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Mort d'une duchesse

Mort d'une duchesse

Titel: Mort d'une duchesse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elisabeth Eyre
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d’heures
et médicaments, un tabouret pour un visiteur, et un autre crucifix, d’une
taille plus modeste, suspendu face au lit afin de retenir le dernier regard du
souffrant. La veuve se laissa tomber sur le lit comme si ses jambes ne
pouvaient la porter plus avant, poussa un long soupir et, les yeux fixés sur le
crucifix, essuya ce qui ne pouvait être qu’une larme.
    — Je remercie Dieu de m’avoir permis d’atteindre cet
asile.
    Elle joignit les mains et récita un Ave Maria que reprit la
sœur. Puis, avec un sourire d’une étonnante douceur dans un visage qui n’était
pas autrement avenant, elle murmura :
    — J’ai échappé à de tels dangers… Beaucoup de voyageurs
doivent être reconnaissants d’être accueillis dans cet abri. Par les temps qui
courent, je ne dois pas être la seule à m’y être réfugiée.
    — Vous êtes la seule qui soit arrivée aujourd’hui, madame,
mais nous avons une autre… ah, voici justement mère Luca.
    La soudaine nervosité de l’assistante infirmière ne parut
pas justifiée par la douceur onctueuse avec laquelle mère Luca les salua, mais
elle n’échappa pas à la veuve. Celle-ci voulut se lever, mais une main fine l’en
empêcha ; elle retomba sur le lit, haletant sous l’effort.
    — Je vois que vous êtes épuisée, madame. Vous devez
vous reposer.
    La main toucha légèrement le front sous la bande de lin, puis
effleura la partie de la joue qui n’était pas voilée.
    — Pas de fièvre, à ce que je vois. Bien, je vais vous prescrire
une potion qui vous fortifiera le sang. Sœur Ancilla, apportez à notre hôte une
coupe du vin que l’on fait chauffer pour sœur Benedicta. Veillez à ce qu’il ne
soit pas trop chaud.
    Une fois que la nonne se fut éloignée, en glissant aussi
vite que l’autorisait la règle, mère Luca enfouit les mains dans ses manches et
tourna toute son attention vers la veuve. Certes, la simplicité de la coiffure
d’une nonne peut conférer une certaine distinction au visage le plus banal, mais
le visage de l’infirmière, même s’il n’était plus tout jeune, aurait été
remarqué n’importe où. La peau olivâtre était restée fraîche, même si les yeux
sombres sous le pli mélancolique des paupières paraissaient avoir vu beaucoup
de souffrance, dans le monde comme entre ces murs. Son sourire, cependant, lorsqu’il
s’épanouissait comme il le faisait à présent, était suffisamment charmant pour
mettre du baume au cœur de ses patients.
    Son assistante réapparut, tout empressée.
    — Quand vous aurez bu ce vin, déclara mère Luca en
tendant la coupe avec une tranquille autorité, vous devrez manger. Je vous
ferai préparer une minestra. Avec de la laitue en guise de sédatif. Plus
tard, peut-être, une potion de valériane.
    — Vous êtes si bonne, ma mère. Je crois que je suis presque
trop lasse pour manger.
    La longue manche dissimulait la plus grande partie de la
main que la veuve posa sur son estomac ; le rauque murmure mourut sous le
reproche des sourcils levés de mère Luca.
    — C’est précisément dans ces moments-là qu’il faut se
forcer, ma fille. Dans cette vie il faut de la discipline en toutes choses, et
recouvrer la santé est le plus important pour vous. À présent vous devez dormir.
    Elle tendit la main vers la coupe que la veuve avait bue à
petites gorgées délicates et dont la chaleur apaisante lui avait tiré de petits
bruits appréciateurs.
    — Puis-je aller à la chapelle, ma mère ? Je ne
puis m’endormir sans avoir prié.
    — Ce soir vous prierez ici, madame. Je viendrai vous
voir après complies, à ce moment-là vous devriez avoir récupéré des plus
grosses fatigues de votre voyage.
    En souriant, mère Luca poussa devant elle son assistante et
ferma la porte de la cellule avec douceur mais fermeté.
    Une fois seule, la veuve abandonna son attitude de docilité
alanguie et resta quelques instants assise, l’oreille aux aguets. Elle entendit,
non loin, des chants assez forts, mais une porte qu’on ferma les étouffa bientôt.
La veuve se leva, rassembla ses jupes et s’apprêta à désobéir à l’infirmière.
    Le couloir voûté était désert. Sur un côté, la porte que
venait de fermer mère Luca ou son assistante conduisait au grand dortoir et à
la chapelle. Sur la gauche, au-delà de celle de la veuve, s’ouvraient trois autres
portes, et en face d’elles, deux longues fenêtres en forme de meurtrières, mais
obturées par un mince verre

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