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Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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m’arracher l’Italie et l’Allemagne !
    En devin extraordinaire, il a découvert par intuition les projets de l’Autriche et ce que sera l’avenir :
    — Vous voulez me déshonorer, monsieur, déclare-t-il à Bubna : l’honneur avant tout, puis la femme, puis l’enfant, puis la dynastie... L’enfant dans les veines duquel le sang autrichien coule, que deviendra-t-il ? Ce qui me tient à coeur, c’est le sort du roi de Rome : je ne veux pas rendre odieux le sang autrichien en France... Vous voulez pêcher dans l’eau trouble. On ne gagne pas des provinces avec de l’eau de rose ; ce sont des moyens que l’on peut employer pour séduire les femmes. Vous commencez par me demander l’Illyrie, puis vous me demanderez le pays de Venise, puis le Milanais, puis la Toscane et vous me forcerez à me battre contre vous ; il vaut mieux commencer par là. Oui, si vous voulez avoir des provinces, il faut que le sang coule. Repoussé jusqu’à Francfort, je vous dirais la même chose.
    On pourrait supposer l’Empereur assoiffé de sang, le taxer de tyrannie, ne voulant, par ambition, admettre aucun compromis et pourtant, il n’a qu’un désir : la paix. Pour l’obtenir, cette paix, il accepterait de s’entendre avec le tsar et prendrait le risque de voir se répéter de nouvelles exigences, sitôt les précédentes acceptées. « Afin, déclare-t-il, d’épargner une effusion de sang inutile », il envoie donc Caulaincourt au quartier général d’Alexandre :
    — Si j’ai des sacrifices à faire, j’aime mieux que ce soit au profit de l’empereur Alexandre qui me fait une bonne guerre et du roi de Prusse auquel la Russie s’intéresse, qu’au profit de l’Autriche qui a trahi l’alliance et qui, sous le titre de médiateur, veut s’arroger le droit de disposer de tout après avoir fait la part qui lui convient.
    Mais le tsar voit dans cette demande la preuve évidente de la faiblesse de son adversaire. Il ne veut même pas recevoir Caulaincourt ! On doit aller jusqu’à l’hallali... La guerre reprend.
    Napoléon quitte Dresde deux jours après l’entrevue avec Bubna pour se porter vers l’ennemi, dont l’armée, forte de cent mille hommes, s’est concentrée et fortifiée à l’est de Bautzen, sur les bords de la Sprée. Pour les Russes, Bautzen doit être un second Borodino d’où l’on ne se replierait pas. Les Français passent à l’attaque. Une nouvelle fois, l’Empereur s’expose aux boulets... et aux averses. Ce jour-là, un officier britannique aperçoit dans sa lunette « Napoléon Bonaparte vêtu d’un simple uniforme avec une étoile, d’un chapeau vineux... » Cet officier – un colonel – se nomme Hudson Lowe.
    Le soir, au moment où la bataille faiblit, Caulaincourt voit l’Empereur faire le geste de remettre sa tabatière dans son gousset, tout en s’exclamant :
    — En voilà encore une dans ma poche !
    La victoire est, en effet, acquise. Mais la seconde position ennemie demeure. Les Prussiens de Blücher forment la droite de cette nouvelle ligne, les Russes d’Alexandre – le tsar commande en chef – constituent le centre et la gauche. Napoléon dicte ordres sur ordres, afin que Ney, dont le corps se trouve encore loin, puisse marcher au canon et tourner la droite prussienne. L’ennemi sera pris ainsi entre deux feux !
    Le lendemain, 21 mai, lors de la bataille de Wurschen, ou deuxième journée de Bautzen, l’ennemi attaque dès le lever du jour, espérant reconquérir le terrain perdu la veille. Vers une heure, le feu se ralentit. Napoléon, voyant que tout se déroule suivant ses désirs, et en attendant l’arrivée de Ney, demande le matelas de cuir que porte un mulet de bât de son escorte, et s’y étend. Il ne tarde pas à s’endormir, en dépit du bruit de la canonnade. Tous les officiers de l’état-major mettent pied à terre, et, passant au bras la bride de leur cheval, se couchent sur le sol et s’endorment à l’imitation de leur maître. À deux heures, ils sont réveillés par la voix perçante du grand écuyer qui s’époumone à crier :
    — Messieurs, à cheval !
    L’Empereur est déjà debout, observant avec sa longue-vue appuyée sur l’épaule du page de service.
    — Ney a fait son mouvement, s’exclame-t-il joyeusement, la bataille est gagnée !
    Ce n’était pas tout à fait exact : le maréchal s’était décidé trop tard et n’avait nullement « tourné » Blücher. S’attardant à la reprise

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