que Dieu vous
suggère, mais cette fondation est, grâce à Lui, tout à fait à même de

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